Fargo
8.2
Fargo

Série FX (2014)

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Saison 1 (9/10) :


J'ai adoré le film des frères Coen, j'y suis entré sans mal et suis parvenu à être pleinement captivé par l'ambiance totalement atypique de cette oeuvre qui conjugue à merveille et contemplativement thriller sanglant et cruel, humour (très très !!!) noir et scènes délicieusement absurdes qui n'ont absolument rien à voir avec l'intrigue mais tellement fascinantes qu'on en a absolument rien à faire. Et avec tout cela, des personnages particulièrement atypiques qui donnent parfois l'impression de sortir tout droit d'un établissement psychiatrique.


Donc logiquement, j'aurais dû me jeter rapidement sur cette série. Mais non, bêtement je me suis dit que forcément je ne pourrais qu'être déçu par rapport au film, même si elle est produite par FX, qui a déjà donné des séries d'excellence à l'instar de "The Americans"...


Résultat, dès le premier épisode j'ai su que ça allait fonctionner et je vais même aller plus loin, après avoir vu les dix premières minutes j'ai eu envie de me dire que la série est encore plus forte que le film dont elle est peut-être considérée comme un brillant dérivé (même si un flashback révèle en fait que ce serait plutôt une suite !!!) avec beaucoup de clins d’œil.


Le scénario est constamment imprévisible


la scène de l'ascenseur au début de l'épisode 9, WTF, je crois bien que ça fait des années que je n'avais bondi aussi haut de mon fauteuil


, fait tout pour ne pas ménager le spectateur en rebondissements tout en creusant superbement les personnages (je vais y revenir plus tard !!!) et en flirtant quelques fois avec le fantastique ou du moins le métaphysique (avec quelques références bibliques à la clé !!!). La réalisation est un modèle de rigueur formelle et d'inventivité, rien que la scène du massacre, mélange habile entre humour (décidément très très !!!) noir et horreur, ou encore la pluie de poissons le prouvent magistralement.


Quand aux personnages, ne serait-ce que secondaires, deux frères, véritables Tweedledum et Tweedledee, abyssalement stupides, un duo d'agents du FBI qui ne verrait même pas un éléphant dans un magasin de porcelaine, deux tueurs à gages dont l'un est sourd et muet et l'autre sert d'interprète, etc...etc... que du bonheur...


Pour les personnages principaux, Martin Freeman réussit parfaitement à rendre attachant son personnage d'assureur loser qui va devenir un véritable homme à femmes, qui est capable d'être très redoutable et qui a souvent la sympathie du spectateur


même s'il a une attitude complètement conne au début de l'épisode 9 (il pouvait pas faire semblant de ne pas le reconnaître et d'aller plutôt draguer à la place cette superbe fille qui lui fait de l’œil !!!) et qu'il commet un acte profondément écœurant à la fin de ce même épisode


. Allison Tolman est une véritable révélation en fliquette très rusé sans en avoir l'air, mais celui que l'on retient le plus c'est sans conteste Billy Bob Thornton, génial en tueur à gages sociopathe qu'absolument rien n'arrête, véritable messager de la mort hypnotisant...


Bref "Fargo" est une preuve superbe que si le cinéma américain actuel tourne sérieusement en rond, la télévision est pleinement prête à prendre la relève pour ce qui est de faire des œuvres remarquables et originales.


Une saison 2 est en cours de tournage avec des acteurs différents, ça va être très très très difficile car la saison 1 a vraiment placé la barre très très très haute sur tous les plans.


Saison 2 (9/10) :


Il fallait se lever de bonne heure pour réussir à égaler la barre très très très haute de la saison 1 et à atteindre le niveau incroyable d'excellence des Billy Bob Thornton, des Martin Freeman ou encore des Allison Tolman. Mais visiblement, Noah Hawley, le créateur de la série, et toute l'équipe de la saison 2 avaient mis leur réveil à sonner très tôt puisque aussi improbable que celui puisse paraître le pari a été remporté.


On oublie la décennie 2000, go back to 1979... la fin d'une époque et le début d'une autre, ce qui est très bien souligné ici à base de Ronard Reagan, de gangsters qui ne vont plus être dans le registre western mais dans celui d'homme d'affaires, de minorités ethniques qui comptent prendre leur revanche. Des Etats-Unis encore sous traumatisme vietnamien, sauf que finalement il n'y a pas besoin de plonger dans la jungle pour assister à une guerre, les plaines neigeuses de l'Amérique profonde font tout aussi bien l'affaire. C'est tout cela Fargo, saison 2...


Et on ajoute une galerie de personnages, principaux et secondaires, haute en couleur. Un flic efficace (le père de la protagoniste de la saison 1 !!!) qui arrive à anticiper les événements mais qui malgré tous ses efforts ne parvient pas à les empêcher, une famille de gangsters locaux qui vont devoir faire face à un terrible conflit, un homme de main amérindien froid et calculateur, un bandit noir rusé très porté sur la citation et l'anecdote, un brave boucher, dont les seuls objectifs dans la vie sont d'avoir son propre commerce et de fonder une famille, marié, malheureusement pour lui, à une esthéticienne qui ne rêve que de Californie, de réussite à base de rêve américain, et dont l'inconséquence va être l'étincelle qui va faire exploser la poudrière.


