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89 films

créee il y a plus de 7 ans · modifiée il y a plus d’un an

Metropolis
8.1

Metropolis (1927)

2 h 25 min. Sortie : 6 février 1927 (France). Muet, Drame, Science-fiction

Film de Fritz Lang

Marius Jouanny a mis 9/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

2 septembre. Voir critique.

La Balade sauvage
7.5

La Balade sauvage (1973)

Badlands

1 h 34 min. Sortie : 4 juin 1975 (France). Road movie, Drame, Policier

Film de Terrence Malick

Marius Jouanny a mis 8/10.

Annotation :

3 septembre.

Martin Sheen et Sissy Spacek vivent tous deux, après une rocambolesque fugue, en autarcie dans la nature, ou une certaine vision du bonheur absolu. Un bonheur qui serait d’ailleurs parfait si Sheen ne tuait pas tout ce qui bouge à la moindre occasion simplement par précaution et nonchalance. Pour son premier film en 1973, Terrence Malick ne brille pas par l’originalité de son script : dans la pur tradition d’un « Bonnie and Clyde » de Arthur Penn (d’ailleurs remercié au générique) sorti six ans auparavant ou « Sugarland Express » de Spielberg sorti l’année suivante, il réalise une cavale dans la campagne profonde des Etats-Unis, un road-movie où les cadavres s’accumulent sous le nihilisme exacerbé de son personnage principal. Car la dynamique dramatique est ici tout de même un peu différente : Sheen embarque sa superbe rousse teenager sans oublier de tuer son père au préalable, et celle-ci se laisse emporter moins par ardeur ou choix délibéré que par curiosité juvénile.

Non, Malick tire ici son originalité dans l’ode naturaliste qui dominera la quasi-entièreté de sa filmographie. Ces superbes paysages d’horizons désertiques, ou de végétation luxuriante, parfois mise en valeur par l’excellent morceau classique « Gassenhauer » de Carl Orff fait apparaître une osmose idyllique. Le contraste qu’il opère entre cette nature si belle et cette société américaine si castratrice et engluée par les contraintes matérielles est fulgurante, tout comme la tranquillité, l’insouciance de notre superbe duo, en déconnexion totale avec leurs actes. La voix-off est juste, et même si tout cela sent beaucoup l’amateurisme (un des rares films avec une perche dans le champ de la caméra aussi flagrante !) et manque d’ambition narrative, son rythme faiblit peu et l’empathie, même si elle est déréalisée par les comportements insensés de Sheen, est bien présente.

Casablanca
7.9

Casablanca (1942)

1 h 42 min. Sortie : 23 mai 1947 (France). Drame, Romance, Guerre

Film de Michael Curtiz

Marius Jouanny a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

4 septembre.

Erigé en classique d’entre les classiques du cinéma américain, « Casablanca » était, il faut le dire vu son année de sortie (1942) pleinement soucieux des préoccupations de son époque. La double dynamique dramatique fonctionne à merveille, celle des préoccupations globales (espionnage, essor du nazisme durant les premières années de la Seconde guerre Mondiale, organisation de la résistance…) opposées aux passions individuelles, celles entre Humphrey Bogart et Ingrid Bergman. Pertinent sur les deux tableaux, le film se veut notamment intrigant d’un point de vue historique, sur les relations contradictoires entre la France de Vichy et le régime hitlérien.

Seulement, je le trouve un peu surestimé dans la mesure où jamais le film ne fait preuve d’audace : Micheal Curtiz était un exécutant d’Hollywood, et n’impose jamais de style particulier, même si la mise en scène déroule un classicisme d’une certaine élégance. Quelques mouvements de caméras sont même appréciables, ce que je lui reproche surtout c’est une narration beaucoup trop littérale. Mise à part la dernière partie où les intentions de Bogart sont floues jusqu’au rebondissement final (et encore) tout le reste manque de mystère, à commencer à cause de ce stupide flash-back à Paris, qui nuit au charme de la romance alors que la suggestion aurait eu mille fois plus d’impact. Je reste néanmoins béat d’admiration devant un couple aussi irradiant et mythique du cinéma, Bogart et son cynisme dissimulant un cœur exsangue, Bergman déchirée entre la raison et l’amour. Voilà un duo d’acteurs profondément incarnés et qui implique le spectateur !

La dolce vita
7.8

La dolce vita (1960)

2 h 54 min. Sortie : 11 mai 1960 (France). Comédie dramatique

Film de Federico Fellini

Marius Jouanny a mis 6/10.

Annotation :

4 septembre.

La construction narrative de ce film de Fellini est pour le moins étonnante : jamais, pour un film de de 3 heures, je n’en ai vu d’aussi monocorde. Les scènes se succèdent avec pour seul cohérence et lien direct notre assez insupportable personnage principal Marcello. Il va de fête en fête, de flirt en flirt avec des blondes plantureuses, et il n’y a jamais de remise en question, jamais ou presque de tension dramatique qui ne soit de toute façon désamorcée par la suite. En résulte un film sur le vide existentiel, qui se veut pesant et le devient sans détour. On vit complètement déconnecté de la réalité pendant ces 180 minutes, et l’effet serait peut-être saisissant s’il n’était pas fade la plupart du temps. La seule séquence m’ayant réellement impliqué reste finalement celle où l’on annonce à une femme entouré de paparazzis l’accident tragique qu’on subit ses enfants.

