300 albums à avoir écoutés absolument dans sa vie (selon moi en toute modestie)

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Les albums de Mos Def sont rares, mais la vache, qu'est-ce qu'ils valent le coup. Loin des fantocheries d'usage, le mec lâche un album court où presque chaque seconde compte, sans ressentir le besoin de remplir plus que de nécessaire. Et c'est ça, le hip-hop qu'on aime : la qualité qui l'emporte sur la quantité.

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Après avoir fait tous leurs précédents albums avec (presque) uniquement une batterie, une basse custom et un sax, Morphine étend son spectre pour tramer ce qui ressemble à la BO fantasmée d'un film noir mystique, tout de langueurs mais sans longueurs. Si le chanteur-bassiste-génie Mark Sandman n'était pas mort (sur scène, la classe) avant la sortie de The Night, on imagine à peine quelles merveilles nous aurait réservées la suite.

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Il y a des faits contre lesquels on ne peut pas lutter. Le blufunk en est un.

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Fils spirituels évidents de Jonathan Richman, les frangins (et les frangines) d'Herman Dune n'en ont pas moins leur propre humour et leur propre mignonneté, qu'ils déclinent à satiété dans une enfilade de morceaux tous plus charmants les uns que les autres, qu'on pourrait presque croire inconséquents s'ils ne se gravaient pas aussi durablement dans la matière artichaude de nos petits cœurs tendres. À écouter tous les matins au réveil pour oublier pendant deux minutes que la vie, c'est de la merde.

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Le plan à 3 de Jack White (White Stripes, Raconteurs, lui-même), Alison Mosshart (The Kills) et Dean Fertita (Queens of the Stone Age) est un monstre de groove et de brutalité maîtrisée, un aperçu des potentialités du rock au croisement de ce qu'il est au fond de ses instincts ancestraux et des voies dans lesquelles il se cherche des mutations nouvelles. On pense à Led Zeppelin, aussi bien pour le son que pour la démarche, mais c'est un nouveau jalon, fort de sa propre légitimité, qui vient d'être posé.

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Strictly Turntablized propose, c'est un hip-hop ascétique réduit à sa substantifique moelle, des beats polis de main de maître qui résonnent dans l'angoissant silence de la jungle urbaine. Personne n'avait jamais si bien parlé (et sans un mot, de surcroît) du spleen des grandes métropoles aux heures les plus mortes de la nuit.

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Revisite exhaustive des pépites de Noir Désir (et elles sont nombreuses), ce live sans fin rajeunit sans corriger l’œuvre la plus passionnante du rock français. Les zicos dissertent sur leurs sujets de prédilections avec l'assurance des grands maîtres de conférence et la fièvre des post-ados prêts à bouffer leurs aînés ; la dichotomie fait des étincelles.

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Un album puissant, aux rythmiques découpées au massicot et à la brutalité parfois éthérée, saupoudré ici et là de nappes électro qui nous envoient dans la stratosphère. Un metal qui tranche dans le lard pour mieux trouver son raffinement. Static-X ne fera jamais mieux. Dans cette catégorie, personne ne fera jamais mieux, en fait.

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Paul Baribeau se met à poil devant nous, puis se défait aussi de sa peau, se tient là devant nous, tous les nerfs à vif et le sang qui pulse ostensiblement dans ses veines d'une bouleversante vulnérabilité, et nous laisse nous démerder avec la situation. Chaque chanson est comme une petite page d'un journal intime découvert par accident. Pudiques s'abstenir.

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Un album d'une grande générosité, riche d'expérimentations et de sons bizarres tramés comme de la dentelle, de mélanges de genres et d'influences qui partent dans tous les sens, l'ensemble étrangement soudé par des refrains catchy et des mélodies pop. L'ébauche d'un nouveau mainstream qui ne prendrait pas les gens pour des cons, en somme.

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Petit miracle de spontanéité, harmonie parfaite du piano et de la guitare, une belle vibe garage et beaucoup d'émotion... Du rock d'un genre qui se faisait rare en ces débuts de millénaire.

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Skat à la coule, franglais décontracté, poésie urbaine, décompelxtion romantique et argot céleste : le temps d'un court premier album où rien n'est à jeter, Anis était le prince de la street. (Par la suite ça s'est un peu gâté, mais on va éviter d'en parler.)

