Lectures 2023 (liste évolutive)

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Dans la bibliographie sans cesse grandissante consacrée au Kid de Cincinnati, et dans ma bibliothèque spielbergienne en particulier, il y a un certain de documents consacrés à Jurassic Park. Film culte pour moi (pour plein de raisons inutiles à développer ici), déterminant dans l'histoire des techniques du cinéma par son approche révolutionnaire des effets visuels créés par ordinateur, il a déjà fait l'objet de nombreux récits et études, dont certains remarquables. Autant dire que, pour me surprendre sur le sujet, il faut y aller.
C'est pourtant l'exploit réussi par James Mottram, qui fournit un récit fourmillant de détails, d'interviews, qui prend le temps de reconstituer certaines journées de tournage en entier, bref : qui vous donne l'impression d'avoir participé à la création du film du premier au dernier jour.
Cerise sur le gâteau, si une grosse moitié du livre est consacrée au premier film de ce qui est devenu ensuite une saga cinématographique, deux autres chapitres abordent également les deux longs métrages suivants, "Le Monde Perdu" et "Jurassic Park III" (réalisé par Joe Johnston), ce qui ne manque pas d'intérêt, même si le niveau de précision décroît de film en film.
Comme dans le livre sur "E.T." (cf. plus bas), les collectionneurs seront ravis de découvrir des pages détachables, fac-similé en tous genres, qui ajoutent un gentil côté geek au livre, tout en étant parfois très intéressants (on y trouve des storyboards détaillés par exemple).
Bref, un pur bonheur pour un spielbergien convaincu, qui permet en outre de démarrer ce top de lecture 2023 par une joyeuse aberration non littéraire :)

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Avis à ceux qui, par principe, dénigrent le prix Goncourt : le cru 2023 est formidable. Jean-Baptiste Andrea atteint une consécration méritée, tant sa maîtrise littéraire, son sens du souffle romanesque et des personnages incarnés, et sa volonté acharnée de délivrer une littérature populaire de grande qualité, atteignent leur apogée dans son quatrième roman. Un peu moins de 600 pages de bonheur, impossibles à lâcher, où tout paraît d'une évidence totale, où tout sonne juste malgré l'ampleur romanesque des aventures qui emportent ses protagonistes, où un mystère savamment construit autour d'une statue particulière vous tient en haleine jusqu'à la toute fin, où le choix de la période historique (la première moitié du XXème siècle en Italie) est intelligemment exploité et entièrement mis au service de l'intrigue.
Implacable au meilleur sens du terme, ce roman est une merveille.

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Extraordinaire David Grann ! Révélé à un large lectorat grâce à "La Note américaine", véritable chef d’œuvre devenu récemment un film de Martin Scorsese, "Killers of the Flower Moon", le journaliste du New Yorker semble décidément capable de transformer n'importe quel sujet en récit palpitant et éclairant. La preuve avec cette enquête historique sur l'épopée tragique d'un navire britannique au XVIIIème siècle, parti affronter les océans avec quatre autres bateaux, pour tenter de capturer un galion espagnol croisant dans le Pacifique avec une fortune colossale à son bord.
D'une précision scrupuleuse dans les détails, Grann raconte les recrutements forcés pour composer un équipage, l'organisation de la vie à bord, l'organisation hiérarchique, la violence de la vie à bord, les maladies, les tempêtes, les innombrables dangers de la mer - avec une mention spéciale pour le passage relatant le passage désastreux du Cap Horn... Puis le naufrage, la survie, l'interminable retour de certains en Angleterre, et l'invraisemblable guerre de communication ayant conclu ces aventures.
C'est passionnant de bout en bout, tout à la fois récit historique au cordeau et récit d'aventures haletant, avec un souci de compréhension de l'humain pris dans la tourmente qui force l'admiration.

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Dans la bibliographie sans cesse grandissante consacrée au Kid de Cincinnati, et dans ma bibliothèque spielbergienne en particulier (bis), il fallait bien qu'un jour vienne y figurer un livre de Laurent Bouzereau. Petit Frenchie parti à l'aventure à Los Angeles, Bouzereau a beaucoup travaillé, et bénéficié de concours de circonstances heureux, pour devenir dans les années 1990 le documentariste attitré de Spielberg, présent sur tous ses tournages pour composer les making of de ses films, pour la plupart présentés dans les bonus des DVD et Blu-Ray.
C'est dire si le monsieur connaît son sujet, et si un livre signé de sa main peut présenter d'intérêt. Ce qui ajoute un vrai plus, c'est son choix de se focaliser sur les sept premiers longs métrages de Spielberg, de Duel à E.T., réalisés en un peu plus de dix années absolument exceptionnelles. Ses récits sur les films, leur préparation, leur tournage, leurs fortunes diverses, sont parfaitement menés, même s'ils sont sans doute un peu consensuels (comme la plupart de ses making of par ailleurs, calibrés au millimètre). L'iconographie qui les accompagne est foisonnante, riche en clichés rares, issus de la collection personnelle de Bouzereau ou d'archives inédites.
En revanche, ce qui fait la différence, c'est la longue interview que Spielberg a accordée à Bouzereau sur chacun de ces films. Le réalisateur américain s'exprimant assez peu, recueillir autant d'informations de sa propre bouche est un trésor inestimable, et propose une immersion captivante dans l'esprit d'un artiste possédé par son art, humble et généreux, dont la mémoire recèle nombre d'éléments de compréhension uniques pour saisir l'importance de ce début de carrière beaucoup plus complexe et contrasté qu'il n'y paraît.

