Hotel California
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Hotel California

Morceau de Eagles (1976)

Plage paradisiaque, prison dorée et désintoxication… “such a lovely place“

• C’est une pochette noire. La silhouette d’un hôtel assoupi se détache en contre-jour, à la tombée de la nuit.
• C’est mon premier slow, exaltant, mais éprouvant par sa durée de plus de six minutes.
• C’est mon premier 33 tours. Je me vois en train d’ouvrir la pochette, c’était hier.
• C’est ma première chanson anglophone, péniblement déchiffrée à l’aide d’un dictionnaire, dans un monde encore dépourvu d’internet.
• C’est la découverte de la mélancolie et les premières morsures du spleen. Seul dans ma chambre, combien de soirées n’ai-je pas passées à l’écouter et à le réécouter ?


Composé par Don Felder, Don Henley et Glenn Frey en 1977, Hotel California est l’unique “tube“ des Eagles. Unique, certes, mais mondial. Qui n’a pas frémi au son de la voix haut-perchée et plaintive, gorgée d'émotion et à la limite de la rupture de Don Henley ?
« Mirrors on the ceiling,
The pink champagne on ice
And she said, 'we are all just prisoners here, of our own device'
 »


Qui n’a pas vibré sur l’interminable solo des deux guitares entrelacées qui clôt, ou plutôt refuse de clore, le morceau ?


Henley dépeint palace et convives
dans la moiteur tropicale et lascive,
une grandeur décadente et surannée,
des vins fins et du champagne frais,
des candélabres et des miroirs,
de jolies filles et de beaux gars,
le brouillard de l’alcool et du chanvre,
la fête et la danse incessantes.


Vous succomberez à la morosité,
à l’angoisse d’invités retenus contre leur gré
et à la lasse empathie du personnel :
« 'Relax' said the night man, 'We are programmed to receive... ' »


Pour ses auteurs, l'Hotel California est un établissement médical voué au traitement des dépendances aux drogues dures. C’est possible, mais comment ne pas y voir la prison dorée des rock stars qui, des Eagles aux Rolling Stone, sont contraints, après l’échec cuisant de leurs carrières individuelles, de reconstituer leur groupe pour une énième tournée mondiale. Réduits à faire bonne figure, à répondre aux sempiternelles mêmes questions, à se supporter malgré les haines recuites et les détestations réciproques ? Rien ne les y oblige, me direz-vous ? Pourquoi ne vivent-ils pas simplement de leurs rentes musicales ? Parce que la scène et l’argent facile sont les plus dures des drogues ! « Welcome to the Hotel California ».


https://www.youtube.com/watch?v=lHje9w7Ev4U

Créée

le 26 oct. 2017

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Step de Boisse

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