Malgré tout, Fellini est un grand réalisateur et s’il m’a un peu perdu sur le fond, m’a soutenu avec une certaine maestria sur la forme. Avec ces bavardages incessants, ces allers et venues, cette morosité permanente, le film aurait très bien pu devenir ennuyeux à mourir. Or, Fellini parvient par une habilité de mise en scène à nous délecter de la sève de chaque séquence, chaque regard, dans un bal de morts-vivants blindés de frics qui hypnotise presque. Le film entier devient alors une cage irréductible où la claustrophobie est subtilement amenée. Mais il reste que des films sur le rien, le vide de l’existence, d’autres cinéastes (Sofia Coppola, Hou-Hsiao-Hsien, les frères Coen…) le font bien mieux que Fellini. Lui-même parvenait à se défaire de l’abstraction complète de ses thèmes par un peu d’émotion avec « Les Vitelloni » par exemple. Dans « La Dolce Vita », la fuite en avant narrative a de quoi agacer à bien des égards, malgré son certain potentiel de fascination.

Tueurs de dames
7.1

Tueurs de dames (1955)

The Ladykillers

1 h 31 min. Sortie : 3 février 1956 (France). Comédie, Gangster

Film de Alexander Mackendrick

Marius Jouanny a mis 5/10.

Annotation :

5 septembre.

Cette comédie de Mackendrick ne vaut finalement pas plus cher que son remake des frères Coen. Le réalisateur a beau vouloir soigner une écriture qui pourrait fonctionner sur le papier, le film reste mal interprété, mal rythmé et d’ailleurs aussi très mal éclairé. La dernière partie du film devient complètement systématique dans la mise à mort des personnages au point où cela en devient quasiment ridicule. Il y a certes une volonté satirique et un humour typiquement anglais parfois appréciable, mais c’est beaucoup trop pachydermique à mon goût. De la part de Mackendrick, je m’attendais à beaucoup mieux. Je ne comprends pas trop l’engouement de beaucoup pour ce film, à commencer de la part des frères Coen eux-mêmes, qui en ont tirés leur pire film.

Le Faucon maltais
7.3

Le Faucon maltais (1941)

The Maltese Falcon

1 h 40 min. Sortie : 31 juillet 1946 (France). Film noir

Film de John Huston

Marius Jouanny a mis 8/10.

Annotation :

7 septembre.

« Le Faucon maltais » est une alchimie élégante synthétisant toutes les qualités des films noirs. Si la mise en scène n’est pas éclatante d’audace, bien que terriblement efficace et bien huilée, c’est surtout son écriture qui me délecte pleinement. Il y a tout d’abord ces dialogues, si fins, et si superbement envoyés par Humphrey Bogart, faisant très souvent mouche jusqu’à l’hilarité. Il y a ensuite cette intrigue, qui accompli un vrai tour de force : plutôt complexe sans en rajouter des tonnes, elle ne perd jamais le spectateur comme « Le Grand Sommeil » peut le faire. On n’échappe pas non plus à quelques flamboyantes allusions sexuelles, dont le fameux : « si je ne vous dis rien, vous ferez encore quelque chose de sauvage et imprévisible ? ».

Toute cette mascarade est déjà satisfaisante en soi, mais elle se transcende par les différents portraits significatifs que Huston, qui signe le scénario d’un de ses premiers films ici, brosse avec pertinence. L’avidité et les traîtrises des uns et des autres, le cynisme non sans faiblesse de Bogart : l’humour du film cache bien une noirceur dénonçant l’individualisme de la société américaine. Et ce final, si beau, fort et castrateur, enfonce magnifiquement le clou.

Les Moissons du ciel
7.6

Les Moissons du ciel (1978)

Days of Heaven

1 h 34 min. Sortie : 16 mai 1979 (France). Drame, Romance

Film de Terrence Malick

Marius Jouanny a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

7 septembre.

Malick signe d’abord et avant tout avec « Les Moissons du Ciel » un film beau à s’en damner. Les plans sont comme autant de grands tableaux naturalistes, au détour d’un frémissement du vent dans les champs de blés, d’un ciel nuageux sublime, d’une réunion des deux pour un ballet à couper littéralement le souffle. Cette ode à l’infinité immuable (ou presque, voir la scène de l’invasion de sauterelles) nature est d’une force prodigieuse, mais ne suffit évidemment pas en soi pour construire un film. Ce deuxième long-métrage de Malick se veut donc aussi, à la manière d’un Cimino, une fresque sociale alliée aux tourments intensément romantiques du triangle amoureux. En cela, les similarités avec « La Porte du Paradis » sont nombreuses, même si Malick se veut plus optimiste dans sa conclusion.

La consistance du film tient donc à peu de chose : la description d’une catégorie sociale défavorisée aux Etats-Unis du début du siècle dernier au point de devenir nomade, l’attachement à une famille recomposée parmi eux, dont le couple se fait passer pour frère et sœur par nécessité. Intervient un fermier seul et cultivé qui va les sortir de la fange, pour le meilleur et pour le pire. La simplicité du récit, ses symboles sont tellement mis en image avec une ardeur esthétique absolue qu’il est difficile de bouder son plaisir, même si je trouve par exemple la voix-off moins marquante et utile que dans « La balade sauvage », et le schéma dramatique globalement prévisible et convenu. C’est bien lorsque les personnages et la musique (pourtant formidable, d’Ennio Morricone) se taisent que l’essence du film apparaît le mieux : les tourments des sentiments au milieu d’une terre agricole progressivement mise à nue jusqu’au défrichage complet, dans les larmes, le feu et le sang, ou comment mettre en parallèle la tension dramatique avec le décor sans autre effet de manche que celui du peintre imprimant sa toile de maître sur pellicule.

Toni Erdmann
7

Toni Erdmann (2016)

2 h 42 min. Sortie : 17 août 2016 (France). Comédie dramatique

Film de Maren Ade

Marius Jouanny a mis 7/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

8 septembre. Voir critique.