Une intense séquence de massacre dans un motel avec une apparition pour le moins très improbable et donc très surprenante, des références à l'univers des frères Coen (Miller's Crossing, No country for old men, Fargo bien sûr ... !!!), un flashforward dans le dernier épisode qui rappelle les sublimes dernières pages du roman de Charles Dickens Le Conte de deux cités ; et puis des interprétations grandioses, mentions spéciales à Bokeem Woodbine, à Patrick Wilson, et puis surtout Kirsten Dunst, absolument bluffante dans le rôle de la bizarrement attachante Peggy Blomquist, dont le caractère déraisonnable qui la pousse quelques fois à être carrément badass n'est pas sans effet sur le spectateur. De tous, c'est mon personnage préféré, celui qui a donné pour moi le plus de saveur à l'ensemble...


Franchement j'ai adoré, et j'ai eu beaucoup de mal à patienter une semaine à chaque fois entre chaque épisode. C'est avec des séries comme celle-là qu'on se dit que le cinéma a été définitivement dépassé en terme d'audace et de qualité.


Et dire qu'il va falloir attendre 2017 pour voir la troisième saison...


Saison 3 (8/10) :


2010, deux frères jumeaux rivaux, l'un winner l'autre loser (mais bien évidemment tout sera loin d'être aussi simple !!!), le winner homme d'affaires ayant réussi, le loser, agent de probation poisseux pas très net, ce dernier ayant pour petite amie une de ses anciennes «clientes», d'un caractère très fort et assez futée (euh tout de même, je ne suis peut-être pas impartial mais j'estime que celui qui a pour petite amie une femme ayant le physique de Mary Elizabeth Winstead ne peut pas être totalement un loser ; je précise que je suis tombé amoureux de l'actrice depuis que je l'ai vue dans Scott Pilgrim !!!), l'associé dévoué du winner, un méchant sorti de nulle part l'air sympathique mais qui est le Diable incarné, et bien sûr une policière qui devra faire face à cause de toute cette galerie de personnages à une enquête hors-norme...


Troisième et, il semblerait dernière (ce qui est regrettable parce que c'est vraiment une de mes séries préférées mais au fond c'est sûrement pour notre bien, ce serait dommage en effet de finir sur une saison moyenne ou médiocre faute d'inspiration !!!), saison d'une série qui est certainement mon plus gros coup de cœur (oui, je me répète !!!) de ces dernières années, et cela malgré une concurrence féroce. J'ai beaucoup aimé cette série, et j'ai même carrément adoré la seconde moitié de la saison donc je vais tout commencer par citer les raisons pour lesquelles cette dernière est un peu moins réussie que les deux premières (quand j'ai beaucoup aimé quelque chose, je préfère commencer par les défauts pour pouvoir m'étendre ensuite sans limite sur les qualités !!!).


Lors de la première moitié de la saison (je fais exception du troisième épisode sur lequel je vais revenir un peu plus tard !!!), on a le droit à des redites un peu trop évidentes pour ne pas éviter de ressentir un effet de répétition et aussi j'ai trouvé que le personnage de policière (qui fait d'ailleurs un peu partie des redites !!!) est mal défini (sans que le talent de Carrie Coon soit à remettre en cause un seul instant, je tiens à apporter cette précision, c'est uniquement un petit problème d'écriture!!!).


Mais dans cette première moitié, on retiendra malgré tout ce troisième épisode, celui se déroulant à Los Angeles, sorti de nulle part, qui ne fait pas avancer du tout l'intrigue (du moins pour le spectateur qui savait qu'il n'y avait rien de nécessaire à chercher de ce côté-là !!!), mais qui justement par sa gratuité, et aussi pour sa partie d'animation très réussie, est fascinant. On retiendra aussi quelques autres bonnes idées, à l'instar de l'utilisation de la musique de Pierre et le Loup pour définir les protagonistes.


Et puis, il y a la fin de l'épisode 5. A partir de là, la saison va prendre une tournure très intéressante et trouver pleinement sa propre identité à travers des détours totalement inattendus. A partir de là, cette troisième saison n'a absolument rien à envier aux dernières premières. Et à part peut-être dans Game of Thrones dans Breaking Bad et la séquence de l'ascenseur de la saison 1, je n'ai jamais rien trouvé de plus intenses et haletantes dans l'univers série que les vingt premières minutes de l'épisode 8, elles sont scotchantes comme c'est pas permis. Ah oui, la séquence à la lisière du fantastique dans le bowling et la fin ouverte sont géniales...


Pour l'interprétation non plus, cette saison n'a rien à envier. Carrie Coon s'en sort très bien, mais j'ai plus retenu pour le coup Ewan McGregor, qui se fond parfaitement dans deux rôles, ceux de frères jumeaux, différents de comportement et d'allure physique, à tel point qu'on oublie dès les premières secondes que c'est un seul et même acteur qui donne sa peau aux deux personnages. J'ai plus retenu aussi Michael Stuhlbarg, émouvant en associé dévoué, malheureuse victime collatérale. Mais mes deux gros coups de cœur niveau casting pour le coup sont David Thewlis, à couper le souffle,en méchant d'allure affable, très abordable mais qui est en fait véritablement diabolique, et Mary Elizabeth Winstead, tout simplement magistrale, dont on suit le sort de son personnage, qui est mon favori du lot, avec un immense intérêt, et la tournure badass qu'elle prend dans la seconde moitié de la saison apporte énormément à la réussite de l'ensemble.


Pour finir, je ne peux pas conclure sans dire adieu (peut-être!!!) à une série que, sauf si j'ai un jour la maladie d'Alzheimer, je n'oublierai jamais. Merci Noah Hawley.

Plume231
9
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le 9 oct. 2014

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Plume231

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