ça commençait bien, pourtant.
On me vendait un univers à la sauce Pullman et un passage dans un autre monde façon Ewilan, le tout vécu par des adolescents ma foi assez réalistes. Au début, la sauce prend, elle prend même très bien.
Mais Starpoint rate son envol dès l'arrivée dans l'univers alternatif, trop brouillon et manquant clairement de ce je ne sais quoi qui rend À la croisée des mondes et La quête d'Ewilan si merveilleux. Si l'univers imaginé se révèle très original, on ne décollera jamais réellement de notre fauteuil au cours de cette lecture, finalement très convenue. Qu'importe les situations, à aucun moment je n'ai ressenti la moindre angoisse pour les personnages, à aucun moment je ne me suis senti immergé dans la situation qu'ils vivaient. Peut-être la faute à un rythme cassé lors des passages d'un monde à l'autre, peut-être un manque d'implication venant du traitement des personnages.


Car c'est bien là le principal souci de ce roman, et la raison de ma note si sévère. S'il ne s'agissait que d'une intrigue et d'un rythme fragiles, j'aurai pu admetter un 6, voire 7... mais il y a une chose que je supporte de moins en moins dans la littérature fantastique, ado qui plus est, c'est le traitement des personnages masculins/féminins et de leur relation.


Malgré toutes les situations désespérées, incroyables, exaltantes ou effrayantes dans lesquelles se trouvera le personnage principal, Pythagore de son prénom (si si), il n'en ressortira toujours qu'un seul objectif, visiblement poignant : coucher avec l'héroïne, cette rouquine de Foresta. Le héros fait une véritable fixette, à la limite du malsain, pour ce personnage. Chaque fois qu'il la regarde (et c'est souvent), on a droit à un descriptif de son envie de sexe.
Alors, ok, on parle d'adolescents, et je ne suis pas contre un poil de réalisme : ça pourrait même être intéressant de montrer les envies sexuelles de personnages de cet âge, au-delà même de la simple romance. Mais lorsque ce qui ne devrait être qu'un détail vient envahir chaque putain de page du roman, ça en devient franchement fatigant.


Le seuil du gerbant est atteint vers la fin du roman, lorsque, dans des vestiaires, Pythagore se permet de toucher la hanche de l'héroïne, guettant sa réaction.
Elle ne réagit pas (comme à chacune de ses tentatives).
Qu'en déduit notre noble héros ? "Si elle ne réagit pas, c'est qu'elle veut le faire."
Sérieux. Mot pour mot : "Si elle n'avait pas envie qu'il la touche, elle serait déjà partie, elle ne serait même pas venue le retrouver dans les vestiaires." Je sais pas vous, mais j'ai l'impression de lire l'excuse d'un violeur/harceleur. Non mais c'est dingue ! C'est un roman pour les adolescents. Est-ce que l'auteure vit à ce point dans un autre monde pour ne pas réaliser que c'est typiquement ce genre de poncifs qui façonnent une sexualité où le consentement est trop souvent absent ?
J'insiste bien sur le point qu'à AUCUN moment du roman, Foresta ne laisse donner l'impression à Pythagore qu'il n'a la moindre chance. Sous prétexte d'écrire un personnage mystérieux, Maie-Lorna Vaconsin décrit une jeune fille totalement insensible aux avances du héros et qui, sur le chapitre final, va soudainement tomber dans ses bras lors de ce qui pourrait être considéré comme le summum de la lourdeur. Et bien sûr, aucune explication n'est donnée à ce geste (ce sera pour le second volume, j'imagine). En résulte l'impression navrante que, si l'homme insiste pour coucher, ben c'est qu'il faut bien le faire. Et que si une femme vous résiste, eh bien montrez vous plus insistant, ça finira par passer.


Sérieusement.


Je ne comprend pas comment on peut écrire ce genre d'absurdités pour un public adolescent.
Je ne comprend pas comment un éditeur peut porter aux nues un tel torchon.
Je ne comprend pas comment le dit torchon peut être promu aux imaginales.


Alors je me suis demandé si je ne voyais pas le mal partout, si ce n'était pas juste de la maladresse... oui, bien sûr, c'est sans doute juste de la maladresse, mais au final ce qui compte, c'est ce qui est écrit, pas ce que voulait écrire l'auteure, non ?


Bilan : un univers sympa mais brouillon, un début assez chouette, soudain gâché par des clichés romanticos-sexuels dignes des vieux James Bond.

wildsevens
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le 18 avr. 2017

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