Cover André Téchiné - Commentaires

André Téchiné - Commentaires

L’un des réalisateurs les plus essentiels et les plus précieux du cinéma français contemporain. Peintre sensible de personnages, grand portraitiste des époques, capable de capter les mouvements intimes des êtres comme l’évolution de la société, Téchiné pratique un cinéma intense, tour à tour serein ...

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17 films

créee il y a presque 12 ans · modifiée il y a plus d’un an

Souvenirs d'en France
5.5

Souvenirs d'en France (1975)

1 h 30 min. Sortie : 3 septembre 1975 (France). Comédie dramatique

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Téchiné ne manque pas d’ambition en développant cette chronique bourgeoise sur un laps de temps fort étendu qui englobe les grands évènements français du XXème siècle : le Front Populaire, la guerre, la résistance, la IVème et la Vème République, Mai 68… En lieu et place du réalisme ou de l’épaisseur romanesque, une série de déformations, d’excès, d’anachronismes, d’emphases fonctionnant comme un rappel à l’ordre du spectacle et non de la nature, selon un principe systématique d’ellipse et de métonymie. Mais par son excès d’intellectualisme qui consiste à ruiner le style qu’il prétend dresser contre l’ordre bourgeois, le cinéaste n’échappe pas à la confusion. Sa légèreté paraît arbitraire, donc lourde. Ses signes se dispersent, retournant à la gratuité. Et son film prometteur ne tient pas ses promesses.

Barocco
5.8

Barocco (1976)

1 h 50 min. Sortie : 8 décembre 1976. Drame, Policier

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Amsterdam, avec ses canaux glauques et ses devantures à néons, fournit un décor original à ce film noir qui respecte les mécanismes du genre et procède par atmosphère interposée. L’argument emprunte à Lang ou Hitchcock : un homme se vend à deux camps ennemis, il est assassiné et son tueur se révèle être son sosie. Le vertige s’accentue quand la compagne de la victime reporte son amour sur la copie de l’être aimé. Le vent, la pluie, les ténèbres humides de la nuit sont autant d’éléments qui assurent l’unité de ce cinéma distancié et expressionniste frisant la sophistication, de ce puzzle fascinatoire et quasi sternbergien où Téchiné multiplie les citations et tente de remplacer chez le spectateur le sentiment du déjà vécu par la sensation du déjà vu. Un exercice un peu opaque mais réussi.

Les Sœurs Brontë
5.9

Les Sœurs Brontë (1979)

1 h 55 min. Sortie : 9 mai 1979 (France). Drame

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Titre légèrement trompeur, puisque autant qu’à Charlotte, l’aînée rassurante, Emily, la garçonne tourmentée, et Anne, la cadette farouche, c’est à Branwell que s’intéresse le cinéaste, leur frère méconnu, torturé par une passion douloureuse, courant tel un fil rouge sur la lande aux cieux déchirés. Une lame de fond pourrait emporter ce film imparfait mais séduisant, dévoré par les destins pathétiques de ses personnages : Téchiné vise le romantisme incandescent qui embrase l’œuvre des Brontë, et si son évocation biographique ne l’atteint que par intermittences, on ne peut lui enlever une ardeur que les images de Nuytten, parfois à la lisière de l’affectation, expriment avec une force qui ne fait que croître en intensité. Jusqu’à une dernière partie où la mort emporte tout comme des dominos.

Hôtel des Amériques
6.5

Hôtel des Amériques (1981)

1 h 30 min. Sortie : 2 décembre 1981 (France). Drame, Romance

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Comme il ne cessera de le faire par la suite, le réalisateur s’efforce ici de montrer ce qu’il y a de plus mobile dans nos destins : la mémoire, le désir d’oublier, l’ambiguïté des lieux et des êtres. En liberté surveillée, ses personnages s’inventent une sorte de terrain vague mental, un paysage qui a la douceur d’une petite ville au bord de la mer, et improvisent une valse hésitation où la mélancolie gagne la partie. L’intrigue pourrait être tirée d’un roman de gare mais Téchiné en tire un drame passionnel aux éclats de romantisme fiévreux, et élabore autour du traumatisme amoureux et des fêlures intimes quelques belles variations, en s’appuyant comme à son habitude sur l’investissement de ses acteurs (Dewaere et Deneuve, intenses) pour charger son récit d’une humanité fébrile.