En quatrième vitesse
7.4

En quatrième vitesse (1955)

Kiss Me Deadly

1 h 46 min. Sortie : 9 septembre 1955 (France). Film noir

Film de Robert Aldrich

Marius Jouanny a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

12 septembre.

« En quatrième vitesse » est sûrement le cas d’école absolu du film noir tellement il s’efforce d’en suivre chacune des règles à la lettre. Le privé impliqué dans une histoire qui le dépasse et remplie de cadavres dans le placards, qui s’accumulent d’ailleurs durant le film, tandis que progresse l’enquête et sa foule de témoins, rendant la tension entre opacité et clairvoyance palpable. Aldrich nous sert ici un cas typique d’enquête policière bien menée, aux personnages attachants, et surtout avec un rythme au cordeau qui ne faiblit jamais, tant par un travail de montage, de cadrages (gros plans, travelling audacieux) qui rend le tout soigné, un grand spectacle de cinéma.

C’est dans le dépassement de son exercice de style, certes fameux, mais sans originalité dans le fond, que le réalisateur peine à convaincre. Certes, il joue bien avec les codes, mais l’empathie manque quelque peu, le détective en question voyant les filles défiler dans ses bras sans sourciller, et n’ayant aucun problème à envoyer sa petite amie draguer des mecs mariés pour ensuite les faire chanter. C’est finalement dans son dénouement que « Kiss Me Deadly » étonne le plus, trouvant une aura mystérieuse pour le moins étonnante. Les intentions de proposer une réflexion sur le genre lui-même sont alors complètement validée : comment opérer une distance subtile et marquante sinon en revêtant le classique MacGuffin d’effets étranges et inexplicables, laissant le spectateur bouche bée ?

Nocturama
6.2

Nocturama (2016)

2 h 10 min. Sortie : 31 août 2016. Drame, Policier

Film de Bertrand Bonello

Marius Jouanny a mis 8/10 et a écrit une critique.

Annotation :

14 septembre. Voir critique.

Easy Rider
7.2

Easy Rider (1969)

1 h 35 min. Sortie : 27 juin 1969 (France). Road movie

Film de Dennis Hopper

Marius Jouanny a mis 6/10.

Annotation :

15 septembre.

« Easy Rider » pourrait au même titre que le documentaire « Woodstock » et au vu de son année de sortie (1969) s’ériger facilement en manifeste cinématographique du mouvement hippie. Décrivant le road-trip de deux motards libres comme l’air, en Harley Davidson cela va sans dire, le film déroule tout l’esprit hippie sous nos yeux : la bande-son psyché et folk à souhait (dont « If 6 was 9 » de Jimmy Hendrix constitue l’apogée) la célébration de la nature (ici, les déserts américains, style route 66) la volonté de liberté inconditionnelle et délivrée des entraves du travail… Sans oublier la drogue et le sexe, bien entendu, réunis ici dans une scène épileptique que ne renierai pas les cinéastes de la « beat generation » mais qui a clairement mal vieillie.

Le film est en effet loin d’être exempt de limites : sa narration comme sa mise en scène trop systématiques pour ne pas lasser, à grand renfort de scènes de course effrénées sur du rock, ponctuées par des escales au coin du feu ou dans des endroits civilisés ou les personnages sont forcément rejetés par les ploucs du coin. Certes les motifs répétitifs sont parfois renouvelés par de nouveaux éléments comme ce village de jeunes hippies vivant en autarcie. Mais cela ne suffit pas à laisser cette impression de perfectible et nous rappelle que le réalisateur Dennis Hopper était avant tout un acteur. La fin désillusionnée conclue le film sur une bonne note, plus dramatique mais elle aurait eu bien plus d’impact si l’empathie pour notre duo de biker avait été mieux développée, et si l’opposition sociale du film avait été un peu plus subtile.

Macadam Cowboy
7.6

Macadam Cowboy (1969)

Midnight Cowboy

1 h 53 min. Sortie : 15 octobre 1969 (France). Drame

Film de John Schlesinger

Marius Jouanny a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

16 septembre.

La simplicité qui se dégage de ce « Macadam Cowboy » en fait un film instantanément sincère et touchant : un jeune cow-boy au lourd passé se rend à New-York pour refaire sa vie et (pourquoi pas, après tout) devenir gigolo des bourgeoises de la haute. Ses déboires professionnels l’amènent à se lier avec un Dustin Hoffman au sommet en éclopé maladif et désespéré. Tout le charme des débuts du Nouvel Hollywood est bien là : des personnages en marge, une bande-son formidable aux airs d’harmonica, un portrait lucide de la société underground new-yorkaise… Certes, le film n’atteint pas des sommets dramatique en dehors de sa conclusion (quoiqu’un peu prévisible) mais cette histoire d’amitié parvient à modeler un certain fond : la croissance urbaine oppressante et dévastatrice, la misère sociale ignorée, et surtout ce panel d’individus sur le fil du rasoir, tous plus seuls les uns que les autres, tous près à sombrer dans une fiévreuse démence à la moindre occasion. Dans la forme, certains passages expérimentaux ont un peu perdus de leur intérêt avec les années, mais d’autres procédés gardent toujours de leur impact. Voilà un cinéma américain intimiste qui mérite d’être revu, en tout cas.

L'Aurore
8.3

L'Aurore (1927)

Sunrise: A Song of Two Humans

1 h 34 min. Sortie : 11 octobre 1928 (France). Drame, Romance, Muet

Film de Friedrich Wilhelm Murnau

Marius Jouanny a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

17 septembre.