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Shawn Lee est un multi-instrumentiste de génie. Clutchy Hopkins aussi. Forcément, quand ils collaborent, le résultat est pas piqué des hannetons.
Une écoute à préfacer de ces quelques vidéo promotionnelles (façon de parler) pour vous mettre dans l'ambiance bizarroïde de cette expérience musicale que je n'ai jamais vraiment retrouvée nulle part ailleurs :
https://www.youtube.com/watch?v=7Lo8OdJ1Kq8
https://www.youtube.com/watch?v=SDfMn4UuZKM
https://www.youtube.com/watch?v=Dt_eHnWACuc

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Un album à fleur de peau, toujours sur la corde raide, à deux doigts du faux pas et du gaufrage total, mais l'équilibre est maintenu tout du long. La farouche fragilité de la musique de Fiona Apple est quelque chose d'extrêmement rare et précieux, préservons-la comme un kiwi.

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Fantastique album de folk-punk où le DIY n'est jamais un cache-misère pour le manque d'ambition, où le lo-fi n'interdit pas la limpidité mélodique, mais où rien n'est jamais sacrifié à la spontanéité et à l'instant présent. Pat the Bunny (le maître d'oeuvre) revendique la vivacité et l'esprit de contestation de l'éthique punk, qu'il pousse jusqu'à contester les doctrines et les poncifs du mouvement dans une circularité qui frise la rupture paradigmatique. Il y a du banjo, de l'accordéon, un violon, des cuivres et une contrebasse, mais tous ces gens sont trop brillants pour céder au chaos attendus, et préfèrent, à la place, faire de la bonne musique. Ainsi soit-il.

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Bah voilà putain, c'est comme ça qu'on fait de la pop.

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Madlib retrousse se manches, s'arme d'une machette et d'un scalpel, et taille dans la masse Blue Note, élaguant des décennies de musique et des milliers d'heures d'enregistrements pour en tirer un substrat essentiel de grooves intemporels, de gimmicks, de riffs et de licks imparables avant de les tresser avec méticulosité, glissant ici et là dans le mix quelques-uns de ses potes ou de ses propres sons, pour un résultat dense et éthéré, un objet conceptuel ultime à la gloire du jazz et du hip-hop. Le kiff, quoi.

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La précision de son écriture, la qualité de son flow et les syncopations sautillantes du jeu de guitare de Batlik font de lui une personnalité musicale immédiatement reconnaissable. C'est un gars qui a la bile mélancolique, la colère sourde et l'humour acide, et un savoureux sens du vocabulaire. Entre bad urbain, autodérision thérapeutique, envie d'ailleurs et revendications politiques vénères, le live est chatoyant, servi par une bande de joyeux drilles du meilleur goût. Un beau souvenir d'une époque où Batlik avait encore l’œil du tigre (il s'est beaucoup calmé depuis).

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L'imposant bluesman norvégien Bjorn Berge est en grande forme sur cet album de reprises et de compos instrumentales. Armé du jeu acoustique le plus musculeux qu'on ait jamais entendu de mémoire de gratteux et d'une stomp box minimaliste à mort, il balance une musique brutale qui ne laisse rien au hasard, dont le groove épais colle à merveille à sa voix de dockeur suave. Sur son album précédent, il s'auto-canonisait "St Slide", et franchement, c'est dur de le contredire. Accessoirement, c'est aussi l'un des meilleurs concerts de ma vie.

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Du punk dont la voix est remplacée par un sax pour révéler des trésors soniques insoupçonnés, dans un spectre qui va lorgner aussi bien du côté de la mélancolie jazzy que du bordel cathartique.

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Composante essentielle du son des grandes heures des Red Hot Chili Peppers, John Frusciante vient de décrocher de l'héroïne lorsqu'il accouche de cet album introspectif, lo-fi et littéralement fait maison, où il se révèle être un chanteur pas dégueu et confirme être un brillant guitariste et mélodiste. To Record Only Water For Ten Days, porté par ses échos, sa boîte à rythme et ses synthés cheapos, offre un rock aérien et méditatif où la saturation ouvre un portail vers la transcendance.

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Icône indé, icône folk, icône féministe, Ani DiFranco déborde d'une énergie primale qu'elle canalise dans un jeu de guitare nerveux unique en son genre et dans les retranchements où elle pousse sa voix souple et féline. Backée par une bassiste et un batteur tip-top, elle livrait en 1997 la performance de sa vie, déballant sans la moindre retenue tout ce qu'elle avait à offrir, aussi bien dans ses flottements éthérées que dans ses brûlots passionnés. Voilà, ça, c'est du live, bordel.

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Délicieusement post-adolescent, le premier album de Déportivo est une petite bombe de moins de 30 minutes comme il en manque trop dans nos contrées. Le power trio assure les ballades de cœurs pincés comme les grosses bourrinades à paroles vague à l'âme. 15 ans plus tard, je suis toujours pas certain qu'on ait fait mieux.