Rendez-vous
6

Rendez-vous (1985)

1 h 30 min. Sortie : 15 mai 1985 (France). Drame

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Une jeune provinciale, apprentie comédienne, découvre la capitale de ses rêves d’amour et de théâtre, se laisse guider par son instinct, naviguant à vue et en solitaire. Au fil des rencontres de hasard, elle croise un acteur déchu, rongé par un drame passé, qui s’acharne à la mettre à l’épreuve de sa fascination pour l’échec et revient la hanter comme un mauvais génie, et un homme qui parachève son apprentissage. Se rêvant en Bergman, Téchiné étudie le lien entre la chair de la vie et les fantômes de la scène, se plaît à explorer l’âme de l’artiste à l’instant du plaisir et du danger, celui où il va se donner en spectacle. J’avoue être resté très distant face à ce style assez chargé, à ces personnages déchirés, à ces éclats baroques et oniriques. À revoir cependant.

Le Lieu du crime
6.2

Le Lieu du crime (1986)

1 h 30 min. Sortie : 16 mai 1986. Policier, Drame, Romance

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Un village de province calme, lumineux et étalé, une famille de petits notables mal assortis (le grand-père a l’air d’un paysan, la grand-mère d’une bourgeoise endimanchée), et l’arrivée d’un ange pasolinien qui précipite les désordres et les résurrections. La tentation du romanesque est si forte, chez l’auteur, qu’elle impulse lentement sa timidité et sa réserve. Dans cet étrange polar sentimental, ce cambriolage du cœur, elle va en s’intensifiant : le scénario multiplie les hasards et les événements pour mieux les dramatiser, le calme masque des tempêtes cachées ou à venir, les gens ordinaires recèlent des tourments cachés, quelque chose d’indiscernable qui couve et soudain éclate. La barque psychologique est chargée, un peu lourde de sens, mais le grondement orageux du film vient à bout des réserves.

Les Innocents
6.1

Les Innocents (1987)

1 h 36 min. Sortie : 23 décembre 1987 (France). Drame

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

La citation finale d’"Antigone" le confirme : Téchiné a voulu faire une tragédie tourmentée à la Sophocle, où s’affirme son goût pour les êtres meurtris qui compensent leur désarroi par une agitation fiévreuse. Chez la jeune fille portant l’espoir fou d’un dépassement de la haine (lumineuse Sandrine Bonnaire), le garçon perdu et acoquiné avec une milice d’extrême-droite, son frère ennemi Beur (Abdel Kechiche, beau gosse) et le médecin épris de ce dernier, on perçoit toujours une soif d’absolu, une tentation à aller au plus profond du mal et à porter le malheur des autres pour pouvoir renaître. Plages lyriques et chocs brutaux, réalisation volontiers sophistiquée, alliage de pureté et de décadence, d’angélisme et de culpabilité… Autant d’éléments dont la sincérité prémunit des clichés du roman-photo.

J'embrasse pas
6.4

J'embrasse pas (1991)

1 h 55 min. Sortie : 20 novembre 1991 (France). Drame

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Inlassablement, Téchiné peint des périples, des "résurrections" comme il les qualifie lui-même. Son jeune héros est cette fois un Candide provincial qui tente naïvement sa chance dans la capitale où il va se promener tel un miroir sur le bord du chemin. De galère en illusion perdue, il finira par se prostituer. L’histoire est celle d’une déchéance, un chemin de croix qui se termine par une expiation en deux temps : le viol sordide aux abords d’une voie ferrée, la nuit, et l’engagement dans la Légion, qui entérine l’assèchement affectif et la haine de soi. Film noir et désespéré donc, analysant la logique marchande d’un monde où la tendresse et le sentiment se paient cher, où le corps est réduit à sa valeur d’échange, où il faut être exploiteur pour détourner l’exploitation et jouir de sa propre plus-value.

