Stephen King ne m'a jamais laissée indifférente. J'ai d'abord connu King à travers des adaptations, télévisuelles, puis cinématographiques, avant de rencontrer l'auteur à proprement parler. J'étais en première, L bien sûr, et j'avais mon badge "rat-de-bibliothèque#chouchoute de la prof de français". Nous avions un voyage à faire, à Auschwitz, et toute une liste de livres à lire pour nous préparer. La prof, qui nous accompagnait, énumérait les livres y figurant, un mois avant notre départ, en nous disant lesquels on pouvait se permettre de zapper et lesquels non. Puis, elle me fixe et me dit "Toi insert real name here, tu dois lire "Ca"." Autant dire qu'un dialogue de sourd s'en suivit : je n'avais aucune idée de ce que "Ca" était, et pensais qu'elle me pointait un livre de la liste. Jusqu'à ce qu'elle me l'énumère comme on parle à un enfant perdu "Ca, c'est le titre du livre, ça, ç-a, par Stephen King. Tu le trouves et tu le lis."


Je l'ai trouvé, je n'ai jamais pu dépasser la moitié du deuxième tome.J'ai eu trop peur. Ma relation aux livres à toujours été un peu particulière. Je suis bordélique, pas du genre soigneuse, mais ne supporte pas d'abimer un livre. Enfant, adolescente, et jusqu'à il y a peu, je pouvais disparaitre dans mes livres, marcher en lisant, mes livres me suivaient partout. Et surtout, que j'aime ou n'aime pas un livre, je mets toujours un point d'honneur à le finir. Respect que je n'ai pas avec un film, une série, un album qui m'ennuierait ou me déplairait. Sauf, pour Ca.


Tout cela est bien joli me direz vous, mais Eia, t'es en train d'écrire la critique de Pet Semetary, pas de Ca ! Et vous auriez raison. Je mentionne cette première rencontre car elle dépeint bien l'effet que King a sur moi. Pas toujours de la terreur, mon cow-boy m'a fait lire Marche ou Crève par exemple, ou Fléau(x?), qui m'ont tous deux bouleversée. Et sont ce que je préfère de King. Quand l'angoisse ne relève pas du surnaturel mais du plausible.


Pet Semetary était en bonne voie, en très bonne voie pour les surpasser tous deux à mes yeux. Du surnaturel, certes, mais du surnaturel plus étrange qu'autre chose. L'accent mis sur un père de famille, sa relation aux siens, à la mort, leur relation à la mort. Je suis moi-même désormais dans la catégorie mère de famille, et toute cette ambiance, ces questionnements, comment les aborder, qu'en faire, cela me parle.


Louis Creed, pour ne pas confronter sa fille à la mort de son chat, suis son ami jusqu'au cimetierre par delà les collines, pour offrir au chat adoré une dernière demeure, visiblement assez peu du goût de la pauvre bête qui revient le lendemain. Le chat, a changé, est étrange, plus vraiment chat, pas vraiment là... Mais lorsque son petit garçon à son tour, se fait renversé par un camion, Louis, ivre de chagrin, et malgré tous les avertissements de son ami, de sa conscience, se dit qu'après tout, si le chat l'a fait, pourquoi pas son enfant...


Cette partie est pour moi la partie la plus intéressante de tout le roman. Les pages pendant lesquelles Louis se retrouve confronter à ce dilemme : il peut revoir son fils, s'il l'enterre là bas. Seulement plein d'inconnues demeurent : personne ne revient jamais comme avant, à quel point aura-t-il changé? Que diraient sa mère, sa soeur? A-t-il le droit de le faire? Toute cette partie là, m'a touchée terriblement. Si quelque chose arrivait à mon fils et que je pensais pouvoir le ramener, que ferais-je?


Là où Stephen King m'a déçue, pour une fois, c'est qu'il a fait du retour de l'enfant, ce qu'on attend de lui. Ce que tout lecteur qui connaitrait principalement ses ouvrages horrifiques attend, en voyant son nom sur la couverture. Et qui moi m'a laissée de marbre. Aucune once de peur, toute écrasée si tant est qu'elle ait pu poindre, par le poids de ma déception. J'aurais voulu la confrontation des vivants. J'aurais voulu l'étrangeté, l'horreur dans l'acceptation de l'étrangeté en son foyer, la dévotion à l'étrangeté. Au lieu de ça, on me sert une fin expédiée sur quelques pages, comme si quelqu'un avait dit au romancier, s'il ne ce l'est dit lui même : "Ca manque d'horreur ton truc..".


Malgré mes réserves, j'ai quand même retrouvé lisant ce livre l'exaltation qui souvent fut mienne un livre à la main, et ne peut condamner l'ensemble d'un roman pour quelques pages qui ne sont pas de mon goût, mais peut-être tout à fait de celui du voisin!

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le 31 mai 2021

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EIA

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