Malgré des débuts quelques peu hésitants, ce film accomplit un véritable tour de force de simplicité. Son postulat moraliste quelque peu rance (un mari volage se repend) est en effet transcendé par la force émotionnelle brute de l’œuvre. Murnau surprend en filmant la séparation puis le ralliement des cœurs avec une candeur qui touche la grâce. On a affaire ici à une renaissance pure et admirable, où la caméra, au détour de quelques cabrioles et longs plans, capte les expressions des personnages, leurs tourments et leurs passions avec un certain génie. Certes, le couple déchiré par le désamour du mari pour sa femme, et son désir de renouveau personnifié par une autre femme reste à l’état d’archétype. Mais la fable n’en est que plus universelle, d’autant plus qu’elle emploie intelligemment ses symboles, comme ce fagot de bois passant d’artefact du crime à bouée de sauvetage. Il n’y a finalement que certaines longueurs, notamment lorsque le personnage féminin est épouvanté par son mari, le fuyant incessamment, pour entacher quelque peu ce somptueux tableau. L’essence de l’idéal amoureux charme tellement d’autre part qu’on succombe malgré tout à « L’Aurore ».

Black Book
7.4

Black Book (2006)

Zwartboek

2 h 25 min. Sortie : 29 novembre 2006 (France). Drame, Guerre

Film de Paul Verhoeven

Marius Jouanny a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

19 septembre.

Paul Verhoeven me comble de définitivement de plaisir à chacun de ses films. Et ce n’est pas seulement parce qu’il met toujours bien en valeur ses personnages féminins, aussi bien dans l’écriture que dans le choix du casting, affirmant un féminisme éclatant. C’est aussi et surtout car il procède en prenant imperturbablement les attentes et les habitudes du spectateur à contrepied : ce « Black Book » en est un brillant exemple. Au premier abord, on se demande en effet comment le réalisateur arrivera à inscrire sa patte dans une sempiternelle histoire de résistants pendant la Seconde Guerre Mondiale, tirée d’une anecdote réelle qui plus est. Le soin porté dans la forme est déjà très agréable, aux détours de quelques plans très bien éclairés, d’une reconstitution historique aux petits oignons et d’un rythme qui ne faiblit jamais en 2H30. Mais le Verhoeven, c’est toujours dans le fond que je l’attends le plus, et dieu sait que je n’ai pas été déçu ici.

Sa vision de l’époque est en effet fascinante : non seulement il s’autorise toutes les incartades sulfureuses et castre tout idéalisme héroïque et mettant plus d’un bâton dans les roues de sa chère juive résistante et de son réseau mis à mal par les nazis, mais il propose un regard nuancé d’une lucidité parfaitement aiguisée sur la Libération. Tous les codes du film de guerre sont ici brisés : la caméra impudique s’attarde sur la nudité des personnages, et les morts comme les trahisons s’enchaînent dans une atmosphère de fin de règne sanglante qui remet beaucoup en doute l’efficacité et la légitimité même de la lutte résistante. Quant au portrait qui est fait du camp des libérateurs de l’Europe, tondant les femmes ayant couchées avec des nazis quand ils ne leur déversent pas des seaux d’excréments à la figure, fusillant les innocents par pur respect de procédure, tandis que les rats tentent de quitter tant bien que mal le navire, c’est d’une accablante omniscience. Prise entre deux feux, notre héroïne ne voit pas le bout de ses peines, jusqu’à un ultime plan terrible nous rappelant qu’une autre guerre (parmi d’autres) débuta sur les cendres de 39-45 : le conflit israélo-palestinien, toujours d’une actualité brûlante.

Laurence Anyways
7.6

Laurence Anyways (2012)

2 h 48 min. Sortie : 18 juillet 2012 (France). Drame, Romance

Film de Xavier Dolan

Marius Jouanny a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

20 septembre.

On tient certainement là le film de la maturité de Dolan, qui annonce le sommet que sera « Mommy » deux ans plus tard. Sa maîtrise formelle est déjà de rigueur dans « Laurence Anyways », la recette Dolan ou comment faire d’un spectacle bariolé, toujours à la limite du vulgaire, du prétentieux, du surstylisé, un voyage sublime, une balade enchanteresse. Ces ralentis à foisons, ces visages, vêtements (que le réalisateur a travaillé lui-même) décors peaufinés dans les moindres détails, scènes métaphoriques réunissant tout cela à la fois, c’est un cinéma qui se conjugue avec un désordre d’où s’écoule une liqueur magique. Evidemment, cette liqueur peut parfois provoquer un écœurement, à divers degrés, voir un rejet à bloc de cette forme si particulière et qui ressemble paradoxalement souvent à des clips de pop.

Mais le cinéma de Nolan trouve tout de même une assise à peu près stable dans l’écriture de ses dialogues et dans l’interprétation de ses acteurs (quand ce n’est pas lui qui joue, je le trouve moins talentueux devant la caméra) qui désamorcent tous les arguments des détracteurs du cinéaste. Il y a une énergie vitale dans chacun des mots, chacune des expressions, des regards, que la mise en scène met tellement bien en valeur… A couper le souffle. Evidemment, tout ce dispositif raconte peu ou prou toujours la même chose (relations familiales/de couple conflictuelles et passionnées, sexualité hors-norme et cherchant à s’affirmer) mais le réalisateur arrive suffisamment à se renouveler pour légitimer sa démarche. Et parvenir à me captiver pendant trois heures sans trop d’accroc, aussi.

Le Péril jeune
6.9

Le Péril jeune (1994)

1 h 41 min. Sortie : 21 mai 1994. Comédie dramatique

Téléfilm de Cédric Klapisch

Marius Jouanny a mis 6/10.

Annotation :

25 septembre.

