Cover 2023, itinéraire d'un cinéphile

2023, itinéraire d'un cinéphile

Une nouvelle année de cinéma où je vais consigner toute les nouveautés que j'aurai vu au cinéma ou ailleurs en 2023.

Liste de

91 films

créee il y a plus d’un an · modifiée il y a 5 mois

Tirailleurs
5.7

Tirailleurs (2022)

1 h 40 min. Sortie : 4 janvier 2023. Drame, Guerre, Historique

Film de Mathieu Vadepied

Flaw 70 a mis 6/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Pour son deuxième film, Mathieu Vadepied s'attaque à un sujet souvent passé sous silence que ce soit dans l'Histoire et au cinéma et vient donner ici un autre visage à la Première Guerre Mondiale dans une œuvre pertinente mais qui manque d'ampleur.
Venant évoquer frontalement les conditions des tirailleurs sénégalais, enrôlés de force par l'armée française pour combattre une guerre qui ne les concernait pas et dont ils ne feront office que de chairs à canons sous des promesses illusoires de reconnaissances et de mérites. Confrontant la grande Histoire au portrait intimiste de la relation entre un père et son fils, le cinéaste explore les deux visions d'une jeune génération envieuse de faire ses preuves quitte à être exploitée et d'une génération plus ancienne consciente de la cruauté d'une civilisation prompte à juger l'homme noir en inférieur. Consciencieux sur le traitement de son sujet, le récit n'évite malheureusement pas quelques passages un peu plus téléphonés lorsqu'il évoque le parcours plus personnel de ses personnages. Très peu surprenant dans son approche, c'est dans sa facette presque documentaire que le film s'avère le plus intéressant même si il en sacrifie pour le coup une grande partie de son émotion.
Le casting reste exemplaire, surtout un Omar Sy habité et poignant qui livre sans conteste son meilleur rôle, mais le tout souffre d'un académisme trop présent pour s'imposer comme cinématographiquement mémorable. Même si la réalisation technique s'avère très soignée, elle est aussi trop propre pour créer une imagerie vraiment marquante. Pas aidé par la mise en scène didactique de Mathieu Vadepied qui peine à immerger son spectateur dans un film qui manque au final de point de vue. Avec sa caméra à l'épaule qui se veut aussi proche de son sujet que détacher de ses personnages, Tirailleurs s'impose comme un film nécessaire sur la lumière qu'il fait de l'Etat français mais surtout de l'hommage qu'il rend à ceux oublié par l'Histoire et le cinéma. Mais en étant trop sage pour vraiment émouvoir et trop didactique pour pleinement marquer, on reste face à un film qui se refuse à vraiment bousculer et interroger. Convaincant mais timide.

The Pale Blue Eye
6

The Pale Blue Eye (2022)

2 h 08 min. Sortie : 6 janvier 2023 (France). Policier, Épouvante-Horreur, Thriller

Film de Scott Cooper

Flaw 70 a mis 7/10.

Annotation :

Se lançant dans le murder mystery, Scott Cooper continue à tracer le filon de son cinéma avec un film entre l'horreur hammerien de son Antlers et l'âpreté de son excellent Hostiles même si il ne retrouve jamais les sommets de ce dernier.
Plus proche de son précédent film, The Pale Blue Eye permet à Cooper de nourrir son amour du cinéma de genre avec un récit qui flirte avec l'occulte et une esthétique très gothique. Fasciné par l'héritage américain, il poursuit ses obsessions autour du mythe d'un pays bâtit autour de ses superstitions que ces dernières soient d'ordres mystiques ou institutionnelles. Plutôt intéressant dans sa démarche, venant directement confrontés l'institution militaire à celle de l'église, le film brode un propos pertinent mais jamais vraiment approfondis tant il s'intéresse plus à son enquête policière. On aura donc connu le cinéaste plus incisif alors qu'il se contente d'une partition plus sage dans une intrigue appliquée mais peu surprenante jusqu'à un dernier tiers qui se perd dans des tropes surannés et une résolution qui manque cruellement d'impact et d'émotions. Il pourra pourtant compter sur un duo principal plutôt amusant pour tenir l'intérêt jusqu'au bout surtout que le toujours impeccable Christian Bale et l'étonnant Harry Melling, qui vole ici assurément la vedette, sont là pour élever l'ensemble.
Avec sa photographie ténébreuse et soignée, Scott Cooper soigne l'ambiance de son film grâce à ses élans horrifiques qui magnifie l'imagerie de l'ensemble. Cooper signe une mise en scène sophistiquée et habile qui possède un sens du cadre adroit et élégant démontrant encore tout le savoir-faire du cinéaste. The Pale Blue Eye s'impose donc comme un film appliqué et réussi malgré un récit moins ambitieux qu'escompté et une narration qui s'effondre un peu sur son dernier acte. Malgré un casting solide et une réalisation impeccable, on reste face à un film mineur au sein de l'œuvre de Scott Cooper, suivant le chemin emprunté par Antlers, il y maitrise ici un peu mieux ses influences mais est très loin de la force évocatrice de ses meilleurs films.

Les Survivants
6.2

Les Survivants (2022)

1 h 34 min. Sortie : 4 janvier 2023. Drame, Thriller

Film de Guillaume Renusson

Flaw 70 a mis 6/10.

Annotation :

Premier film plutôt ambitieux, Les Survivants est comme son titre l'indique un thriller aux allures de survival qui parvient à amener en efficacité ce qu'il échoue parfois à produire en terme de subtilités.
Voulant traiter beaucoup de questions sur un récit pourtant assez court, le récit s'avère parfois assez grossier et superflu dans son approche. Même si la question de l'immigration est au centre du film, celle-ci ne sert jamais plus que de prétexte à une traque qui ne confronte jamais vraiment sa portée sociale et politique. Plus intéressé par le deuil de son protagoniste, le film va venir faire des parallèles plutôt simpliste entre la situation périlleuse des personnages et le chemin de croix intérieur de son héros. Jouant d'ailleurs un petit peu trop la carte du cliché, Denis Ménochet s'impose comme un type cast évident, tant il reproduit sa performance de taiseux aux fragilités intérieurs qu'il a tendance à reproduire assez souvent. Même si il est encore un fois très bon dans le registre, et accompagné d'une tout aussi talentueuse Zar Amir Ebrahimi, le film joue vite la facilité sur cet aspect. Il ne challenge donc jamais vraiment son spectateur sur une partie narrative bien sage et attendu qui favorise avant tout son statut de divertissement.
A ce niveau là, Guillaume Renusson se montre bien plus à l'aise notamment grâce à une réalisation solide qui accompagne à merveille une mise en scène tendue et appliquée. Que ce soit lorsqu'il se réapproprie l'imagerie de la violence policière dans un superbe plan-séquence inaugurale où lorsqu'il revisite l'home invasion dans une séquence particulièrement inspirée, il parvient à signer un thriller sous tension et plutôt plaisant. Un peu moins convaincant quand à son rapport à la nature, dont il ne parvient jamais vraiment à faire ressentir le danger malgré ses conditions extrêmes, il se montre bien plus efficace lorsqu'il se recentre sur sa chasse à l'homme. Les Survivants est donc un thriller sympathique, jamais mémorable ni vraiment profond dans ce qu'il traite mais parvient à offrir quelques bons moments d'intensités soutenu par un casting solide.

