Une merveille

Ceux qui me connaissent savent que je suis assidument à peu près tout ce qui tourne autour du jeux vidéo, mais ils savent aussi que j’éprouve une certaine aversion pour le on-line et son marchandising. A priori je n’avais donc aucune raison de m’intéresser à un produit dérivé issu d’un MOBA dépourvu de scénario et probablement conçu pour faire de la publicité déguisée aux futurs champions. D’autant que jusqu’à maintenant rare sont les adaptations cinématographiques de jeux vidéo qui ont aboutis à quelques choses de correct (et correct c’était jusqu'à maintenant le meilleur compliment qu’on pouvait leur attribuer).

Pour autant Arcane a su attirer mon attention dès les premières images avec son esthétique très soigné et atypique. Mais il en fallait plus pour me convaincre du bienfondé de la démarche, une belle patte artistique c’est bien mais ce n’est pas suffisant pour être une réussite et, comme vous pouvez le voir à ma note, cette série n’est pas qu’une modeste réussite à mes yeux, c’est carrément un chef d’œuvre. Alors comment ais-je pu tomber aussi fortement amoureux d’une licence pour laquelle je n’avais aucun intérêt, c’est ce que nous allons voir ici en tentant de mettre des mots sur mon syndrome de Stendhal.

Tout d’abord le premier choque fu celui de la réalisation, voir des images fixes c’est une chose, les voir en mouvement s’en ai une autre. Je ne vais pas m’hasarder à développer avec du jargon cinéphile que je ne maîtrise pas assez, d’autre le feront bien mieux que moi mais diantre que c’est beau, chaque plan est soigneusement étudié pour nous en mettre plein la vue du début à la fin, chaque frame de ce chef d’œuvre est un tableau susceptible de finir en screenshot pour devenir votre nouveau Wallpaper.

Ensuite la plus grosse surprise vint du point sur lequel j’étais le plus sceptique, à savoir le scénario. Je voyais mal comment une adaptation d’un tel jeu pouvait s’avéré intéressante et bien construite, d’autant que ce genre de jeu s’adresse à un publique assez jeune ou immature, je m’attendais donc à un ton plutôt guignolesque, enfantin ou au mieux teenage faussement mature, autant dire que j’étais loin du compte. Déjà la série ne cherche pas du tout à placer ses personnages partout pour les faire du fan service dénué de toute substance. Ce n’est pas une vitrine publicitaire comme je le craignait, non, cette série pause réellement les bases d’une histoire profonde qu’elle développe lentement en commençant par la genèse de son univers et de quelques personnage clé. Toute cette saison sera centrée sur le développement de 3 personnages et en particulier celui de Jinx qui atteindra son apothéose dans l’épisode final. Il y a certes plein de référence à d’autres personnages que je n’ai pas forcément décelé aux vues de mes connaissances très limité du sujet (mais je vois qu’internet s’enflamme sur des théories plus ou moins convaincantes de la probable transformation de personnages secondaires en héro connus de l’univers). Jinx est une ersatz d'Harley Quinn qui aurait vite pu tomber dans la facilité, mais non, la série prend justement le contrepied de cette facilité en s'attardant sur son enfance afin de justifier sa folie par des traumatisme et briser cette image caricaturale pour lui donner une réelle identité. Tous les personnages de la série auront se genre de traitement, ce qui les rend tous archi crédible et extrêmement bien traité, sans manichéisme. Les doublages d'excellente facture (Adeline Chetail je t'aime <3) contribuent également à leur donner une réelle prestance, et favorise l'immersion.

Le ton adopté fut également une grande surprise, comme je l’ai dit le rythme est plutôt posé, mais l’univers présenté (d'inspiration steampunk) est également très sombre, dès le premier épisode qui nous immerge dans les bas fond d’une ville crasse on n’hésite pas à nous montrer des drogués et des prostitués, ainsi que des morts et de la baston sanglante. Ça peut sembler anodin mais ça ne l’est pas car comme dit plus haut tout portait à croire qu’on allait assister à quelque chose d’édulcoré, de lissé pour la jeunesse. Et parce qu’on est en 2021, c’est bête à dire mais oui, ça fait du bien de voir une œuvre qui ose être sombre ; à l’aire du militantisme, du dikta bien-pensant et des polémiques twitteriennes ridicules… Mais ne vous y trompez pas, tout cela n’est pas uniquement là pour « se donner un genre adulte » ou faire réagir, c’est parfaitement cohérent dans l’univers présenté, ça sert le propos et c’est même au cœur de la narration. Du reste, cela n’empêche pas d’avoir des personnages noirs et une subtile romance lesbienne mais ce n’est absolument pas forcé pour du quota, c’est pourquoi ça fonctionne parfaitement bien (même si je suis sûr qu’il y aura toujours des cons pour s’en indigner, surtout dans la communauté toxique et ultra sexiste du jeu vidéo on-line).

En ce qui concerne la bande son, l’ost se compose de musiques symphoniques d’ambiance qui accompagnent parfaitement bien les séquences ainsi que des chansons plutôt pop électro pour les événements les plus important dont certaines interprété par des stars connues tel que Woodkid (dans un registre assez inédit d’ailleurs) ou Imagine Dragons. Ce côté pop fait ressortir l'aspect un peu plus commercial de l’œuvre et en décevra surement certains mais pour ma part j’aime assez cette identité que LoL s’est attribué via ses événement e-sport. De cette manière ça crée un certain lien avec le « metaverse » (terme à la mode) de LoL. D’ailleurs pour l’anecdote, le studio français a l’origine de la série était déjà à l’origine du clip qui accompagnait le lancement du personnage de Jinx dans le jeu de base en 2013. Un détail amusant qui permet de voir l’évolution de leur travail et dont les détails sont d’ailleurs magnifiquement réutilisés dans cette série (qui fait également un clin d’œil à cette musique) :
https://www.youtube.com/watch?v=0nlJuwO0GDs

Ce sont également eux qui avaient produit l’incontournable clip Popstar du groupe fictif KDA pour les Worlds 2018 :
https://www.youtube.com/watch?v=UOxkGD8qRB4

Et cet autre clip pour les Worlds de la même année :
https://www.youtube.com/watch?v=fB8TyLTD7EE

Bref, je ne sais trop quoi ajouter si ce n’est que le studio Fortiche porte bien son nom et vient d'accomplir un sans-faute, l'univers est riche, les personnages sont profonds et attachants tandis que l'esthétisme est ultra soigné. J’ai hâte de voir la suite de cette série en espérant une qualité constante des ambitions narrative, ce qui est certains c’est qu’il va falloir être très patient puisqu’elle n’est pas prévue avant 2023 et quand on sait que cette première saison a bénéficié de 5ans de production je pense même que la saison 2 ne pointera pas le bout de son nez avant 2024. Quoi qu’il en soit je ne saurais que trop vous la conseiller, même si vous ne connaissez strictement rien du jeu ce n’est absolument pas grave puisque vous l’aurez compris je n’y connaissais quasi rien moi-même. Sur ce bon visionnage a vous !