Je crois qu’on atteint avec « Le Péril jeune » un paroxysme du film générationnel. Un groupe d’amis se réunissant des années après leurs années lycées pour se remémorer cette fameuse année de terminale, il est l’heure ici de porter un regard doux-amer sur cette période bénite de l’insouciante jeunesse. Sur fond sonore des Pink Floyd et de Jimi Hendrix, les cinq potes pratiquent l’école buissonnière, le militantisme joyeux, la drogue et la drague avec une désinvolture contrastant à souhait avec l’époque branlante des chocs pétroliers. L’écriture est malicieuse, légère, enveloppe le film d’une nostalgie réconfortante et parvient à un degré d’intimité qui fait résonner certaines scènes du film même dans l’esprit d’un type d’une toute autre génération comme la mienne.

Certes, la forme se veut peu audacieuse même lorsqu’elle tente des effets (la scène sous acide, finalement très classique) mais l’essentiel est bien là : capter l’esprit d’une génération, et de la jeunesse au sens large, qui parle tout le temps de politique tout en ne se préoccupant finalement que d’en foutre le moins possible, sans oublier le flirt, bien évidemment peu fructueux pour la plupart d’entre eux. Entre souvenirs et triste réalité, « Le péril jeune » trouve un équilibre sous forme de porte-étendards. Et puis, quelle plaisir de voir Romain Duris, la même gueule atypique même aussi jeune.

RoboCop
7.2

RoboCop (1987)

1 h 42 min. Sortie : 20 janvier 1988 (France). Action, Policier, Science-fiction

Film de Paul Verhoeven

Marius Jouanny a mis 8/10.

Annotation :

25 septembre.

Pour son premier film américain, Paul Verhoeven propose un blockbuster de science-fiction on ne peut plus hors-norme. Véritable critique de la politique sécuritaire des Etats-Unis, il grossit les traits de la société de son époque (crimes à tous les étages dans le futur de la ville de Detroit, policiers en sous-effectifs tombant comme des mouches) pour mieux y poser son regard cynique et néanmoins amusé. Le remède trouvé par un grand groupe industriel à cette criminalité est ni plus ni moins qu’un policier cyborg, dont les blessures mortelles sont colmatées par des prothèses renforcées et la mémoire modifiée pour obéir au doigt et à l’œil. L’agent derrière le masque de fer va évidemment être confronté à des réminiscences de son passé, et l’humanité resurgit peu à peu d’un édifice capitaliste parfait, c’est-à-dire purement utilitaire et d’une efficacité à faire bander les grosses pointures dans leur tour d’ivoire…

Si le réalisateur ne déploie par un univers aussi riche, exaltant et démesuré que dans « Total Recall », son propos anti-sytème y est bien plus incisif. C’est finalement avec « Starship Troopers » que Paul trouvera une synthèse entre ces deux tendances, mais en perdant une empathie pour les personnages ici bien présente. Certes, le personnage féminin du film est en deçà des formidables portraits de femmes qu’à l’habitude de nous brosser Verhoeven. Mais sa démarche est tout de même salvatrice : film d’action très bien réalisé, gore à souhait, il ne manque plus que la dimension érotique du cinéma de Verhoeven pour parachever une vision hollywoodienne entièrement personnelle. Et malgré un dernier acte un peu trop brusque, la conclusion du film où l’illusion existentielle de notre agent de métal détourne n’importe quel « happy end », est brillante.

Showgirls
6.2

Showgirls (1995)

2 h 11 min. Sortie : 10 janvier 1996 (France). Comédie dramatique

Film de Paul Verhoeven

Marius Jouanny a mis 7/10.

Annotation :

29 septembre.

Le voilà, le mal-aimé de Verhoeven, qui éclaboussa la bien-pensance des critiques français en 1995. 21 ans plus tard, « Showgirls » s’offre une ressortie en copie restauré, de quoi réhabiliter un segment de la filmographie du réalisateur loin d’être oubliable. Je ne comprends d’ailleurs pas que les fans habituels du réal fassent la fine bouche avec ce film tellement sa cohérence procure un vrai plaisir de cinéphile. Les uns dénoncent une superficialité et des personnages vides alors même que le sujet du film, l’industrie du divertissement érotique à Las Vegas, ne peut qu’amener à de telles limites. Dans ce décors de kitch absolu aux couleurs agressives et aux poses vulgaires (et dénudées, est-il besoin de le préciser ?) Verhoeven introduit même une femme haute en couleur qui part à la conquête d’un monde qui lui ressemble trop peu. Certes, ce que l’intrigue nous réserve n’a rien de bien surprenant, malgré quelques contrepieds bien troussés comme celui de cette star du rock abusant de l’aura qu’il génère pour… violer ses fans trop contentes de passer la soirée avec lui.

Du côté de la réalisation, cette effusion de couleurs et de sexe jusqu’à piquer les yeux est détournée par un rythme au cordeau, notamment pour les scènes de chorégraphie, où la virtuosité est précisément de rendre émoustillant et gracieux ce qui a priori ne l’est aucunement. La critique de ce monde de l’entairtainment est, je le conviens, moins cinglante que dans les autres films du réalisateur. Mais ce qu’il perd en ferveur satirique, Paul le gagne toujours en empathie, et j’apprécie bien celle qu’il porte pour son personnage principal. Le chaland venant se rincer l’œil comme le spectateur plus avisé pourront donc y trouver leur compte, par un bel équilibre entre l’esthétisme et la consistance de l’écriture, qui se révèle tout de même un poil en dessous que d’habitude. Pas de quoi crier au navet, en tous les cas.

La Reine Margot
6.8

La Reine Margot (1994)

2 h 39 min. Sortie : 13 mai 1994. Biopic, Drame, Historique

Film de Patrice Chéreau

Marius Jouanny a mis 6/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

4 octobre.