Poker Face
3.9

Poker Face (2022)

1 h 34 min. Sortie : 11 octobre 2023 (France). Thriller

Film de Russell Crowe

Flaw 70 a mis 4/10.

Annotation :

Russell Crowe se relance dans la réalisation, 8 ans après un premier essai peu fructueux, sur un scénario qu'il a cette fois-ci co-écrit dans l'espoir dans retirer un thriller existentialiste autour de l'amitié et de la mortalité.
On sent une envie évidente de proposer un récit intimiste, profond et personnel où Crowe aimerait en tirer une réflexion sur la vie et sa position de géant vieillissant. Malheureusement, à vouloir être trop de choses à la fois, son film se disperse et se perd dans des revirements étranges, maladroits et inexploités. Les personnages paraissent inexistants, hormis une longue introduction autour de son protagoniste et qui permet à l'acteur-réalisateur de se faire un petit ego trip hors sujet, il essaie de placer les pions d'un huit-clos psychologique où une bande d'amis se retrouvent forcer à s'affronter autour de dures vérités. Mais n'approfondissant jamais ses personnages secondaires et les évacuant même lors d'un climax qui embraie sur une histoire de home invasion qui semble clairement déconnecté du reste. Le film en fait trop alors qu'il possède une durée ridiculement courte et en oublie même de clôturer convenablement certaines de ses sous-intrigues.
L'ensemble est maladroite, pauvrement construit et pas vraiment aidé par un casting sous-exploité. Même Russell Crowe ne paraît pas vraiment impliqué dans une performance amorphe et paresseuse. Il se montre pourtant un peu plus inspiré sur la partie formelle, même si sa mise en scène reste très fonctionnelle, il propose un sens du cadrage plus minutieux que sur son premier film. Aidé par une photographie léchée et convaincante, le film possède un cachet visuel indéniable. Mais rien de suffisamment fort pour sauver ce Poker Face qui ne s'impose que comme un thriller bancal et insignifiant qui veut trop en raconter sans parvenir à mener à quelque chose. Un immense gâchis.

Devotion
5.7

Devotion (2022)

2 h 18 min. Sortie : 20 janvier 2023 (France). Guerre, Biopic, Drame

Film de J.D. Dillard

Flaw 70 a mis 5/10.

Annotation :

Inspiré de la véritable histoire du premier aviateur noir américain durant la guerre de Corée, Devotion s'impose comme un biopic convenu qui peine à vraiment susciter l'intérêt malgré la pertinence de son histoire.
Jamais l'écriture ne parviendra à dépasser le simple cadre du devoir de mémoire. Passant assez vite sur l'adversité qu'à dû subir son protagoniste tout au long de son parcours et de sa vie en raison de sa couleur de peau, le film met vite cela en gimmick pour s'intéresser à une camaraderie aux élans de valeurs militaires américaines. Le récit baigne dans les bons sentiments hollywoodien et passe donc souvent à côté de ses personnages en survolant sciemment certains points qui pourraient apporter une lumière peu flatteuse à l'institution militaire. Calqué sur le modèle du récent Top Gun: Maverick, le film se concentre en grande partie sur l'entraînement des pilotes et l'amitié qui unira ses deux protagonistes avant de basculer sur un dernier tiers qui plongera un peu plus dans les opérations militaires. Les parallèles entre les deux films iront même jusqu'à la présence d'un même acteur qui occupe un rôle plutôt similaire. Même si ici plus modeste et amical, Glenn Powell livre une performance identique à ce qu'il avait livré dans Top Gun tandis que Jonathan Mayors se montre convaincant sans vraiment être mémorable.
Le casting est bon, mais coincé dans l'unidimensionnalité de leurs personnages. Reste que la partie formelle se montre maîtrisé. Là aussi, les similitudes avec Top Gun s'accumulent car c'est le même chorégraphe des séquences aériennes qui vient ici designer celles de Devotion. Solide techniquement grâce à une réalisation appliquée mais qui souffre surtout d'une mise en scène de J. D. Dillard qui manque de punch et se contente d'une approche très académique. Devotion s'impose donc comme un film qui se contente trop souvent du strict minimum et qui donne beaucoup trop l'impression d'être un ersatz du récent Top Gun dont il souffre en comparaison. Jamais honteux mais trop peu incarné pour qu'on se laisse embarquer par ce qu'il propose.

Babylon
7.3

Babylon (2022)

3 h 09 min. Sortie : 18 janvier 2023 (France). Comédie dramatique, Historique

Film de Damien Chazelle

Flaw 70 a mis 8/10.

Annotation :

