House of the Dragon
7.5
House of the Dragon

Série OCS, HBO (2022)

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Ce n’est un secret pour personne que toutes les plateformes, ou presque, cherchent leur GOT. Netflix a vu sa poule aux œufs d’or en The Witcher, pour finalement massacrer le matériau d’origine, Amazon a acheté les droits pour produire The Wheel of Time et Rings of Power, deux mastodontes, Apple a fait Fondation, et j’en passe. Tout cela pour qu’au final les retours du public soient, au mieux, tièdes, au pire, désastreux. Cela faisait un moment que je le disais à mon entourage, et je n’étais pas le seul à le penser, le nouveau GoT, s’il y en a un, sera chez HBO. Et cela n'a pas manqué. Je ne pense pas que HOTD, aussi bien soit elle, atteindra un jour le succès de GoT. Même au pique de la danse, elle effleurera peut-être la série-mère, sans jamais atteindre le phénomène qu’elle fût. Néanmoins, les bases d'House of the Dragon sont très solides. Avec 29 millions de téléspectateurs en moyenne après 24h sur chaque épisode de la saison, rien qu’aux US, c’est énorme ! On est au niveau de la saison 6 et 7 de GoT environ (alors que la saison 8 était à 43 millions). Le succès est déjà foudroyant. Il est même supérieur à mes estimations les plus optimistes. Mais force est de constater, lorsque la qualité est au rendez-vous, le public est plus que partant pour retourner à Westeros, où le jeu du trône est plus que jamais d’actualité.

Une construction narrative épisodique toujours pertinente

Alors que la tendance actuelle chez les blockbusters télévisuels, en soi les séries télévisées les plus coûteuses du moment, est d’avoir écrit deux, trois scènes marquantes et d’étirer le récit en longueur avec des sous-intrigues inintéressantes qui irrémédiablement provoquent un profond ennui chez le téléspectateur, House of the Dragon revient à des fondamentaux plus enthousiasmants. Je pense à Boba Fett, Obi-Wan, Rings of Power, mais tellement d’autres séries sont concernées. Avec HOTD, on reste sur la recette qui a fait le succès d’HBO : des épisodes ayant un début, un milieu et une fin. Des épisodes fortement reliés entre eux, qui se répondent en miroir au fur et à mesure de la première saison.

L’épisode 1 est marqué par la mort d’Aemma, mère de Rhaenyra, scène qui viendra nous hanter lors de la fausse couche de Rhaenyra lors de l’épisode 10.

La série peut être « binge-watchée », mais elle a une saveur bien plus particulière avec une sortie hebdomadaire, pour une flopée de raisons, mais notamment du fait que chaque épisode est un mini-film, d’autant plus avec cette saison qui s’amuse avec les sauts dans le temps et qui a droit à plusieurs « épisodes-pilotes ».

La saison prend le postulat de base que le téléspectateur n’est pas un idiot, postulat en soi plus que respectable, d’autant plus dans le contexte actuel. Il est identifiable à plusieurs reprises, en premier lieu dans le choix des noms attribués aux personnages, inchangés malgré leur évidente complexité dû à leur ressemblance (Rhaenyra, Rhaenys, Rhaena sont trois personnages différents ; nous avons déjà trois Aegon ; Daemon, Aemond et Vaemond sont également trois personnages). Ensuite, le « lore » est non seulement respecté, mais étendu. Les grands fans de l’univers seront comblés, sans que cela rende incompréhensible la suite de l’histoire pour les téléspectateurs plus occasionnels. Mais par-dessus tout, le choix d’avoir une histoire qui s’étend sur trente ans est un merveilleux choix. Il nous permet de mieux comprendre les motivations des personnages, de voir leur relation évoluer, notamment entre Alicent et Rhaenyra, deux amies de longue date, rendant l’histoire encore plus tragique qu’elle ne l’est déjà. Cela a obligé les showrunners de la série à caster des personnages fondamentaux deux fois, voire trois fois (Laena et Laenor Velaryon, par exemple). Tout cela ne fonctionnerait pas si la série n’était pas aussi prenante et réussie. Adaptant fidèlement une histoire écrite par George R.R. Martin, les scénaristes réussissent aussi et surtout à améliorer Fire & Blood, l’ouvrage sur lequel se repose la série. Je pense notamment au personnage de Viserys, merveilleusement interprété par Paddy Considine, bien meilleur que sa version papier (il n’était qu’un poltron et ivrogne personnage) qui donnerait même envie à l’auteur de réécrire le personnage, de son propre aveu.