Cette adaptation du roman d’Alexandre Dumas par Patrice Chéreau se démarque sur certains points, et déçoit sur d’autres. Il faut d’abord bien avouer que le film est visuellement très abouti, et pas seulement au niveau de la reconstitution historique très crédible. Les lumières, le rythme, la caméra mobile, le film est formellement remarquable, et parvient à s’émanciper du postulat « théâtre filmé » pour la plupart des scènes. Les différents portraits historiques qu’il brosse, de Catherine de Médicis à Charles IX, en passant bien évidemment par la Reine Margot interprétée par la fantastique Isabelle Adjiani, sont globalement pertinents et n’ont pas trop à rougir du traitement de Dumas, qui rentre évidemment plus en profondeur. Il n’empêche, par d’astucieux raccourcis narratifs, Chéreau condense plus de 700 pages en 2h30 avec brio.

Seulement, les défauts inhérents au cinéma français sont aussi au rendez-vous, et c’est bien là où le bât blesse. L’écriture tout d’abord est parfois inégale, toute la fluidité des dialogues de Dumas prend un peu de lourdeur à l’écran. Le film est surtout très pompeux dans sa dramaturgie, laissant peu les deux personnages principaux (La Mole et Conconnas) s’exprimer au profit des grandes figures historiques. Son premier degré ne fonctionne pas toujours car en rejetant le romantisme de Dumas pour valoriser une réalité plus crue et matérielle (confirmant ma théorie comme quoi il y aurait toujours trop de fesse et pas assez de tendresse dans le cinéma français) le film ne réussit pas à déployer sa dimension lyrique, qui reste à l’état d’embryon dans pourtant quelques très belles séquences, où Adjiani rayonne. Et puis, Daniel Auteuil cabotine lamentablement en campant Henri de Navarre futur roi Henri IV, retirant la sève de nombreux moments forts, avec notamment quelques traits d’humour plutôt vulgaire à mille lieux de l’élégance burlesque de Dumas.

Juste la fin du monde
6.6

Juste la fin du monde (2016)

1 h 35 min. Sortie : 21 septembre 2016. Drame

Film de Xavier Dolan

Marius Jouanny a mis 4/10.

Annotation :

6 octobre.

Finalement, je ne finirais pas ma critique du film, je manque d'inspiration, comme Dolan.

Scarface
7.6

Scarface (1932)

1 h 33 min. Sortie : 17 février 1933 (France). Gangster

Film de Howard Hawks et Richard Rosson

Marius Jouanny a mis 7/10.

Annotation :

10 octobre.

Au-delà de sa figure de classique du cinéma de gangster (quoique la version de De Palma est au moins aussi culte) des décennies avant que Coppola, Scorsese ou bien Leone ne pondent leurs chefs-d’œuvre du genre, ce « Scarface » de Hawks est principalement intéressant pour son mélange de registres et sa mise en scène. Parce qu’il faut bien le dire, l’écriture ne se dépêtre jamais vraiment de son classicisme, à part peut-être dans la scène finale, où notre anti-héros inspiré de Al Capone vit ses dernières minutes. C’est à ce moment-là que la relation avec sa sœur prend un peu de piquant, et par-là même ajoute une consistance romantique au film qui bouscule un peu sa bien-pensance. Parce que franchement, je ne vois aucune ambiguïté dans la relation entre Corleone et son bras droit, ou trop peu, que certains cinéphiles ont pourtant tôt fait de qualifier de crypto-gay.

Non, c’est surtout par cette émulsion entre le film d’action et la comédie qu’Hawks brille le plus. Il désamorce le pompeux à grand renfort de dérision, notamment incarné par le très pittoresque secrétaire de notre gangster. Faire de l’ascension de Corleone un jeu permet une dynamique rythmique étonnante : jusqu’à son faux-pas final, le personnage ne rencontre aucune difficulté majeure, échappant audacieusement à toutes les tentatives d’assassinats des uns et des autres, déclarant la guerre sans complexe au grand concurrent des quartiers nord. La scène où il découvre les délices de la mitraillette à camembert est dans cette optique délectable. Puis, il y a cette caméra et ce montage d’une efficacité conférant une vigueur au film qui n’a de ce fait pas vieilli dans la forme en plus de 70 ans (alors que dans le fond, sa simplicité le dessert quelque peu).

Boy Meets Girl
6.8

Boy Meets Girl (1984)

1 h 40 min. Sortie : 21 novembre 1984 (France). Drame, Romance

Film de Leos Carax

Marius Jouanny a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

13 octobre.

Il y a dans « Boy meets girl » toute la chaleur attrayante et doucement chaotique des cinéastes débutants : Leos Carax y glisse déjà pêle-mêle une bonne partie de ses obsessions, matérialisant un premier film à cœur ouvert. Il y a certes dans l’écriture des dialogues, dans le ton des acteurs quelques motifs typiques du cinéma d’auteur français basé sur l’émotion amoureuse. Les images fugitives et nocturnes de Paris, avec de très beaux mouvements de caméra et un montage au diapason particulièrement inventif, ne trouvent par ailleurs de comparaisons nulle part ailleurs. La forme est alors tendre et tordue, étirant les scènes parfois un peu trop, bien que cela soit contrebalancé par une artificialité salvatrice source de poésie et de moments suspendus dans le temps.