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Dans la bibliographie sans cesse grandissante consacrée au Kid de Cincinnati, et dans ma bibliothèque spielbergienne en particulier (ter), il manquait indéniablement un ouvrage de référence sur E.T. l'Extra-Terrestre, film pivot de l’œuvre du réalisateur, déclencheur pour moi de ma passion pour son travail et pour le cinéma de manière plus générale.
Cet ouvrage, le voici enfin.

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A force d'entendre lecteurs et interviewers lui demander pourquoi il écrivait des romans noirs aussi noirs, Marin Ledun a fini par se poser sérieusement la question. La, ou plutôt les réponses sont contenues dans ce petit livre magistral qui, tout en refusant d'être une théorie du genre, en arpente les ruelles obscures en amateur éclairé, et permet à l'écrivain de raccorder son amour du mauvais genre à ses préoccupations sociales, politiques et personnelles.
Le seul défaut du livre (qui est en plus un objet superbe) : il est trop court !
A lire et relire, pour ceux qui défendent l'idée que le polar, en plus d'être de la vraie littérature (quand il est bien fait en tout cas), est le miroir vivant, fidèle et sans cesse mouvant du monde dans lequel nous vivons.

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Les auteurs de la Série Noire sont en feu cette année. Après l'excellent retour de DOA en janvier, voici Marin Ledun à son tout meilleur grâce à ce thriller politique qui décrypte l'emprise néfaste et cynique d'une multinationale néerlandaise de la bière au Nigéria, sur fond de misère endémique, de maltraitance généralisée des femmes et de prostitution. Ce sujet dur, Ledun le transcende par un art admirable des personnages, de quelque bord soient-ils, par l'empathie qu'il éprouve à l'égard des femmes qui, dans ce pays où rien ne leur est accordé, se battent sans relâche pour renverser la table, et par un style qui a gagné en fluidité sans rien perdre en colère ni en engagement. Du très grand Marin Ledun, à lire absolument.

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Posé pile à la croisée du "Ca" de Stephen King et de Stranger Things, ce roman pompe allègrement dans ses univers de référence en recourant à tous leurs éléments emblématiques (une monstruosité souterraine qui répand sa sombre puissance sur une petite ville jusqu'à faire péter les plombs de certains de ses habitants, une bande d'enfants "nerds" et joueurs acharnés de jeux de rôle, qui se retrouvent en première ligne de la résistance tout en subissant le harcèlement d'ados plus grands, bêtes et méchants, une entreprise mystérieuse qui mène des expériences secrètes dans les environs).
Et bizarrement, ça marche. Il ne faut pas en attendre la moindre originalité, mais Julien Freu assume sans complexe ses sources d'inspiration, et les sublime par une vraie sincérité, et surtout un sens du récit, du rythme et du suspense, qui assure une lecture prenante de bout en bout.
Intime et spectaculaire, une belle promesse d'avenir pour peu que Julien Freu fasse preuve de plus d'originalité à l'avenir, sous peine d'être cantonné à un J.J. Abrams de la littérature... Rendez-vous au prochain !

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DOA, c'est une méthode : choisir un sujet, le plus complexe possible (le terrorisme, l'Afghanistan), le considérer comme un moteur à décortiquer pièce par pièce, avec la plus haute précision, pour comprendre et faire comprendre comment il fonctionne, et restituer le résultat de ces recherches sous forme de polar à haute tension, noir et compact, où rien n'est laissé au hasard.
Avec Rétiaire(s), cet auteur décidément inimitable refait le coup, cette fois avec la drogue et ses trafics, dont il décompose les réseaux, les fonctionnements, les mafias, avec un sens aigu du suspense et sa fameuse précision d'entomologiste. Un opéra de violence et d'intelligence d'une puissance dévastatrice, pour le premier grand rendez-vous polar de 2023. Ça commence fort !

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Relecture avant d'enchaîner avec le tome 2 qui vient enfin de paraître, après six ans d'attente - et donc d'oubli relatif de ce qui se passait dans ce premier volume...
Retrouvailles au plaisir intact avec la verve et l'humour de Pennac, son art des personnages iconoclastes, sa formidable tribu Malaussène dont il explore la nouvelle génération (délaissant au passage quelques figures marquantes des précédents opus, Jérémy, Clara et Louna en particulier). Joie aussi de constater que le regard de l'auteur n'a rien perdu de son piquant, surtout quand il s'agit de titiller son époque - ici, les grands patrons voyous, l'horripilante omniprésence de la littérature du soi-même qui croit en l'importance démesurée de son nombril au nom de la Vérité, les aspirations libertaires d'une jeunesse désabusée par une société qui ne croit plus en elle depuis longtemps...
Pennac fait mouche sans démagogie, avec cette petite étincelle au coin de l’œil et ce sourire en coin dont le meilleur de sa littérature s'est toujours orné. Pas dupe, mais pas donneur de leçons non plus, à l'image de son vieillissant Benjamin, las de tout sauf de Julie et des siens, et de l'inénarrable chien Julius bien entendu. Un bonheur qui, pour moi, ne s'est jamais démenti depuis "Au bonheur des ogres".

Annotation :

"Entre Jason Bourne et James Bond", proclame le bandeau sur le livre.
Ben, c'est vrai.
Et c'est drôlement bien fichu. Toute la réussite du roman tient à ce cocktail parfaitement mélangé, à l'excellent équilibre trouvé par Brownlow entre suspense, personnages de qualité, humour piquant à l'occasion, intrigue à plusieurs compartiments menant à nombre de rebondissements impeccables, et scènes d'action ébouriffantes où tous les coups sont permis.
Rien à dire, dans le genre c'est excellent !