Avec son nouveau film, Damien Chazelle offre le miroir inverse à son acclamé La La Land replongeant dans les entrailles d'Hollywood et de son héritage où la douce mélancolie fait place à un spleen funeste.
Autant amoureux de l'industrie du cinéma que révulsé par celle-ci, Chazelle signe un récit dense où il réinterroge la place du passionné. Toujours intéressé par les figures obsessionnelles aux passions dévorantes, le cinéaste est ici bien plus intrigué par les contradictions d'un milieu qui se confronte aux changements et aux failles du système. Quand le rêve se voit perverti par l'argent, quand l'euphorie fait place à la débauche et les extrêmes deviennent quotidien. Chazelle aborde la relation toxique qui peut naître entre un passionné et sa passion, et surtout sa cannibalisation par un système qui ne s'intéresse à l'art et au progrès que pour en établir un profit. Il dresse le portrait d'une poignée de personnages pris dans la tourmente de leur aspiration dans un milieu changeant et capricieux où les stars d'hier deviennent les has been de demain. Pas toujours très fin dans son analyse, surtout qu'il cède ici souvent à un humour gras qui se justifie mais sans être particulièrement payant, Chazelle se perd parfois dans un récit à la construction didactique et beaucoup trop long pour son propre bien.
Le dernier tiers en fera les frais mettant ses personnages les plus réussies de côté pour se plonger dans une intrigue aux relents mafieuses qui se justifie moins dans le récit et sert de remplissage pour une conclusion attendue qui manque de force. Car même si son point de vue divisé sur le cinéma s'avère passionnant de contradiction, l'ensemble manque d'émotions. Avec son excellent casting , dont la touchante mélancolie d'un Brad Pitt inspiré ou l'énergie galvanisante d'une Margot Robbie déchainée, et sa réalisation somptueuse, Babylon impressionne constamment. La mise en scène énergique de Damien Chazelle brille du soutien d'une photographie granuleuse qui souligne la partition formelle et auditive endiablée, notamment par le score grandiose de Justin Hurwitz. Babylon possède un sens du rythme et du cadrage parfait, montrant toute la maîtrise de Chazelle sur son travail si distinctif avec la caméra. Même si son film se perd parfois dans son exubérance, et qu'il se montre moins accompli que les précédentes œuvres du cinéaste c'est par sa lucidité et sa passion que ce dernier parvient toujours à nous embarquer dans un très bon moment de cinéma.

Jung_E
4.7

Jung_E (2023)

Jungyi

1 h 38 min. Sortie : 20 janvier 2023. Action, Science-fiction

Film de Yeon Sang-Ho

Flaw 70 a mis 4/10.

Annotation :

Yeon Sang-Ho n'aura jamais su tenir les promesses qu'avait posé son très réussi Train to Busan et aura depuis enchaîné les déceptions dont notamment la suite de ce dernier, le sympathique mais anecdotique Peninsula.
C'est donc avec beaucoup de prudence qu'on se plonge dans son dernier né, un film de Science-fiction aux élans cyberpunk et qui accouche d'un récit mal tenu et aux enjeux soit inconséquents soit précipités. Dans une course à l'I.A en raison d'une Terre divisée et en proie à une guerre civile, le film se perd dans une exposition ridicule et maladroite car elle parvient à la fois à être trop présente sans pour autant parvenir à exposer les tenants et aboutissants de son univers. Passant totalement à côté des thématiques politiques de son sujet, il peine à vraiment trouver ses marques et survole ses meilleures idées. Présentant l'esprit humain comme une denrée pour la vie synthétique, le film échoue à dresser une vraie réflexion malgré une conclusion étonnamment plus inspirée.
S'orientant vers l'aspect capitaliste de son sujet, c'est lorsqu'il met sa protagoniste face à l'horreur d'une société de consommation aux aspirations libidineuses que l'ensemble prend un tournant inattendu et pertinent. Vite évacué comme prétexte pour un climax où l'action prime à la réflexion, l'ensemble se montre néanmoins suffisamment bienvenu pour sortir le spectateur de sa torpeur. Car même si le film est court, il paraît long en raison d'une absence de rythme et d'un récit sans épaisseur. La mise en scène de Yeon Sang-Ho est trop passive pour se montrer intéressante, malgré une ou deux séquences d'actions bien découpées et tendues, le reste manque de relief et n'est pas aidé par une réalisation technique défaillante entre ses effets spéciaux ratés et sa photographie terne. Jung_E s'impose donc comme un spectacle décevant, au récit maigre qui met trop de temps à capter l'intérêt et aux acteurs beaucoup trop approximatifs. De quoi achever la trajectoire peu reluisante d'un cinéaste qui ne sait jamais marier ses ambitions avec son savoir-faire.

Earwig
5.6

Earwig (2021)

1 h 54 min. Sortie : 18 janvier 2023 (France). Drame, Fantastique

Film de Lucile Hadzihalilovic

Flaw 70 a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Bloquée à ne pouvoir faire qu'un film par décennie, Lucile Hadzihalilovic revient sur grand écran avec son troisième long-métrage en plus de 30 ans d'activité. Très librement inspiré d'un roman de Brian Catling, la cinéaste confirme avec ce Earwig qu'elle est bel et bien une des artistes les plus passionnantes et mésestimés du cinéma français.
Tourné en langue anglaise, son film se plaît à venir brouillé les lignes temporelles dans un récit opaque et obtus dont les réponses seront rares à son fantastique ambiant et ses personnages que l'on ne parviendra jamais pleinement à percer. Le tout prend la forme d'un conte macabre saisissant où prime l'expérience sensorielle sublimé par des compositions musicales atypiques et envoutantes. Les dialogues se font rares et ne servent jamais vraiment à expliciter la trajectoire de son récit qui sert avant tout de miroir à la perception du spectateur. Nous laissant la place de nous immerger, c'est par nos sens que le film prend forme plus que par sa volonté de nous imposer ses réflexions. On retrouve l'obsession de la cinéaste pour une enfance façonné par un monde adulte souvent terrifiant et secret dont on en perçoit jamais totalement les clés. Toujours soumis à l'influence d'une autorité supérieur, explorant le monde comme une ruche d'ouvrière où seule une présence s'impose en maître. En épurant totalement son style, la cinéaste en aborde ici frontalement ses coutures, laissant place au paradoxal en livrant une mise à nue de son cinéma tout en nous livrant une de ses œuvres les plus retors.
Avec sa mise en scène sophistiquée, dont on retrouve un sens du cadrage somptueux notamment grâce à des éclairages et une photographie saisissante qui donne l'impression que chaque plans correspond à un tableau qui prend vie. Lucile Hadzihalilovic démontre tout son savoir-faire dans un huit clos étouffant à l'atmosphère lancinante. Le rythme s'avère lent parfois un peu trop en raison d'une durée excessive pour sa proposition tant l'ensemble aurait gagné à avoir 20 minutes en moins. Même si il est un peu moins enivrant et abouti que les précédentes œuvres de sa cinéaste, car pas assez resserré ou moins surprenant, Earwig reste une expérience déroutante et hypnotique qui s'impose par sa poésie macabre si fascinante magnifié par un travail formel saisissant. De quoi confirmer la singularité d'une cinéaste passionnante qui mérite bien plus de reconnaissance.

TÁR
6.7

TÁR (2022)

2 h 38 min. Sortie : 25 janvier 2023 (France). Drame, Musique

Film de Todd Field

Flaw 70 a mis 5/10.

