Très étrange sentiment à la dernière page: on lit cette oeuvre de manière compulsive, comme dans une fièvre, mais impossible d'en avoir une appréciation. C'est d'une redoutable efficacité, c'est terriblement écrit, mais le malaise que suscite l'histoire est si grand que l'on n'aime pas ou qu'on n'ose pas aimer. C'est presque la honte qui dévore le lecteur, comme avec l'impression de se repaitre du martyr d'un ex-talaurd (il l'a bien cherché après tout...), de savourer le mélange malsain du sadisme et du voyeurisme, de voir un homme réduit en esclavage et moins bien traité qu'un animal.
On est aussi face à l'incroyable, ce qui augmente encore la fascination, bien loin du côté spectaculaire d'un Chattam, Sandrine Colette décrit un barbarisme quotidien, presque routinier, rabaissant l'Homme à la condition d'un cancrelat. C'est là que cette histoire devient terrifiante: se dire qu'un tel fait-divers pourrait demain faire la Une. La violence de l'homme face à l'homme y deviendrait la norme. On peut user de beaucoup de qualificatifs pour ce livre: prenant, captivant, irrésistible, mais dire qu'on a "aimer" est impossible, sauf à s'avouer inhumain.