Ma saison préférée
6.8

Ma saison préférée (1993)

2 h 07 min. Sortie : 14 mai 1993 (France). Drame, Romance

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Téchiné a ses films d’hiver et ses films d’été. Les premiers sont des rats des villes (turpitudes urbaines), les seconds des rats des champs (un Midi panthéiste). Cette œuvre-ci est pour la première fois un film des quatre saisons entre ville et campagne, où les préoccupations de l’auteur (innocence contre corruption, glaciation sociale contre mouvements du cœur) apparaissent en toute lumière, débarrassées de leurs alibis romanesques. Un frère, une sœur, une mère qui s’en va doucement : tout est dit, ou non dit, de manière fluide, avec une belle justesse de ton dans les mots, les visages, les situations. Le cinéaste montre ce qui d’ordinaire ne regarde personne main arrive à chacun, en continuant de prendre en filature le manque d’amour. Il doit aussi beaucoup à Auteuil, Deneuve et Villalonga.

Les Roseaux sauvages
7

Les Roseaux sauvages (1994)

1 h 50 min. Sortie : 1 juin 1994 (France). Drame

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

On pourrait dire de cette chronique de l’adolescence qu’elle est française vingt-quatre images par secondes, par son ancrage géographique (le Sud-Ouest cher à Téchiné), sa situation politico-historique (la guerre d’Algérie et son lot de questions), sa filiation littéraire (Mauriac, Genet, Pagnol) et son héritage cinématographique (Renoir, Truffaut), mais aussi par la prééminence de la parole et le déterminisme des classes sociales. Sans arrogance ni amertume, le cinéaste décrit les ardeurs, les élans, les incertitudes affectives et sexuelles d’une période où les actes et les sentiments apparaissent à la fois véhéments et fragiles. Tous les personnages affirment ici une vérité qui rend l’évocation particulièrement sensible et attachante, à l’image du panoramique final les laissant se perdre dans un avenir indécis.

Les Voleurs
6.5

Les Voleurs (1996)

1 h 57 min. Sortie : 21 août 1996 (France). Policier

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Si, à la simple analyse des configurations dramatiques, les protagonistes représentent des figures types (le père, la loi, le savoir, le sexe, la transgression, la mère, l’innocence…), Téchiné rappelle qu’il n’est pas un froid théoricien : à chacun, il a su rendre sa chair, son ambiguïté, son potentiel de vie et sa somme de doutes. D’une grande matière humaine, son faux film noir agence ainsi des figures de fiction, les mobilise pour construire des existences en une sorte de maïeutique par le récit, et distille des sentiments ambigus dans un monde interlope (le banditisme lyonnais) en cherchant la vérité des moiteurs nocturnes, des solitudes amères et des comportements troubles. En résulte un fiévreux ballet polyphonique et existentiel, irréductible aux préjugés ordinaires et aux règles du cinéma policier.

Loin
6.5

Loin (2001)

2 h. Sortie : 29 août 2001 (France). Comédie dramatique

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

La terre chaude du Maroc inspire Téchiné. Dans la fièvre grouillante et industrieuse de Tanger la cosmopolite, bannie de tout exotisme, se rencontrent l’adolescent devenu adulte des "Roseaux Sauvages", une jeune femme impétueuse, fière de son indépendance, et de jeunes démunis engoncés dans la misère, candidats à l’exil français. Frontières visibles et invisibles, pays inaccessibles, langues étrangères : le film voyage à travers désarrois et désirs, rages et frustrations, explore, explique, excuse les tâtonnements affectifs des uns et des autres. Avec cette éthique du regard et cette attention presque sensualiste à la vie intérieure qui le caractérisent, le cinéaste apporte là un autre superbe chapitre, vibrant d’énergie solaire, à sa peinture sociale. En prime, la révélation de Lubna Azabal.

Les Égarés
6.1

Les Égarés (2003)

1 h 35 min. Sortie : 20 août 2003 (France). Drame

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Juin 1940, la débâcle. Le temps d’un épisode éphémère et utopique, une institutrice veuve et ses enfants nouent, chacun à sa manière, une relation ambiguë avec un mystérieux adolescent qui apparaît tour à tour comme un sauveur et une menace. Des ébats dans l’eau fraîche du lavoir aux ruses de la survie, le cinéaste effeuille le bénin quotidien dans la lumière dorée des étés impeccables, sans pathos, sans excès, presque sans action. Mais tout ce classicisme droit dans ses guêtres échoue à exprimer la tension entre les personnages, leur désir caché car transgressif, et ronronne comme une bonne copie consciencieuse, exempte de défaut majeur mais aussi d’éclat. Huis clos solaire et bucolique qui ne bouscule jamais les balises du label France, le film est d’une modestie qui confine à la banalité.

