Jeu, set et match !
5.7
Jeu, set et match !

Anime (mangas) MBS (1973)

Les séries sportives forment une catégorie importante, et extensible, de la japanimation. Importante quantitativement mais aussi subjectivement pour moi. Depuis les années 2000, il y a eu un paquet d’oeuvres du genre de grande qualité qui ont su faire mon bonheur : Hajime no Ippo, Hikaru no Go, Major, Akagi, Ookiku Furikabutte, Giant Killing, Cross Game, Chihayafuru, Ping Pong, Baby Steps, Ginga e Kickoff, Sangatsu no Lion, et encore bien d’autres. Pourtant, il y a une sous-catégorie dans les plus vieilles générations, qu’on ne retrouve plus vraiment et qui me rendraient presque nostalgique : les animes sportifs shoujo. Parmi ceux-ci, Ace wo Nerae est l’un de ses meilleurs représentants.


Après les succès de Kyojin no Hoshi (1968-1971) sur le baseball et d’Attack n°1 (1969-1971) sur le volleyball, la compagnie TMS continue d’exploiter son filon en relançant plusieurs séries sportives. Pour les amateurs de la batte, Tadao Nagahama (Ulysse 31, première partie de La Roses de Versailles) reprend son rôle de réalisateur avec Samurai Giants (1973-1974). Pour le public féminin, on confie à Osamu Dezaki (Ashita no Joe, Ganba no bouken) l’adaptation d’un manga sur le tennis : Ace wo Nerae (1973-1974).


Dezaki venait alors de créer son studio, en 1971, avec d’autres anciens membres de Mushi Production, alors en pleine perte de vitesse. Nous retrouvons parmi ses fondateurs Masao Maruyama (fondateur de MAPPA et M2), le chara-designer Akio Sugino, Yoshiaki Kawajiri (Ninja Scroll) et Shigeyuki Hayashi (Albator). Ace wo nerae est une oeuvre importante pour Madhouse car elle est retenue comme sa première réalisation majeure mais la boîte avait déjà travaillé sur d’autres projets auparavant, pour le compte de TMS, qui avait participé financièrement à sa fondation, mais aussi Sunrise.


Comme beaucoup de séries shoujo, Ace wo Nerae trouve ses racines dans l’incontournable magazine Margaret (Oniisama e..., Hana yori dango). Le manga est écrit par Sumika Yamamoto, entre 1972-1975, puis 1978-1980 pour sa suite. En 1973, cette publication est encore jeune pour passer en série, et elle ne sera complètement adaptée que plus tardivement, lors d’une deuxième et troisième saison sous la forme d’OVA entre 1988-1990, en plus d’un film récapitulatif (1979) et d’un remake, Shin ace wo nerae (1978-1979). Cependant, cela n’empêche pas la première série de ménager un récit court mais satisfaisant avec ses 26 épisodes.


Nous suivons dans cet anime Hiromi Oka, une jeune élève de 14 ans innocente et pleine de vie, avec un doublage parfait de Makoto Kousaka. Accompagnée de sa meilleure amie Maki, elle rejoint le club de tennis de son école, parce qu’elle aime ce sport bien sûr mais aussi pour mater les beaux garçons, comme Takayuki Toudou, et surtout admirer de plus près sa senpai favorite, Reika Ryuuzaki. Hiromi est une kouhai tout à fait ordinaire, une joueuse débutante parfaitement heureuse de faire partie du paysage. Cependant, sa vie en rose ne dure pas longtemps car le nouvel entraîneur du club, Jin Munakata, va voir en elle beaucoup de talent, et pousser la frêle adolescente à viser le top de la compétition.


D’un début très léger, Ace wo nerae devient rapidement un drama sportif intense. L’anime remplit sa grille de bingo avec les formules habituelles que l’on pouvait déjà observer avec Attack n°1 : entraînements qui frisent la torture physique, rivalités pétries de vilénies, un brin de romance, et une détermination branlante, bien qu’inépuisable, de l’héroïne qui conduit à des changements d’ambiance constants au sein des épisodes.


Malgré cela, Ace wo nerae ne tombe pas dans le générique, grâce à une bonne utilisation des codes du genre. Tout d’abord, même si elle devient sérieuse dès qu’elle aborde le tennis, la série n’oublie pas de régulièrement laisser retomber la pression, d’une part grâce aux interactions égayantes entre Hiromi et Maki, et de l’autre part grâce aux scènes dans la chambre d’Hiromi, un microcosme kawaii tout plein... si on ignore les violences envers son chat.


De plus, même si la trame principale est cousue de fil blanc, avec ses facilités et exagérations, j’ai bien aimé la manière dont sont écrits la plupart des personnages. Par exemple, Reika Ryuuzaki, la senpai ‘parfaite’ se révèle rapidement être un personnage agréablement nuancé. Autre exemple, Kyoko Otawa, la principale antagoniste de la première partie, est possédée par une jalousie assez lourdingue mais qui mène au final à des développements aussi surprenants que bienvenus.


Enfin, il est tout simplement satisfaisant de voir Hiromi Oka évoluer de néophyte timide vers une joueuse compétente et téméraire, une transformation qui culmine dans une grande finale palpitante, impressionnante même.


Ace wo nerae arrive à tenir en haleine grâce à son drama, et heureusement car l’aspect sportif en lui-même est assez pauvre : les matchs n’ont presque pas de tactiques, avec l’exception notable de celui de l’épisode 18, la compréhension des règles semble parfois bancale (le terme ‘ace’ a droit à une licence poétique particulièrement vivace), et nous n’échappons pas à quelques techniques spéciales animesques.


La représentation du tennis n’est pas non plus aidée par l’animation très limitée de la série, même si j’ai trouvé les derniers matchs un poil plus prodigues. J’ai été légèrement déçu sur ce point, et je ne pense pas que l’âge de l’anime ou le style de Dezaki puisse complètement justifier la faible quantité de mouvements. Peut-être ai-je été trop gâté par Ganba no Bouken (1975) mais même le plus ancien Ashita no Joe était mieux fourni (1970-1971).


Si l’anime n’impressionne pas par son animation, il se rattrape par son esthétique. Outre la patte habituelle de Dezaki, qui transpire de tous les celluloïdes, l’anime arrive à capturer à merveille le style des mangas shoujo, qu’il transpose avec beaucoup de talent : arrières-plans minimalistes, couleurs vibrantes et pastels, personnages aux cheveux étincelants. On peut aussi compter sur le chara-design d’Akio Sugino pour matérialiser des personnage, surtout féminins, qui ont beaucoup d’allure, une allure capable d’exsuder une pugnacité bouillonnante crevant l’écran lors des grands matchs.


En conclusion, j’ai bien aimé cette première série de Ace wo nerae même si elle n’est pas, je pense, un grand coup d’éclat : elle reste un peu trop conventionnelle dans sa trame, trop limitée dans sa production et dans la faible durée de son récit. Il n’empêche que je l’ai trouvée très agréable à suivre, et cela fait du bien de déterrer un vieil anime qui honore sa réputation. Bonne pioche.

Skidda
8
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le 5 nov. 2022

Modifiée

le 15 févr. 2022

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Skidda

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