La scène finale avec Aemond et Lucaerys, où Aemond perd le contrôle de Vhaegar, est aussi plus intéressante. Il y a beaucoup de profondeur et de justesse dans le choix d’écriture. La série est noire, viscérale et complexe.

Des personnages plus gris que blancs

Fidèles à la vision de George R.R. Martin, la plupart des personnages ne sont pas des héros mais des anti-héros, des personnages qui sont à la fois les héros de l’histoire mais aussi, parfois, les vilains. Tous ne sont pas aussi gris, car l’univers de Game of Thrones nous a habitué à des personnages d’une extrême méchanceté et cruauté, mais encore plus que dans la série-mère, beaucoup des personnages d'HOTD ont une double facette. Personne n’est aussi bien caractérisé par cela que Daemon Targaryen. Considéré par George R.R. Martin comme son personnage préféré, il est tout à la fois. Un homme violent, sanguinaire, impulsif mais aussi un homme doux envers certains membres de sa famille, capable de faire des choses héroïques. Je n’avais jamais vu auparavant un personnage ayant autant les deux pieds dans les deux cases de l’héroïsme et de la noirceur. Aemond, son double chez les verts, est déjà plus noir. Dernier exemple sur les personnages, Alicent a beau vouloir usurper le trône de son ex-meilleure amie, elle ne souhaite pas la mort de Rhaenyra et de son camp, contrairement aux autres hommes du conseil restreint. Dans un monde où les scénaristes tentent de plus en plus de répartir les camps en « bons vs méchants », de « blanc vs noir », HOTD impose son style.

Un savoir-faire technique indéniable

Autre pierre angulaire de son succès, la technicité est essentielle dans une série de fantasy de 17 dragons. Les effets spéciaux, non sans-défauts durant quelques scènes, notamment lors des incrustations de bâtiments ou de décors dans des lieux physiquement recréés par les équipes techniques, sont quand même bluffants la plupart du temps. Les dragons, dans une série ayant leur nom dedans, se devaient d’être réussis. Ils ont chacun leur personnalité, leur look bien identifiable et leur taille. Fort heureusement, la fait qu’ils soient à la fois des animaux magiques mais également des armes de destruction massives est clairement compréhensible durant la première saison. Pour ma part, j’ai un faible pour Caraxès, sacrément terrifiant et Syrax.

Autre élément indispensable et toujours apprécié dans l’univers de Game of Thrones, c’est la bande-originale. Je la trouve particulièrement réussie. Sachant que c’est très difficile de faire quelque chose de nouveau dans le même univers, Djawadi a réussi à bien jongler entre renouveau, héritage et continuité. Cela manque d’épique sur certaines scènes, notamment lors de l’apparition de Laenor à dos de dragon pour venir à la rescousse de Daemon lors de l’épisode 3, mais certains thèmes sont magnifiques (celui de Rhaenyra, celui des Velaryon).

Certaines scènes, notamment l’apparition de Viserys dans la salle du trône pour l'épisode 8, sont extrêmement fortes parce que Djawadi a fait un super boulot.

Difficile de ne pas évoquer les costumes pour finir. Ils sont absolument magnifiques durant toute la saison et il est difficile de ne pas évoquer mon plaisir de voir le remarquable travail réalisé par la costumière, Jany Temime, lors de chaque scène de House of the Dragon. Je ne pense pas qu’HOTD soit supérieur à GOT sur tous les points, loin de là, mais je trouve que les costumes sont encore plus réussis.

En résumé, la première saison est une telle réussite qu’elle a réussi à complètement étouffer le bashing autour de la saison 8 de GOT. C’est de bon augure pour la suite, d’autant plus que cette première saison n’est que le préquel de la danse. La saison 2 offrira encore plus de spectacle, et si elle garde cette qualité d’écriture, la série aura de beaux jours devant elle.

MatthieuS
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le 28 oct. 2022

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MatthieuS

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