Les Temps qui changent
5.7

Les Temps qui changent (2004)

1 h 30 min. Sortie : 15 décembre 2004 (France). Drame, Romance

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Tanger à nouveau, pour les retrouvailles au goût de cendre, mais pleines d’une tendresse touchante, entre Catherine Deneuve, jouant à toute allure et portée par l’affection visible de son metteur en scène, et Gérard Depardieu, troublant, décalé, comme éclairé de l’intérieur, presque démodé dans son romantisme obstiné. Autour de ce couple le monde s’agite, fluctuant, incertain, l’intégrisme rôde, les cultures s’opposent, les sentiments s’évanouissent à force de méfiance, de lassitude et de lâcheté. Car sur un ton plus mélancolique qu’à l’accoutumée, il est question de choix de vie malheureux, d’opportunités concrétisées ou perdues, et de la possibilité d’une deuxième chance. Les temps changent peut-être, mais le réalisateur continue de donner, à sa façon, des nouvelles du monde

Les Témoins
6.6

Les Témoins (2007)

1 h 52 min. Sortie : 7 mars 2007 (France). Drame

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Téchiné replonge dans le passé proche. Son talent unique pour restituer l’esprit d’une époque, y insuffler vérité et incandescence, s’est rarement aussi bien épanoui qu’ici. Le début des années 80 y est traité comme le temps de toutes les utopies, d’une insouciance qui emporte tout, à tel point que la naissance du Sida, dont la gravité n’est jamais éludée, semble se fracasser contre une soif de vie inextinguible. Loin du film mortuaire ou pessimiste, la chronique exprime toute l’énergie à déployer pour atteindre l’autre et se défaire de sa solitude, écrire son passage dans le temps et s’accepter soi-même, prendre conscience de sa valeur et tenter de la transmettre à ceux que l’on aime. De très belles questions pour une œuvre solaire, vibrante, superbe, portée par des acteurs formidables.

La Fille du RER
5.5

La Fille du RER (2009)

1 h 37 min. Sortie : 18 mars 2009 (France). Drame

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

D’un fait divers qui a défrayé la chronique, le cinéaste tire une délicate mosaïque à travers laquelle il s’attache à cerner le mystère entourant le comportement de sa jeune héroïne. Sans esquiver la question du pourquoi, il ménage plusieurs hypothèses sinon explicatives, du moins causales. Et comme souvent, la résolution du conflit intérieur se fera en marge de la société, dans un environnement naturel où toutes les inhibitions finiront par tomber. Poids du regard des autres, culpabilité enfouie, déception amoureuse… le film explore ces sujets avec la même vitalité inventive (voir la superbe scène de séduction par tchat sur Internet), le même tact, la même émouvante évidence dans l’approche des personnages, pour dessiner le malaise d’une génération en quête de reconnaissance.

Quand on a 17 ans
6.5

Quand on a 17 ans (2016)

1 h 56 min. Sortie : 30 mars 2016. Drame

Film de André Téchiné

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Ce pourrait être un résumé quintessentiel de la méthode Téchiné et de ses thèmes de prédilection, en même temps qu’un exercice accompli de définition d’un style par le sujet. L’étude psycho-initiatique est ici intimement liée à la peinture d’un paysage, au passage des saisons et aux variations du temps, à la dimension géographique d’un cadre dans lequel s’épanouit toute l’acuité d’un regard sensible qui réfléchit la rugosité du quotidien tout en acceptant pleinement la séduction du romanesque. Servi par d’excellents comédiens, et malgré une longueur un peu excessive, le cinéaste apporte ainsi une pierre estimable à son portrait de l’adolescence, cerne le trouble de l’ambigüité sexuelle, le bourgeonnement de l’amour et du désir avec une douceur obstinée, résolument tournée vers la lumière.

Thaddeus

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