Annotation :

Après plus de 16 ans d'absences, Todd Field signe enfin son troisième film avec une œuvre qui a fait sensation mais qui prouve surtout que si il ne repose pas sur du matériaux déjà existants, ses deux premiers films étant des adaptations, son cinéma à tendance à perdre en pertinence.
Dans son récit, on sent l'aigreur d'un cinéaste qui a été mis de côté par Hollywood pendant trop longtemps et qui veut ici régler ses comptes. Présentant un personnage toxique à travers qui il va explorer la notion de pouvoir et de qui la détient, il essaie de présenter un film à charge sur l'artiste mégalo mais l'agenda politique de Field s'avère bien plus trouble le peu que l'on creuse un peu. Sa protagoniste étant une femme lesbienne, elle devient une excuse pour montrer que les tares masculines qui découlent d'une position d'influence ne sont pas que propres aux hommes. Par ce simple constat, on se retrouve face à une intrigue qui sous son aspect satirique cache surtout une réflexion aigri autour de la bien-pensance et de la cancel culture qui perd son rapport à l'art à trop se focaliser sur les déboires de l'artiste. La descente aux enfers de sa protagoniste ne devient donc plus en raison de son abject comportement mais plus la faute à une société changeante et capricieuse qui la prive de son art.
Se voulant comme un pamphlet libérateur, Tár s'impose surtout comme un récit très conservateur qui peine à cacher sa vision mondaine du monde, notamment dans une conclusion particulièrement hautaine, et qui s'avère bien trop long pour ce qu'il raconte. Son histoire n'est jamais aussi dense et complexe qu'elle le rêverait et dans ce type de récit sur la chute d'un artiste mégalo, on aura déjà vu bien plus inspiré. Mais on enlèvera pas à Tár qu'il est porté par une Cate Blanchett habitée et intense, livrant une excellente performance, tout comme Todd Field signe une mise en scène intelligente et adroite vis à vis de son travail du son et du cadre flirtant même avec un fantasmagorique plutôt bienvenu soulignant une approche formelle qui souligne bien les non-dits du scénario, notamment la thématique de la culpabilité. Tár est donc une œuvre qui à ses mérites mais aussi ses très grosses failles par son approche politique douteuse et réactionnaire. Très moyen.

You People
4.5

You People (2023)

1 h 58 min. Sortie : 27 janvier 2023. Comédie

Film de Kenya Barris

Flaw 70 a mis 3/10.

Annotation :

Se divisant entre la rom-com feel good et la satire sociale, le film n'arrive jamais à traiter suffisamment bien ces deux aspects et finit par n'apparaître que comme un produit très artificiel.
Le tout n'est pas aidé par son écriture vraiment paresseuse, plongeant souvent dans les stéréotypes et les clichés pour caractériser ses personnages et dépeindre les deux communautés au sein de son histoire. Entre ça et les dialogues surfaits de platitudes, le récit s'impose comme un choc des cultures paresseux où la morale se veut sauf au détriment d'une vraie réflexion autour de son sujet. Même si il faut lui reconnaitre un ou deux gags particulièrement bien pensés et efficaces, l'ensemble surnage dans des séquences téléphonées où l'on peine à ressentir la moindre connexion entre les personnages. C'est la romance au centre du film qui en fera les frais car elle est toujours mis au second plan des rivalités qui règne dans l'histoire et les nombreuses ellipses autour de la formation du couple n'aide en rien l'implication.
De plus Jonah Hill et Lauren London ne possède aucune alchimie pour essayer un tant soit peu de faire passer la pilule. Comme d'ailleurs le reste du casting qui ont un engagement minimum auprès de leurs personnages. Le tout est encadré par une réalisation sans saveur, avec sa photographie de sitcom ainsi qu'une mise en scène fade de Kenya Barris qui tente de compenser son manque d'emphase par des effets de montages kitsch et désastreux. You People est un ratage en règle, même si sa démarche part d'un bon sentiment et qu'il s'applique le mieux qu'il peut à ne transgresser aucune valeur morale, cela ne l'empêche pas à sonner faux à chaque étapes de sa conception. On se retrouve face à un film à l'écriture programmatique et sans idées, joué par des acteurs peu impliqués et réalisé avec aucun entrain. Inoffensif même si assez mauvais.

Le Pire Voisin au monde
6.3

Le Pire Voisin au monde (2022)

A Man Called Otto

2 h 06 min. Sortie : 1 février 2023 (France). Comédie dramatique

Film de Marc Forster

Flaw 70 a mis 6/10.

Annotation :

Remake d'un film suédois, lui-même adaptation d'un livre, A Man Called Otto est l'américanisation classique d'un film très européen qui aura connu un petit succès. Profitant de la présence d'un acteur du calibre de Tom Hanks pour venir toucher un public plus large à travers une histoire attendu.
On suit le parcours d'un homme qui approche de la fin de sa vie et qui s'est coupé du monde suite au décès de sa femme. Personnage acariâtre et bougon, on se retrouve vers la trajectoire classique du vieil homme qui va s'adoucir et reprendre goût à la vie suite à l'arrivée de ses nouveaux voisins. Simple mais efficace, le récit n'en reste pas moins très attendu et navigue entre un humour léger et un spleen plus dépressif abordant certains thématiques plus sérieuses telles le suicide. Le film arrive d'ailleurs parfois à faire preuve d'un peu de finesse et ne manque pas d'émotions grâce à des personnages attachants tous interprétés par des acteurs talentueux. Tom Hanks reste fidèle à lui-même dans une performance légèrement à contre-emploi qui lui sied bien et est accompagné par une excellente et touchante Mariana Treviño. Se plongeant parfois dans des flashbacks qui ont tendance à prendre un peu trop de place et alourdisse un peu le rythme, pas aidé par un montage très didactique, mais la réalisation sommaire reste plutôt honnête, accompagnée par la mise en scène sobre mais maîtrisée de Marc Foster.
A Man Called Otto s'impose comme un film mineur, attendu mais pas moins déplaisant. Très typique du remake américain empli de bons sentiments, on se retrouve face à un film parfois plus fin et touchant qu'espéré. Pas de quoi s'imposer comme un moment de cinéma particulièrement marquant, mais de quoi passer le temps un dimanche soir pluvieux.

Knock at the Cabin
5.7

Knock at the Cabin (2023)

1 h 40 min. Sortie : 1 février 2023 (France). Épouvante-Horreur, Thriller

Film de M. Night Shyamalan

Flaw 70 a mis 6/10.

