Occupied
7.3
Occupied

Série TV 2 Sumo (2015)

Cauchemar politique et intime en Norvège

Juste avant Noël et sa sur-consommation dans la chaleur des foyers, les derniers épisodes de la saison 1 d’Occupied ont été dévoilés sur Arte. La série norvégienne imaginée par l’écrivain Jo Nesbo est un thriller politique prenant mêlant, comme nombre de séries venues du Nord, intime et préoccupations mondiales. La question que posent les auteurs de la série est d’ailleurs toute simple : qu’est-ce que résister et comment s’y prendre ? Aucun personnage n’a la même réponse toute faîte car chacun évolue et est confronté à ses propres dilemmes. L’intrigue politique prend de plus en plus d’importance donnant au final de cette première saison, une tournure inattendue, mais vraiment passionnante pour la suite. On attend alors que la Norvège se réveille face à son envahisseur, la puissante et froide Russie, dont les positions vacillent à chaque nouveau petit caillou dans l’engrenage des négociations qui se voudraient pacifistes.


Chaque épisode de la série correspond à un mois de l’année (d’avril à décembre) ce qui permet de donner du rythme à Occupied, qui fonctionne par ellipses. Autant le temps politique est lent, c’est celui des négociations, autant celui de l’intime est ici parachuté dans l’urgence. D’un épisode à l’autre les cartes sont redistribuées. Les personnages représentent chacun un visage de la société norvégienne que veut montrer la série, sans oublier les pions plus importants sur l’échiquier : Premier Ministre, journaliste etc. Si la toile de fond, portée par un envoûtant générique, est écologique (les centrales au thorium, les catastrophes climatiques qui nous guettent), l’intrigue est, quant à elle, entièrement politique. C’est surtout une question de choix à l’heure où l’occupation est presque muette, invisible (elle ne change pas concrètement la vie quotidienne et ordinaire des Norvégiens) alors qu’elle résonnait dans les rues autrefois au son des bottes de l’ennemi et des privations pour la population. Quelques facilités auraient pu être évitées, comme la maladie déclarée d’une des membres du gouvernement qui rejoint la résistance presque par dépit. Un certain sens du spectacle aussi dans les salles de conférences de nos hommes politiques (on sent que c’est « joué »). Mais la trajectoire de chacun des autres personnages est si riche que l’on pardonne facilement ces quelques faiblesses. D’autant que le scénario est haletant, que les rebondissements ne manquent pas, sans que la série oublie de prendre son temps. Un régal qui nous tient en haleine. On s’y remet en question, on angoisse avant l’arrivée du mois suivant, annonciateur d’un chaos invisible qu’il soit écologique – la fin annoncée d’une planète sur-consommée – politique – tout se joue à « huis clos » – ou intime, la fin d’une famille, la naissance d’une autre et tout cela sans savoir ce que demain nous réserve.


Côté casting, c’est un sans faute, même du côté des plus jeunes comme de ceux plus engagés dont les discours pourraient frôler la caricature. On retrouve également une partition musicale impeccable, notamment dans le générique. La ville où se déroule la série est à l’image de celle des Revenants (la petite française de Canal+) : envoûtante et dangereuse , recelant autant de violence que d’amour, le tout bousculé par l’arrivée de quelques remous sensibles (que ce soit des morts qui reprennent vie, ou des ennemis « infiltrés » dans la population locale) qui viennent changer un décor familier de quelques menus détails qui font toute la différence. La preuve : ce futur imaginé ressemble au nôtre, pourrait être le nôtre (n’oublions pas la présence de la Russie en Ukraine). On voudrait croire que c’est entièrement une histoire d’anticipation, pourtant on ne peut s’empêcher d’y voir-là notre histoire qui se répète ou qui continue dans le mauvais sens… Une formidable réussite diffusée, encore une fois, sur Arte.

eloch
7
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le 18 juil. 2018

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eloch

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