D’autre part, ces longueurs induisent des thématiques cohérentes et profondément intimistes : l’amour est abordé par la lorgnette de la solitude, dans un ballet statique ponctué de brusques mouvements, comme de grandes respirations. Il faut dire que tout, au second comme au premier plan narratif n’est que ruptures sentimentales, dans la jalousie, les regrets et les pleurs. Dans la tourmente, le langage n’est d’aucun secours aux personnages : Carax développe aussi l’impuissance de l’expression quand elle est trop viscérale pour être amenée par des mots. Chacun restant seul autant par malentendu que par désamour, plus par coup de tête que par pragmatisme, il n’y a que deux issues : enlacer ou mourir, ou les deux, dans une splendide image finale. Carax se cherche peut-être encore avec ce premier long-métrage, pour mieux marquer (et c’est un doux euphémisme) dans son film suivant « Mauvais Sang », mais les bases de son cinéma sont déjà posée, irrésistiblement attachante à l’image de la trogne impossible de Denis Lavant, qui répondra présent dans tous les films suivants du réalisateur.

Mauvais sang
7.4

Mauvais sang (1986)

1 h 56 min. Sortie : 26 novembre 1986. Policier, Drame, Thriller

Film de Leos Carax

Marius Jouanny a mis 9/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

15 octobre.

Rétrospectivement, « Mauvais Sang » est un des sommets lyriques du cinéma français parmi les plus sincères et hors-normes. Deuxième film de Carax, il a déjà tout du métrage indomptable et indétrônable, passant chacun de ses éléments narratifs et visuels au fil d’un imaginaire débridé et imprévisible. Bourré de fausses pistes, le film ressemble au premier abord à un polar avec comme toile de fond une vision fantasmée de Paris où les immeubles comme les rues paraissent provenir d’un autre monde. Pour parachever cet univers romantique où les fruits tombent de nulle part et les corps s’enlacent dans un sublime saut en parachute, Carax y ajoute même une épée de Damoclès atypique : les rumeurs d’une maladie touchant les personnes faisant l’amour sans s’aimer…

Mais tout cela est finalement bien secondaire, et le réalisateur prend les attentes du spectateur à contrepied, en faisant durer à l’envi une nuit où les chaînes d’un amour contrarié et impossible vont sceller le cœur de Denis Lavant, toujours le regard perçant et l’élégance marquée par une énergie vitale quasi-érotique et en tous les cas éreintante. Sa puissance émotive, il la consume par une succession de fuites en avant dont l’une d’entre elle, rythmée par « Modern Love » de Bowie, tient carrément du génie. Il faut dire qu’avec Juliette Binoche, sa tête a de quoi tourner, et ses tripes ne faire qu’un tour, bétonnés qu’ils sont d’une solitude qui ne l’a pas quittée depuis son séjour en taule. Ebouriffant et inventif à chaque plan, le cinéma de Carax ne néglige ici ni le rythme, ni la dramaturgie et encore moins la mise en scène, qui dans les derniers moments du film accompagne la tragédie avec une pudeur foudroyante.

Moi, un noir
7.1

Moi, un noir (1959)

1 h 10 min. Sortie : 11 mars 1959. Drame

Film de Jean Rouch

Marius Jouanny a mis 7/10.

Annotation :

16 octobre.

C’est paradoxalement en brouillant les frontières entre fiction et réalité que le documentariste Jean Rouch rend son film ethnographique sur la vie de deux jeunes africains à Abidjan dans les années 50 plus réel et vibrant. Ainsi il met en scène ces deux destins typiques du mode de vie en bidonville avec la collaboration des deux sujets d’étude en question. Improvisant une trame narrative commentée par les deux jeunes hommes, le cinéaste et ses deux acteurs/témoins décrivent jour par jour une semaine dans la peau d’un pauvre à Abidjan: chargement des sacs de café sur des bateaux à longueurs de journées, et week-end de repos marqués par la solitude et l’incapacité de s’intégrer socialement. Filmer tout cela de manière scénarisé par les deux jeunes racontant indirectement leurs propres vies est d’une astuce remarquable car cela permet d’une part un regard distancié et aucunement intrusif, et d’autre part une empathie indéniable pour ces deux jeunes en mal d’amour, en mal de confort et de stabilité financière, bref en mal de vie. D’autant plus que le montage est bien rythmé, concis et les cadrages d’une grande précision : il n’en faut pas moins pour plonger dans la réalité ce documentaire qui joue tout aussi bien avec l’ambivalence de son langage.

Assurance sur la mort
7.9

Assurance sur la mort (1944)

Double Indemnity

1 h 47 min. Sortie : 31 juillet 1946 (France). Film noir

Film de Billy Wilder

Marius Jouanny a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

17 octobre.

Billy Wilder prouve encore avec « Assurance sur la mort » qu’il fut l’un des cinéastes américains les plus talentueux et en phase avec le cinéma comme la société américaine de son époque. Non seulement aucun registre ni aucun genre ne l’arrête (la comédie, le film d’évasion, la parodie, la romance, le drame acerbe) mais il mêle ces différents ingrédients avec une virtuosité d’écriture jouissive tellement elle est fignolée dans les moindres détails. Ici, on a encore affaire à l’archétype du film noir, que Wilder reprendra entre autre dans « Boulevard du Crépuscule » : le trentenaire célibataire (ici représentant en assurance) en proie au doute lorsque lui vient une occasion inespérée de s’émanciper de son statut social. Notre anti-héros se voit donc embarqué de son plein gré dans une arnaque à l’assurance des plus classiques, consistant à assassiner un mari peu aimant pour que sa femme récupère l’oseille et que notre assureur récupère l’oseille et la femme.

