Tombé dessus -complètement- par hasard entre deux tournées d'aligot en plein voyage en terre aveyronnaise, le titre provoquant a parfaitement réussi son coup:
-"mais qui ose choisir un titre pareil ?"
[Lecture du nom de l'auteure]
-"ah oui en effet, logique"
Oui, logique. Parce ça ressemble tout à fait à ce que Madame Despentes écrit depuis le début de sa carrière littéraire. Depuis son premier roman -et le plus drôle, à mon goût- Baise-moi, Despentes joue sur ce côté "punk" (autant qu'il est possible dans son cas, en étant plus qu'intégrée dans la bonne société parisienne). Et si je donne raison à ses détracteurs qui évoquent son langage ordurier, je ne le prends pas comme un défaut.
Despentes est crue, ses personnages le sont plus ou moins, et elle cherche à percuter. Avec plus (Vernon Subutex, trilogie aboutie) ou moins (Cher Connard) de succès.
Pour ce roman, l'auteure s'engouffre dans une relation épistolaire entre deux personnages opposés. L'un est un écrivain, tel que Despentes doit les imaginer, alcoolique, beauf et machiste, tandis qu'en face, l'actrice est désirable, "positivement" cocaïnomane et encore demandée malgré les années qui passent, tel Despentes se réinventant.
La forme du récit est intéressante et le propos bien plus intriguant que les premiers échanges ne laissent paraître. Et en opposition d'abord frontale, les deux personnages vont apprendre chacun de l'autre jusqu'à réaliser, qu'en dépit du gouffre moral entre eux, une amitié incongrue se développe malgré eux.
Pour le reste, le fond reste assez limité : l'actrice, Rebecca, passant une bonne partie de son temps à chier sur la tête de l'auteur, Oscar, en pleine tourmente #metoo. Ce dernier passe une bonne partie à se plaindre que le monde est injuste. Pourtant, sur certaines pages, on arrive à dépasser le combat de coq stérile avec notamment le troisième personnage, Zoé. Celle qui a accusé Oscar et précipité la relation épistolaire entre Rebecca et lui, servira d'élément perturbateur dans ce jeu de postures morales. Tantôt célébrée comme une figure du combat #metoo, tantôt fustigée et harcelée conjointement par "l'extrême-droite" et les "féministes", Zoé est un peu le seul intérêt de son bouquin.
Elle est le prisme à travers lequel Despentes prend du recul sur le mouvement de fond qu'a été #metoo et critique, comme à son habitude, les dérives d'une posture idéologique.
Un lac d'autocritique dans un océan convenu. Plaisant à lire, mais relativement limité dans son ambition.