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7 livres

créee il y a environ 1 an · modifiée il y a 4 mois

L'Art de perdre
8.2

L'Art de perdre (2017)

Sortie : 16 août 2017. Roman

livre de Alice Zeniter

Fwankifaël a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

20 décembre
7,5/10

A croire que je suis dans une année thématique. Car après le faux duo SF "La zone du dehors" et "Chien 51", j'embraye avec un vrai duo Histoire de la décolonisation algérienne avec "Ce que le jour doit à la nuit" et donc "L'Art de perdre". La renommée de ce roman n'est pas usurpée. Alice Zeniter y déploie avec autant de conviction intime que de recherches un récit choral et générationnel sur le rapport au pays fui.

Le premier arc sur l'histoire d'Ali, aïeul kabyle ayant fui l'Algérie en 1962, est le plus saisissant. Il éclaire pour le profane ce que fut, sous une autre facette que celles explorées par Yasmina Khadra, la vie au pays avant "les Evènements". Il scrute aussi l'insondable frontière entre belligérants et la complexité de distinguer, en temps de guerre, les ennemis des siens, les bons des mauvais.

Les deux arcs suivants explorent la blessure du déracinement avec toujours beaucoup de justesse et, on le sent, beaucoup de véracité puisque l'autrice y exploite son propre récit familial. C'est aussi dans ces moments de vérité qu'elle trébuche parfois, en attribuant à sa personnage Naïma des réflexions impromptues qui sont celles de son autrice mais semblent flotter au-dessus du reste du récit.

Dans l'ensemble toutefois, "l'Art de perdre" est un roman essentiel à la compréhension de l'état d'esprit des personnes issues de l'immigration, déjà si justement esquissé par d'autres que Zeniter avant et après elle : Rocé, Zeina Abirached, Marjane Satrapi, Riad Sattouf, Nina Bouraoui, Karine Tuil... Il est des pages qu'on ne tourne pas, même après trois générations. Dans sa résilience, l'humain transporte avec lui ses amputations et il lègue sa résistance autant que ses blessures, qu'on ne sait souvent plus soigner car pour en faire le deuil, il les tait et les dissimule en espérant les voir disparaitre. Destin tragique des déracinés, force de ce livre.

Chien 51
6.9

Chien 51 (2022)

Sortie : 2022 (France). Roman, Science-fiction

livre de Laurent Gaudé

Fwankifaël a mis 4/10.

Annotation :

31 octobre

Je ne l'avais pas anticipé, mais mon roman suivant se revendique également de la SF française. Laurent Gaudé est un auteur qui m'a plu (avec le superbe "Ouragan") et auquel je suis resté fidèle mais je dois convenir que parmi les trois derniers livres de lui que j'ai lu, peu m'ont autant plu, loin s'en faut.

"Chien 51" est à cet égard une vraie déception. Gaudé y développe une enquête policière à plusieurs voix sur une trame de SF absolument quelconque et accessoire qui ne donne à voir qu'une ébauche de réflexion sur la prédation d'entreprises privées sur le fondement même des états : leur souveraineté. Le personnage principal est un archétype de flic torturé sans intérêt. Absolument passable.

La Zone du dehors
7.6

La Zone du dehors (2001)

Sortie : 2001 (France). Roman

livre de Alain Damasio

Fwankifaël a mis 6/10.

Annotation :

4 octobre

Après le véritable choc que fut "La Horde de Contrevent", il faut dire que j'avais carrément les foies d'ouvrir un autre roman de Damasio, qui plus est son premier, au risque terrible de la déception.

J'y ai retrouvé non sans déplaisir de nombreuses ébauches des réflexions développées avec plus de substance dans LHDC, au service d'un récit de guérilla intellectuelle et situationniste, puis beaucoup plus violente, dans un écrin SF assez réussi. Quelques très bonnes idées (comme le Clastre) servent de colonne vertébrale au monde inventé par Damasio. "La Zone du dehors" propose ainsi une intrigue assez chouette, avec un style d'écriture toujours épatant (quoique parfois un peu m'as-tu-vu, j'y reviendrai), qui sert explicitement d'expiation à un auteur qui assiste démuni à la droitisation du débat public français au tournant du XXIème siècle.

Alors évidemment, si l'intrigue et les personnages parviennent à tenir en haleine durant au moins 400 des 600 à 700 pages que compte le roman, ce n'est pas sans casser quelques œufs. Parmi eux : la réduction (quantitative et qualitative) encore plus dramatique que dans LHDC des personnages féminins. Un seul personnage, BDCHT, réduit à peau de chagrin et, dans les yeux de son amant de héros, qui ne vaut que pour ses seins et son cul. Très triste... Autre défaut, moins critiquable : en vingt ans le roman a déjà vieilli - le lot de la SF - phénomène illustré ici par le fait de ne pas avoir vu arriver l'intelligence artificielle qui remet en cause pas mal de principes imaginés par l'auteur. Enfin, j'ai trouvé que Damasio se servait trop souvent de son personnage principal (un prof de philo d'université) pour dérouler à bon compte de longues réflexions et concepts dont il est manifestement assez fier mais qui embourbent considérablement le récit et complexifient la lecture.

Si LZDD n'est donc pas aussi réussi, loin s'en faut, que La Horde de Contrevent, on voit que leur auteur a mis les années à travailler sur son second roman à profit pour améliorer grandement sa technique. Une œuvre de "jeunesse" assez intéressante malgré tout donc.