Annotation :

Après un regain de vigueur, M. Night Shyamalan était retombé dans les travers de son cinéma avec ses deux précédents films et il persiste et signe avec son anecdotique Knock at the Cabin.
Toujours fasciné par les questionnements autour des croyances et du mysticisme, le cinéaste adapte cette fois-ci le roman The Cabin at the End of the World de Paul G. Tremblay, il signe de prime abord un récit intriguant et prometteur alors qu'il met en place les éléments d'un home invasion particulier qui brille par une exposition impeccable. Très ancré dans le mystère et nous faisait habilement douté des motivations des assaillants, le récit s'avère complexe et bien mené arrivant en parallèle de la montée dans l'horreur à incruster des flashbacks savamment amené sur la relation du couple pris en otage avec leur fille adoptive. Les personnages se montre attachant et le film dresse quelques thématiques bienvenus autour d'une relation homosexuelle qui déjoue les clichés habituels. Pourtant malgré ce prémisse plutôt bien tenu et cette première heure maîtrisé, le film s'effondre assez violemment dans son dernier tiers. Comme pour Old, Shyamalan semble incapable de gérer le pay off de son film et dévie du roman de base au point d'en souffrir de la comparaison. Sur-explicative, grandiloquente et perdant de vue le facteur humain au profit d'une moralité simpliste, le film ne sait pas se clôturer car il évite sciemment une position trop complexe et trop sombre. Le film finit par manquer de courage et déçoit trahissant une démarche peu engagé qui ne s'intéressant plus qu'au postulat qu'à la façon de le développer.
Un problème récurrent dans le cinéma de Shyamalan qui montre encore une fois l'incapacité du cinéaste à se renouveler dans sa façon d'aborder ses films. Ici même sa mise en scène vient parfois se perdre dans un maniérisme qui gâche certains effets. Voulant éviter tout mystères, il en montre beaucoup trop lorsqu'il devrait justement se contenter du minimum et il échoue à en montrer assez lorsque le choc visuel se montre plus nécessaire. Reste que Knock at the Cabin possède un très bon casting pour permettre à l'ensemble de tenir debout, avec en tête un Dave Bautista magnétique qui possède enfin un rôle à sa mesure. Même si il déçoit, Knock at the Cabin reste un film plutôt honnête dans ce qu'il propose, notamment dans sa première heure particulièrement efficace tout en étant plus cohérent et digeste que le précédent Old.

Aftersun
7.2

Aftersun (2022)

1 h 42 min. Sortie : 1 février 2023 (France). Drame

Film de Charlotte Wells

Flaw 70 a mis 10/10.

Annotation :

Influencé par son vécu, Charlotte Wells signe avec son premier film ce qu'elle appelle une "autobiographie émotionnelle", moins ancrée dans les faits plutôt que dans le chaos des sentiments.
Aftersun s'impose comme un slow burn émotionnel. Déroutant par son aspect rugueux et évasif, qui tire sur les scènes pour en faire ressortir tout le poids et la gêne jusqu'à ce que ceux-ci prennent des proportions démesurés. Entre l'insouciance adolescente de sa protagoniste et l'insondable conflit intérieur de son père, la jeune cinéaste parvient à construire une habile distance entre ses deux personnages dépeignant à la fois une relation tendre et aimante mais aussi la frustration et l'incompréhension autour du mal-être grandissant du jeune père. Devenant un portrait saisissant de la dépression et du désespoir qu'elle entraîne, le récit se construit comme un assemblage de souvenirs pour permettre à sa protagoniste de comprendre un peu mieux le malheur dont son père était affligé. Jonglant entre deux époques, le film monte crescendo au point de nous submerger par une tristesse terrible lorsqu'il nous fait enfin réalisé la finalité de son parcours. Brillante parabole sur le deuil, c'est par sa finesse que le film se montre déchirant ainsi que la précision de son regard. Charlotte Wells signe une mise en scène en total opposition à ce qu'on peut attendre d'un coming of age sur les vacances. Les plans sont longs, souvent mal aimables mais intelligemment composé dans leur façon de ne jamais saisir la figure paternelle. Elle habite et hante l'écran mais son regard qui en trahit sa tristesse évade souvent à la caméra le traitant déjà tel un fantôme.
La réalisation se montre particulièrement habille dans sa façon de représenter la dépression, comme une tristesse sourde qui ne dit jamais son nom et habite chaque séquences du film. Le tout paraît abrupte, notamment avec une utilisation discrète mais significative de la musique. Aftersun s'impose comme un élan de cinéma courageux et bouleversant tant il touche du doigt un mal être bien trop incompris avec une justesse redoutable. Habité par un casting en état de grâce, dont Paul Mescal qui livre une performance magnifique de fragilité intériorisé qui émeut par sa grâce et sa simplicité dans sa façon de présenter une palette de jeu étourdissante de complexité. Il est majestueux et accompagné par l'excellente Frankie Corio dont leur alchimie irradie l'écran. Ne laissant cet Aftersun que comme un grand et inoubliable film.

Quelqu'un que j'ai bien connu
5.2

Quelqu'un que j'ai bien connu (2023)

Somebody I Used To Know

1 h 46 min. Sortie : 10 février 2023. Comédie romantique

Film de Dave Franco

Flaw 70 a mis 7/10.

Annotation :

Suite à son mésestimé The Rental, un premier film prometteur, Dave Franco s'associe avec Alison Brie, sa femme dans la vie, et signe une fausse romcom intuitive et intéressante qui prouve ses qualités de cinéaste.
Sans pour autant bouleversé la formule de la comédie romantique, Franco et Brie signe un récit qui s'amuse des clichés du genre et les décortique pour ne mieux qu'en faire ressortir les tropes les plus nocifs. L'idéalisation du triangle amoureux et la valorisation de la poursuite romantique étant un des piliers centrales de la romcom, le film tente ici de montrer comment une telle mentalité peut s'avérer cruelle et égoïste venant surtout d'une représentation puérile des relations amoureuses. Mettant en parallèle les tropes idiots des films romantiques à la carrière professionnelle de sa protagoniste, showrunneuse d'une émission de télé-réalité, pour mieux montrer comment la fiction peut travestir la réalité pour servir un but narcissique. Ici le film n'hésite pas à présenter son duo central comme étant particulièrement antipathiques dans leur poursuite d'une relation toxique. Habilement écrit et empli de réflexions pertinentes autour de la représentation amoureuse, le film se mue peu à peu en une jolie parabole autour des regrets et des échecs et la nécessité d'en tirer les leçons plutôt que de les ressasser jusqu'à l'obsession.
Muni d'un casting impeccable, en tête une énergique et hilarante Alison Brie, le film possède aussi une réalisation assurée par une mise en scène sophistiqué et sobre de la part de Dave Franco qui préfère une approche plus subtil et mature de son sujet tout en lui donnant une énergie communicative. Il signe avec Somebody I Used To Know un deuxième film réussi et maîtrisé, plus profond et pertinent qu'escompté tout en s'imposant en divertissement rafraîchissant et drôle. Même si il se montre encore un peu timide sur certains aspects de son film, préférant l'accessibilité à une déconstruction plus poussée. Le film en ressort peut-être un peu trop inoffensif pour cela mais en aucun cas moins intéressant. Un bon film.