Sauf que voilà, le suspense est désamorcé dès l’introduction, « I didn’t get the money, and I didn’t get the woman ». Car évidemment, puisque tout n’est qu’affaire de calculs, de faux semblants castrant toutes passions naissantes, l’issue est incertaine. Les nombreux personnages secondaires ont tous un rôle marquants, dont le meilleur exemple est sûrement le collègue de notre assureur aux mimiques irrésistibles, pointilleux jusqu’à l’obsession sur chaque affaire, d’autant plus lorsqu’il s’agit d’un aussi étrange accident. Le rythme est simplement parfait, conserve un lot de surprises jusque dans les dernières minutes, et à ceux qui diraient que Wilder n’a pas d’esbroufe particulière de mise en scène, je répondrais qu’il faut bien du génie pour mettre aussi efficacement et viscéralement en image un script aussi élaboré. En sondant la névrose et l’immoralité se cachant derrière chaque individu lambda, Wilder dresse un portrait toujours plus cinglant de la société américaine, sans oublier de jouer avec les codes narratifs (ici, ceux du film noir) pour en tirer toute la profondeur tragi-comique.

Guet-apens
7.5

Guet-apens (1972)

The Getaway

2 h 03 min. Sortie : 25 janvier 1973 (France). Action, Policier, Thriller

Film de Sam Peckinpah

Marius Jouanny a mis 8/10.

Annotation :

18 octobre.

Sensation bizarre après quelques minutes de film : je pensais ne pas avoir déjà vu le film, et me le remémorer durant la séance était quelque peu étrange. Du coup, j’ai pas grand-chose à en dire si ce n’est que Steve est plus que jamais dans mon trop 3 des acteurs les plus charismatiques du cinéma américain, que la démarche de Peckinpah paraît souvent un peu trop formaliste. Mais alors, quelle forme ! Rien que le générique de début est un monument de montage visuel et sonore. Et pis, les problèmes de couple distillés au milieu du marasme de course-poursuite et d’action burnées donnent une belle consistance au film, qui se paye un happy-end un peu convenu mais appréciable pour un glas que j’aurais cru inévitable. Finalement, un peu comme « Bullitt », « Guet-Apens » est un sommet de cinéma d’action classique, aux compositions musicales absolument formidables, et aux rythmes endiablés, qui font oublier un manichéisme peu remuant.

Comancheria
7.1

Comancheria (2016)

Hell or High Water

1 h 42 min. Sortie : 7 septembre 2016 (France). Policier, Drame, Western

Film de David Mackenzie

Marius Jouanny a mis 7/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

24 octobre. Voir critique.

Freaks - La Monstrueuse Parade
8

Freaks - La Monstrueuse Parade (1932)

Freaks

1 h 04 min. Sortie : 7 octobre 1932 (France). Drame, Thriller

Film de Tod Browning

Marius Jouanny a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

4 novembre.

« Freaks », c’est d’abord une frustration pour tout cinéphile le regardant pour la première fois, celle d’imaginer la demi-heure du film coupée au montage, car contenant des scènes soi-disant trop crues et choquantes, tandis qu’un prologue et un épilogue ont été rajoutés pour ficeler le tout de manière plus consensuelle (fichu système hollywoodien, qui n’accepterai d’ailleurs pas une scène de ce film aujourd’hui). Passé ce postulat, le choc n’en est pas moins grand : l’étrange mascarade que suit le film, les monstres d’une troupe de cirque aux gueules déformées, aux membres manquants ou aux tailles hors-normes, marquent durablement par leur ambivalence. Tod Browning promène sa caméra comme s’il flânait dans les coulisses du cirque, à la manière d’un documentariste, pour mieux capter et lier peu à peu les affects qui emplissent le récit.

Puis, ce microcosme sublimement attachant prend une tournure passionnelle où transparaît l’ambiguïté de chaque personnage sans exception : les rebuts se bercent d’illusions pour mieux montrer les dents, tandis que les « normaux » jouent un jeu pervers où la domination se ressent viscéralement à chaque seconde. Le dernier acte est alors prodigieux de démesure filmique, où les corps rampent dans la boue et les mains font luire les lames. Cette fièvre confère donc un paroxysme à un film qui se veut parfois quelque peu convenu dans ses sous-intrigues et ses effets d’humour toujours efficaces mais pas toujours indispensables. Par-dessus-tout, la mise en scène de Browning, le mouvement du récit n’ont pas vieillis d’un iota, plus de 80 ans après la sortie du film. La sincérité du cinéaste qui décrit un milieu qu’il connaît intimement, portant un regard empathique mais surtout lucide et complexe sur l’altérité, n’en est que plus brillante. A ranger plus aux côtés de « Elephant Man » que des classiques films de monstres de l’époque, au fait.

Les Choses de la vie
7.3

Les Choses de la vie (1970)

1 h 29 min. Sortie : 13 mars 1970. Drame, Romance

Film de Claude Sautet

Marius Jouanny a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

6 novembre.

Film français par excellence, « Les choses de la vie » ne vaut pas seulement le détour pour son fabuleux duo Michel Piccoli/Romy Schneider. Claude Sautet est en effet loin de faire du cinéma d’acteurs : en insufflant un lancinant parfum nostalgique à son récit, parsemé de flash-back subtils et furtivement élégants accompagnés par une remarquable partition de Philippe Sarde, il matérialise avec grâce le poids du passé sur les épaules de Piccoli. Surtout, la construction du métrage s’appuie sur un contraste brillant, entre ces moments suspendus et l’immédiateté violente et déchirante d’un accident de voiture annoncé dès le début. Certes, la dernière partie traîne un peu en longueur, laissant peiner un suspens et un pathos quelque peu artificiels. Néanmoins la tension conjugale entre Michel et Romy est au diapason, opposant deux visions de l’amour consistantes et à forte résonnance, tandis que la forme est souvent d’une beauté émoustillante.

Dead Slow Ahead
6.7

Dead Slow Ahead (2015)

1 h 14 min. Sortie : 5 octobre 2016 (France).

Documentaire de Mauro Herce

Marius Jouanny a mis 7/10 et a écrit une critique.

Annotation :

7 novembre. Vu au cinéma.

Voir critique.

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