Il faudra repartir

Il faudra repartir

Sortie : 7 mars 2012 (France). Roman

livre de Nicolas Bouvier

Fwankifaël a mis 4/10 et a écrit une critique.

Annotation :

30 juillet

Tous les écrits ne valent pas la peine d'être publiés. C'est en somme le sous-texte de la préface de ce recueil de notes de voyage écrite par le biographe de Nicolas Bouvier qui nous propose de découvrir un Bouvier "écrivant" plutôt qu'un Bouvier "écrivain".

"Il faudra repartir" a quelques vertus. Celle de réintégrer l’œuvre de Bouvier dans son histoire personnelle à plus long cours. Celle de nous révéler en creux des éléments de la personnalité de l'auteur. Celle de nous rendre surtout bien plus appréciable son grand oeuvre, au regard de la piètre qualité littéraire de ses notes.

J'en retiens surtout que derrière les icônes (Bouvier en constitue bien une dans mon panthéon perso), l'humain déçoit souvent. Ses journaux de voyage retranscrivent un certain dédain des gens et des peuples que rien dans l'Usage du Monde, les Chroniques Japonaises ou le Poisson-Scorpion ne laissait présager. Pire, certaines de ses remarques ouvertement racistes illustrent que derrière l'atemporalité d'une œuvre, il y a un individu fermement ancré dans son époque (en l'occurrence, les années 1950 au Maghreb).

Si j'ai parfois retrouvé le verbe magique du Bouvier que j'aime et j'admire, j'ai donc globalement été déçu par ce corpus, sans intérêt littéraire, sans presque d'intérêt non-plus pour le lecteur-voyageur que je suis (sauf le voyage en Indonésie) et brisant un peu (mais il le fallait) l'image que je me faisais de l'auteur.

Ce que le jour doit à la nuit
7.5

Ce que le jour doit à la nuit (2008)

Sortie : août 2008. Roman

livre de Yasmina Khadra

Fwankifaël a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

15 juillet

Je lis sans doute trop peu de romans ces derniers temps pour pouvoir affirmer que "Ce que le jour doit à la nuit" est le meilleur que j'ai lu depuis longtemps. Mais c'est bien le cas. En témoigne l'avidité avec laquelle j'ai avalé, en 48h, les 250 premières pages de ce roman.

Dès les premières pages, Yasmina Khadra - ou devrais-je dire Mohammed Moulessehoul - m'a conquis par son style et l'efficacité fleurie de sa prose. Il faut dire que le sujet (la traversée par un jeune arabe des dernières décennies de l'Algérie française) avait de quoi me tenir en haleine, dans ma curiosité à l'égard des blessures que la France a infligées à ses anciennes colonies et de la perception de notre histoire commune par les descendants des peuples occupés.

Au-delà du témoignage historique qu'il délivre, CQLJDALN est avant-tout le récit d'une jeunesse, avec ses amitiés indéfectibles, ses amours déçus et ses doutes ; un sujet banal dans la littérature, mais qui tire ici le meilleur de son contexte, de son écriture solaire et de l'équilibre avec lequel l'auteur traite son sujet. Est particulièrement bien restitué le dilemme de son héros, prisonnier d'une double appartenance qui l'engonce dans son être et le rend spectateur malheureux de sa propre vie. Cette clé de lecture, qui fait la richesse du récit, m'a aussi beaucoup attristé, parce qu'elle n'offre pas d'issue au destin qu'elle file.

Vols au crépuscule

Vols au crépuscule

Vesper Flights

Sortie : 8 avril 2021 (France). Journal & carnet

livre de Helen Macdonald

Fwankifaël a mis 9/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

3 juillet

A mi-chemin entre le journal, le récit autobiographique et l'essai, "Vols au crépuscule" est une œuvre superbe, d'une tendresse infinie à l'égard du vivant et écrit (et traduit) avec beaucoup de talent.

Les Années
7.8

Les Années (2008)

Sortie : février 2008. Roman

livre de Annie Ernaux

Fwankifaël a mis 7/10.

Annotation :

31 janvier

"Une vie", aurait pu être le titre de cette autobiographie, tant ce mot synthétise la permanence et l'éphémère, le temps et le travail à fournir pour la restituer.

Avec ce livre muri pendant des décennies, Ernaux accomplit à n'en pas douter un haut fait littéraire. Il y a dans l'énumération des choses, dans l’interprétation distanciée des pensées d'alors, dans la mise en récit des époques traversées, un coup de maître méthodique et puissant qui révèle, plus qu'un récit historique, "l'esprit du temps", l'âme d'une génération prise à la fois dans l'individualité du regard de l'héroïne et dans la généralité, voire la normalisation qu'aura imposé la modernisation consumériste engagée dans l'après-guerre.

Si j'ai trouvé le livre long, presque redondant sur sa fin, j'ai tout de même été marqué par l'acuité du portrait de la société dressé et, plus encore, par la proximité de nos références communes, moi qui suis né garçon petit bourgeois dans une grande ville au début des années 90. La franchise froide de l'autrice sur ses aventures stupéfait un peu pour la liberté de ton qu'elle témoigne, chez une femme que plus rien, au moment d'écrire son livre, ne semble plus cadenasser. Il y a finalement beaucoup à retirer, à apprendre, à comprendre, de la matière riche qui fait "Les Années", à la fois sur la société et sur soi.

Fwankifaël

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