Ant-Man et la Guêpe - Quantumania
4.5

Ant-Man et la Guêpe - Quantumania (2023)

Ant-Man and the Wasp: Quantumania

2 h 04 min. Sortie : 15 février 2023 (France). Action, Aventure, Comédie

Film de Peyton Reed

Flaw 70 a mis 3/10.

Annotation :

Le MCU entame sa 5e phase, après une quatrième particulièrement longue et laborieuse, avec un projet qui se veut ambitieux ayant pour but de présenter pour la première fois son univers quantique, instaurer le nouveau grand méchant censé remplacer Thanos tout en venant clôturer la trilogie autour du personnage d'Ant-Man.
Mais avec toute ses ambitions, le film s'écroule inévitablement sur lui-même face à son incapacité à tenir toute ses promesses en raison d'un récit programmatique et paresseux qui ne sait jamais vraiment quoi raconter. Ant-Man, ainsi que tout les personnages qui gravitent autour de lui n'ont jamais paru aussi peu passionnants ou incarnés tant ils ne sont là que comme tropes pour faire avancer une intrigue très balisée et fonctionnelle. Suivant le héros vieillissant et oisif après le Endgame avant que celui-ci ne soit inspiré à reprendre le combat grâce à une nouvelle génération plus investie. On aura déjà eu un traitement similaire avec d'autres héros du MCU et ici la formule est exploitée sans la moindre profondeur. Alors que le film aurait pu en profiter pour explorer le lien entre Lang et sa fille, il n'en sera rien tant tout est focalisé pour n'être qu'un teasing d'événements à venir. En ça le film se focalisera beaucoup sur l'introduction de Kang, qui s'avère malheureusement anticlimatique en raison d'un scénario sans enjeux dramatiques et qui se sabote toujours par un humour foiré.
Avec son casting désincarné et fatigué, Paul Rudd et Evangeline Lilly n'ont jamais paru aussi absents, et sa réalisation désastreuse entre une photographie terne, des effets spéciaux catastrophiques, pas aidé par une DA insipide, font de Ant-Man and the Wasp: Quantumania un ratage dans les grandes largeurs. Le MCU n'aura jamais paru aussi paresseux et laid, en grande partie dû à la mise en scène insignifiante de Peyton Reed, et qui ne sert que d'écrin à un scénario sans relief et mal exécuté. Le premier vrai signe de trépas d'une entreprise qui a vraiment perdu de son éclat et une mise en bouche ratée à sa nouvelle phase.

Marlowe
4.7

Marlowe (2022)

1 h 49 min. Sortie : 15 février 2023. Policier, Thriller, Film noir

Film de Neil Jordan

Flaw 70 a mis 4/10.

Annotation :

Neil Jordan apparaît fatigué alors qu'il signe avec Marlowe un film noir ronflant et peu inspiré qui se love dans les clichés du genre sans jamais parvenir à apporter quoique ce soit d'intéressant ou d'un tant soit peu inédit.
Partant d'un scénario confus et prévisible, qui vient articuler toute les figures attendus de ce genre de thriller hard boiled entre la femme fatale énigmatique au détective désabusé en passant par le mafieux sans scrupules. Corruption, complot, disparition, tout y passe dans un film qui ne cherche jamais vraiment à faire évoluer un genre extrêmement codifié et qui fut exploité par Hollywood depuis près de 70 ans. Et sur tout ces aspects, on se retrouve face à un thriller vieillissant qui joue le pastiche de grands films qu'il évoque, singe et contemple sans jamais parvenir à les émuler. On s'ennuie donc assez vite devant une écriture peu imaginative qui se contente d'exécuter son intrigue de manière purement fonctionnelle. Pas aidé par des acteurs peu engagés, entre une Diane Kruger absolument pas crédible dans le rôle de femme fatale et un Liam Neeson définitivement trop vieux pour ses conneries et qui ne fait plus illusions en gros dur. Le tout est aussi enlisé dans une mise en scène pataude de Neil Jordan. Même si le niveau de production s'avère respectable, entre une reconstruction d'époque solide et une photographie suffisamment léchée pour nous embarquer dans l'atmosphère de son récit, l'ensemble manque quand même d'énergie et de point de vue pour vraiment parvenir à offrir un spectacle visuel qui vaut le détour. Ici les quelques éclats de violences reste maîtrisés mais trop didactiques pour donner au film le coup de fouet nécessaire.
Marlowe est un film usé, vieux et radotant qui s'avère assez à l'image de son acteur principal qui semble coincé dans une boucle temporelle qui l'empêche soit d'évoluer soit de reconnaître qu'il est tant de raccrocher les armes. On est face à un film d'artistes fatigués, qui ne savent ni quoi raconter ni comment le raconter et se contente de regarder le film noir de la grande époque en espérant retrouver sa formule sans jamais y croire.

Sharper
6.2

Sharper (2023)

1 h 56 min. Sortie : 17 février 2023. Drame, Thriller

Film de Benjamin Caron

Flaw 70 a mis 7/10.

Annotation :

Film d'arnaques assez attendu, Sharper n'en reste pas moins un thriller rondement mené et efficace qui profite d'un casting prestigieux parfaitement investi.
Prenant le temps de bien posé ses personnages, le film prend une forme assez didactique dans sa construction narrative. Même si il n'est jamais aussi intelligent qu'il aimerait l'être, ni même vraiment surprenant, en posant des personnages complexes et leur laissant la place d'occuper le récit, il parvient à maintenir l'intérêt grâce à un point de vue loin d'être inintéressant. Se souciant moins des rouages de son arnaque et plus des individus qui la peuple, c'est par l'attachement que l'on formera avec ces derniers que le scénario gagne en intérêt. Même avec ces figures les plus antipathiques, le film joue la carte de l'empathie pour mieux mettre en relief une exécution froide et une mentalité retors de ses personnages. L'ensemble aurait peut-être pu se complexifier un peu, mais le film privilégie la lisibilité pour mieux nous immerger dans son intrigue. Le tout est accompagné par d'excellents acteurs qui livrent tous des performances appliquées et stimulantes dans un jeu de dupes souvent maîtrisé.
Aidé par la réalisation léchée et la mise en scène sophistiqué de Benjamin Caron, qui arrive à créer une vraie atmosphère par ses plans minutieux et des jeux assez habile avec les lumières et couleurs froides. Sharper suit un rouage bien huilé et s'impose comme un film réussi et maîtrisé qui ne surprend jamais vraiment ni ne réinvente son genre mais parvient à lui donner une perspective assez rafraichissante. Un bon thriller.