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Tout le monde a déjà entendu "wouppe-wouppe, dat's the sound of da police" (et non pas "assassin de la police", hein) et peut-être même "Suicide, it's a suicide" (https://youtu.be/ekhyhiZrx4A), mais ça serait con de limiter àça KRS-One, dinosaure et monstre sacré d'un hip-hop de qualité à l'ancienne, efficace et exigeant dans la forme, sans samples mélodiques éculés, sans featuring à gogo pour appâter le chaland, sans chanteuse de RnB aux refrains pour faire passer la pilule des couplets, bref, sans tout ce qui (me) casse souvent les couilles dans le mainstream contemporain. Malgré ça, la prod, assurée en grande partie par papy lui-même et par le patron DJ Premier, est carrément au cordeau, et KRS-One (dont le nom est l'acronyme de Knowledge Rules Supreme Over Nearly Everybody, tout un programme) pose dessus son flow de tortue méthodique et amusée qui gagnera la course pour délivrer une bonne parole venue d'une rue qui aspire à la prise de conscience plutôt qu'au bling. Une voix reconnaissable entre mille, à tous les sens du terme.

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Ted Leo est sûrement l'un des seuls mecs à avoir sorti un premier album éponyme avec son nom mal orthographié sur la pochette mais, quelque part, ça a un sens véritable, car ce trip chelou pour lequel vous n'êtes pas prêts (il faut embrasser ce sentiment pour apprécier le voyage) semble venir d'une dimension en léger décalage avec la nôtre, où quelques détails nous semblent familiers mais où on nage généralement dans une mélasse au goût de flou artistique un peu acide et bruitiste. En cours de route, on a l'impression de déambuler au hasard sur les fréquences d'une bande FM où les stations se suivent et ne se ressemblent pas, harmonisées uniquement par la constance des grésillements, du bruit blanc et du lo-fi. On s'arrête parfois un peu plus longtemps sur un élément distinct et on croit y comprendre quelque chose, mais le sens disparaît aussitôt dans notre rétroviseur, emporté par le vent de l'abstraction. Ici et là, un riff, une mélodie émergent, comme un souvenir dont on se demande si on l'a vraiment vécu ou s'il s'agit seulement d'une fabrication de notre subconscient.

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Au milieu d'une scène punk-rock 80s/90s qui a vu la naissance d'un éventail de groupes enthousiasmants mais trop prisonniers de leurs propres codes (Bad Religion, NOFX) ou au contraires trop vendus aux sirènes du mainstream pour être honnêtes (Offspring, Green Day, Sum 41), Rancid, comme avant eux les Clash (une référence fréquente, ne me l'attribuez pas même si je la soutiens) maintiennent une solide intégrité artistique sans renier leur amour véritable du refrain accrocheur, servi avec une joyeuseté communicative par les voix d'ivrognes de Tim Armstrong et de Lars Frederiksen. L'album démarre sur les chapeaux de roues et ne lève jamais vraiment le pied, balançant comme autant de coups de poings des rythmes taillés au burin dans un matériau punk brut veiné de ska (ou l'inverse) dont il est difficile de nier l'efficacité.

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Bricoleur de génie, soul man passionné qui pervertit les codes du genre pour l'empêcher de s'endormir et de sombrer dans le coma qui le guette, Jamie Lidell tient avec Compass son chef d'oeuvre, l'expression d'une vision musicale ambitieuse à laquelle il donne corps en sculpteur visionnaire.

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Les Etats-Unis ont le MTV Unplugged de Nirvana ; la France a le Concert privé M6 de Jean-Louis Aubert.

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Les instrus du White Album des Beatles, la voix du Black Album de Jay-Z, et paf ! Mais c'est encore Danger Mouse qui en parle le mieux :

"Il y a pas mal de gens qui pensent que je me suis contenté de prendre des morceaux des Beatles et de jeter les a-capellas de Jaz-Z dessus, ou de faire un peu de remixage, de créer quelques boucles par-ci par-là, mais ce que j'ai fait tient de l'authentique déconstruction. C'est un travail monstre. [...] Le vrai défi, ce qui m'intéressait, c'était de formuler un manifeste de l'art du sampling."

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Autrefois héros oublié du grunge au sein des Screaming Trees, Mark Lanegan entame sa carrière solo par une série d'albums (de The Winding Sheet à Field Songs) au cours de laquelle il traîne sa silhouette ténébreuse de rockeur repenti sur les routes poussiéreuses d'une americana famélique électrifiée par le discrètement génial Mike Johnson. Cet album de reprises est le plus dépouillé qu'ils feront, mais aussi le plus abouti. À travers les mots d'autres, Lanegan nous guide de sa voix hantée plus loin en lui-même qu'il ne l'a jamais fait avec les siens.