Frères d'armes
8.2
Frères d'armes

Série HBO (2001)

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Sans doute une des meilleurs choses jamais produite sur la guerre en général et la Seconde Guerre Mondiale en particulier, Band of Brothers est de ces séries que je n'arrête pas de recommander à tout le monde, et que je me regarde facile au moins une fois par an. D'ailleurs, je suis en ce moment même en plein épisode 9 (enfin, au moment où j'écris la critique, hein, j'aurai fini quand tu auras terminé de lire ça, jeune fou). Car moi, jamais je pipeaute.

Que je recommande parce que malgré ses légers défauts de casting (Ross Geller en lieutenant badass qui martyrise ses troupes, j'ai beau tout faire pour y croire ça ne passe pas du tout), son épisode final un peu neuneu et poliment hagiographique, et son ton toujours très militarophile - l'armée, ça vient juste après Dieu et ta mère, blanc-bec, Band of Brothers est ce qui se fait de mieux en série télé à grand spectacle qui n'a pas oublié de travailler le fond.

On peut bien sûr parler de la reconstitution souvent hallucinante, du sens du détail, de la qualité remarquable de la mise en scène (la prise des canons de l'épisode 2 ou l'arrivée dans Carentan mouchent gentiment et sans se fouler la plupart des scènes de combats filmées ever, Soldat Ryan compris), le parti pris esthétique, les acteurs tous - enfin, presque tous - impeccables dans leur rôle, à tel point que certains, avec leur menton carré de GI Joe et leur bogossitude fanée, ont vraiment des gueules qu'on croirait sorties d'un film des années 40. Tout ça est excellent, exceptionnel, rare, même si HBO s'en est donné les moyens.

Mais on peut et l'on doit surtout parler de certains épisodes, qui élèvent ce qui aurait été une simple représentation appliquée et historiquement (presque) correcte d'un conflit mondial vu par le petit bout de la lorgnette de l'Easy Company, en un véritable chef-d'oeuvre de télé, voire de cinéma, vu la gueule franchement cinémascopesque de l'ensemble, et le talent de la réalisation qui fait ici office de standard.

Je pense au soldat Blithe et sa "cécité hystérique", au traitement tout en finesse de la peur de mourir au combat ; je pense à l'épisode Bastogne et sa noirceur, sa puissance, sa dureté, et son joli moment poétique final, qui quitte un peu les sentiers du réalisme pour s'aventurer du côté du symbole, mais avec beaucoup de classe ; je pense bien sûr à l'épisode de la découverte des camps, cet étonnement banal, l'impossible prise de conscience devant une telle horreur.

Des moments éprouvants, qui tentent assez judicieusement d'éviter le pathos ou la mélasse mélodramatique, alors que rien que la bande-annonce du Vel D'Hiv avec Gad Elmaleh © et Jean Reno © donne envie de se pendre au portant de la sobriété après avoir enfilé son kaway anti compassion vomitive.

On peut bien sûr trouver de quoi critiquer, pinailler, argumenter, arguer que l'américanocentrisme de la série est un peu exagéré, que la gloriole militariste est chiante à la longue (jamais l'armée ne sera remise en question), que certaines scènes sont vraiment pénibles voire un peu lourdingues, que quelques personnages sont assez maladroitement transformés en archétypes voyants. Mais cela ne pèse pas bien lourd au regard du boulot abattu, de la qualité d'écriture, d'interprétation, et surtout du sens global.

Un vrai petit moment d'histoire de télévision, après lequel les séries n'ont plus tout à fait été les mêmes, et la vision qu'on peut avoir de la guerre et de sa dégueulasserie non plus, au-delà du gore et des constatations tarte à la crème de rigueur. Une série que je mets à égalité avec le téléfilm anglais Warriors de Peter Kosminsky sur le podium des oeuvres guerrières télévisuelles les plus fortes, les plus honnêtes et les plus marquantes que j'aie jamais vues.
Prodigy
9
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le 7 août 2010

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Prodigy

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