La Femme de Tchaïkovski
6.6

La Femme de Tchaïkovski (2022)

Zhena Chaikovskogo

2 h 23 min. Sortie : 15 février 2023 (France). Drame, Biopic

Film de Kirill Serebrennikov

Flaw 70 a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Cinéaste contestataire, Kirill Serebrennikov continue à dessiner les atours d'une Russie qui vogue vers la folie suite à son histoire complexe et ancrée dans une fierté maladive. Après son brillant et exigeant Petrovy v grippe qui examinait cette fièvre contagieuse dans une œuvre alerte et allégorique, il décide ici d'avoir une approche plus linéaire alors qu'il s'intéresse à une figure artistique majeure de Russie.
Film biopic qui est plus intéressé par la symbolique de son sujet que son sujet en lui-même, Serebrennikov signe un film personnel où il explore la vie de Tchaïkovski à travers les yeux de sa femme. Une femme éprise de son mari à la folie et qui se retrouve prisonnière d'une mariage mensonger alors qu'elle refuse d'admettre l'homosexualité de son mari. Artiste ouvertement gay, dans un pays où une telle chose est encore très mal vu et dangereuse, Serebrennikov dresse des parallèles passionnants entre son propre vécu et celui de ce mariage nocif. Explorant sa propre relation à son pays, tellement gangrené par sa propre fierté qu'il est terrorisé par ce qui pourrait lui apporter de la honte et du déshonneur. Ayant une vision très spécifique de la virilité et de la place des genres, le mariage au centre du récit n'en devient qu'une parabole de la vision d'une Russie conservatrice et inquisitrice. Dressant à travers cela, deux portraits absolument passionnants de ses protagonistes dont il nous immerge dans la folie grandissante d'une femme délaissée et dont l'amour ne peut être réciproque.
Fascinant de bout en bout, malgré un récit qui accumule certaines longueurs évidentes, le film brille aussi par la mise en scène audacieuse de Kirill Serebrennikov qui aborde son histoire avec une poignée d'idées formelles saisissantes. Transformant son biopic en une errance cauchemardesque tétanisante, il rond l'académisme de son sujet pour en tirer une œuvre dans l'obsession formelle de son cinéma. Il signe un film rugueux et sans concessions, et même si il se montre un peu plus linéaire et accessible que son précédent film il n'en sacrifie jamais l'exigence de sa démarche. Prouvant encore une fois qu'il est le cinéaste Russe le plus pertinent et passionnant en activité, Serebrennikov fait de ce Zhena Chaikovskogo un film magistral. Parfois un peu trop long pour son propre bien, mais indéniablement stimulant et porté par un casting exemplaire. Une très forte réussite.

The Fabelmans
7.3

The Fabelmans (2022)

2 h 31 min. Sortie : 22 février 2023 (France). Drame, Biopic

Film de Steven Spielberg

Flaw 70 a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Steven Spielberg se lance dans l'œuvre semi-autobiographique alors qu'il contemple son adolescence et sa passion grandissante pour le cinéma au sein d'une famille en décomposition.
A la fois hommage au 7e Art et portrait testamentaire de ses parents, le cinéaste offre un film qui essaie de montrer la complexité d'une relation qui navigue entre l'amour et le désamour. Montrant l'obsession passionnelle pour un art comme une malédiction qui inévitablement coupe les liens avec le cercle familial. Pourtant, à vouloir trop être compatissant envers lui-même et ses parents, le film peine parfois à faire ressentir l'ambiguïté tragique qui émane d'une histoire qui évoque avant tout une séparation. L'ensemble manque de recul sur son sujet et il plane une nostalgie rassurante et réconfortante qui peine à s'imposer comme le récit doux-amer qu'il aimerait être. De plus, l'ensemble s'avère beaucoup trop long et on tombe dans une seconde moitié beaucoup moins pertinente et qui traîne en longueurs en raison de tropes narratifs bien trop évidents. La manière dont Spielberg aborde la question du bullying s'avère bien trop simpliste et indulgente pour vraiment paraître pertinente.
Le tout déborde néanmoins d'énergie et d'humour et rend l'ensemble particulièrement généreux et galvanisant. Le casting est excellent, dont la révélation Gabriel LaBelle qui livre une performance sans fausse note mais aussi la déchirante Michelle Williams, et Steven Spielberg est comme toujours très à l'aise derrière une mise en scène ample et sophistiqué même si ici plus ancrée dans un académisme un peu moins impressionnant. Le savoir faire du cinéaste y est toujours insolent, mais ces tics formelles sont tellement attendus qu'on le sent par moments en pilotage automatique. The Fabelmans est donc une vraie réussite même si il est aussi symptomatique d'un cinéma qui s'est transformé en institution et qui peine désormais à explorer de nouveaux horizons. Même si il nous embarque toujours, Spielberg ne surprend plus et il livre un film admirable mais attendu qui témoigne d'une technicité virtuose mais d'émotions simplistes qui peine à vraiment transcender l'ensemble. De quoi apprécier le voyage mais aussi être nostalgique de l'époque où le cinéaste savait prendre des risques.

Infinity Pool
5.8

Infinity Pool (2023)

1 h 57 min. Sortie : 1 novembre 2023 (France). Épouvante-Horreur, Science-fiction, Thriller

Film de Brandon Cronenberg

Flaw 70 a mis 6/10.

