Reste
7.1
Reste

livre de Adeline Dieudonné (2023)

Ayant débuté en littérature avec un roman brillant et extrême, La vraie vie, toutes les publications ultérieures de Adeline Dieudonné ne peuvent sans doute être jugées qu'à l'aune de ce livre fondateur. Il en fut ainsi de Kérozène, qui a aussi secoué ses lecteurs, il en sera de même avec Reste et son postulat de départ, glauque à souhait, mais facile à résumer. La narratrice a retrouvé son amant noyé et, incapable d'en aviser quiconque, elle choisit de fuir avec le cadavre, tout en écrivant une lettre (suivie d'une deuxième) à l'épouse du défunt. Commence alors le récit d'une sorte d'errance qui va durer plusieurs jours, racontée par le détail, et entrecoupée par de multiples flashbacks sur l'existence menée par l'héroïne pendant et avant sa liaison. Malgré la situation sordide, il y a quelque chose de "logique" dans ce périple macabre, et c'est tout à l'honneur de l'autrice de nous le faire sinon accepter, du moins comprendre, à travers toutes les pensées, parfois contradictoires, de son personnage, et son travail de deuil. La crédibilité du livre est une autre affaire, devant l'absence de réaction rapide de la femme légitime et surtout de la police mais bon, l'on veut bien accepter ce manque de réalisme, d'autant que le roman baigne parfois dans un halo fantastique (les scènes chez la "sorcière", qui sont limite) et s'accompagne assez souvent d'un humour noir bienvenu. Les passages qui concernent l'état du décomposition du mort sont eux désagréablement insistants mais là encore, Adeline Dieudonné se doit de justifier son statut d'écrivaine inconfortable. Sur un autre plan, ses descriptions du couple, idéal ou presque, dans un cas, dysfonctionnel, dans les deux autres, ramène le livre à un classicisme psychologique qui n'a vraiment rien d'original. Le plus gênant, en fin de compte, est que l'héroïne de cette sombre histoire, avec un aspect plutôt égocentré, n'est jamais jugée que par elle-même puisque étonnamment absoute par les autres. Un contrechamp final et bref, avec les mots de l'épouse, n'aurait-il pas créé une échappée bienvenue ? Ceci n'est qu'une remarque personnelle née d'une frustration pour un livre certes intense mais un peu trop enfermé dans sa propre progression dramatique.

Cinephile-doux
6
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le 16 avr. 2023

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Cinéphile doux

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