Annotation :

Suivant la ligne directrice de son cinéma, Brandon Cronenberg parvient à s'émanciper de l'ombre de son père et marque son style qui se définit par une approche froide et presque clinique.
Assez loin de l'organique qui aura fait la marque de fabrique de son père, Cronenberg fils partage néanmoins l'amour du bizarre et les fulgurances de body horror. Avec ce Infinity Pool, il livre une étrange étude autour de la mégalomanie alors qu'il questionne sa propre condition d'artiste dans une œuvre paradoxale. Aussi pertinente qu'imbu d'elle-même, son écriture dresse un portrait acide d'une bourgeoisie vaine et qui s'ennuie au point de ne trouver intérêt que dans la violence par la domination d'autrui. Politique sans pour autant arriver à donner un vrai propos à son récit, le film marque surtout par son ambiance entre deux eaux tantôt aussi terre à terre que d'un onirisme radical. Par la mise en scène sophistiquée et très expérimentale de Brandon Cronenberg, qui vire presque dans le clipesque, le film possède quelques visions audacieuses qui marque durablement la rétine. Mais l'ensemble souffre aussi d'un rythme trop lent pour pleinement maintenir l'intérêt.
Avec son excellent casting, Alexander Skarsgård dans son meilleur rôle et Mia Goth intense comme à son habitude, Infinity Pool s'impose comme une curiosité intrigante et efficace à défaut de posséder ce petit quelque chose qui pourrait vraiment le rendre fascinant. Il permet néanmoins à Brandon Cronenberg de continuer à s'affirmer comme un cinéaste atypique et intéressant qui pourrait bien se construire une filmographie passionnante.

We Have a Ghost
5.2

We Have a Ghost (2023)

2 h 06 min. Sortie : 24 février 2023. Aventure, Comédie, Épouvante-Horreur

Film de Christopher Landon

Flaw 70 a mis 3/10.

Annotation :

Avec un cinéma très peu basé sur la subtilité et dont la majeure partie se compose de films concepts un peu facile adressés à un public de réseaux sociaux enclin à se construire autour d'une communauté, Christopher Landon continue dans sa démarche avec un buddy movie fantastique.
Il est donc assez drôle de voir à quel point ce We Have a Ghost tente de se retourner contre son public alors qu'il se sert de son histoire de fantôme pour montrer des personnages abrutis par une course au buzz dans une société où faire fortune repose sur la présence médiatique. Très mal écrit et condescendant dans son approche, le film plonge aussi assez souvent dans ce qu'il dénonce tant il arbore la même exubérance dans le portrait de ses personnages qui possèdent tous une caractérisation assez terrible. Jamais drôle, pour ne pas dire vraiment gênant, le film échoue aussi à aborder les relations père-fils avec une vraie sincérité et enchaîne un récit prévisible, qui se perd dans plusieurs directions et tente un mélange des genres maladroit qui ne prend jamais vraiment.
En plus de son casting peu investi voire même carrément mauvais pour les acteurs plus jeunes, c'est surtout Christopher Landon qui démontre son manque de savoir-faire avec un sens du rythme déplorable, le film accumule les longueurs, mais aussi une mise en scène sans envergure et point de vue qui donne à l'ensemble un aspect téléfilm baveux pas aidé par une réalisation technique particulièrement pauvre. We Have a Ghost s'impose donc comme une comédie ringarde et jamais drôle qui souffre d'un manque de talent évident dans chaque aspects de sa conception. A éviter.

Empire of Light
6.5

Empire of Light (2022)

1 h 59 min. Sortie : 1 mars 2023 (France). Drame, Romance

Film de Sam Mendes

Flaw 70 a mis 5/10.

Annotation :

Continuant son approche plus personnelle de son cinéma, étant le deuxième film où il en est aussi le scénariste, Sam Mendes démontre qu'il est plus doué en metteur en scène que pour tisser son histoire et il signe là son œuvre la plus faible.
Très confus dans sa narration, voguant entre des sous-intrigues et des thématiques qui ne se lient pas toujours harmonieusement entre elles. Ses personnages n'en deviennent donc que des stéréotypes pour porter ses idées scénaristiques plutôt que de parvenir à être des individus auquel on peut apporter une certaine identification. Plongeant dans des tropes même surannés dans le portrait de sa protagoniste, notamment les idées préconçues autour d'une figure féminine hystérique comme seul moyen de définir les maux qui l'habite. Il n'est pas non plus des plus fins lorsqu'il aborde le racisme avec un manichéisme idiot sans prendre en compte la complexité et la sournoiserie du racisme institutionnalisé. Le film ne prend jamais vraiment la pleine mesure des problématiques qu'il aime à exposer et se perd dans une écriture naïve et simpliste qui par son manque de focus atténue ses plus beaux moments, lorsqu'il aborde le cinéma.
Néanmoins avec sa photographie chaleureuse et inspirée, ainsi qu'un score musical enivrant de Trent Reznor et Atticus Ross, Empire of Light reste un engageant spectacle formel. Même si la mise en scène de Sam Mendes reste plutôt discrète par son classicisme un peu suranné, elle permet d'apporter une atmosphère qui fait son effet. Avec en plus un casting très solide, ce Empire of Light est loin d'être un raté mais il apparaît bien plus confus et inabouti que les autres films de son auteur. Sam Mendes a clairement un coup de mou et son Empire of Light restera comme un divertissement moyen et qui manque de profondeur.

Creed III
5.9

Creed III (2023)

1 h 56 min. Sortie : 1 mars 2023 (France). Drame, Sport

Film de Michael B. Jordan

Flaw 70 a mis 6/10.

Annotation :

Avec ce Creed 3, Michael B. Jordan prend définitivement la place de Stallone alors que ce dernier raccroche les gants et que le jeune acteur lui se lance dans la réalisation posant sa patte sur la franchise.
Il faut reconnaître pourtant que le film ne brillera pas par son scénario efficace mais attendu car il exploite une formule éculée qu'il ne vient jamais pleinement bousculé. Mais en étant plus resserré que le deuxième opus avec des enjeux plus intimes, on se retrouve face à une suite plus aboutie et plaisante qui bénéficie de ses personnages attachants ainsi qu'une rivalité centrale plus nuancée qu'escompté et qui arrive à apporter une vraie réflexion autour du contexte social de ses personnages. Le tout est en plus tenu par un casting exemplaire dont chacun parvient à livrer des performances solides et engageantes. Mais c'est par sa réalisation fluide et tonique que le film impressionne le plus, sans pour autant avoir encore la maîtrise d'un Ryan Coogler, Michael B. Jordan signe une mise en scène punchy lors d'affrontements de boxes homériques et parfois même plutôt inventifs. Puisant son inspiration dans l'animé japonais, il filme son action près des corps pour mieux en saisir la violence et la rapidité des coups, n'hésitant pas non plus à jouer avec ses décors ou quelques effets de styles plutôt bien digéré. Même si il se montre peut-être un peu plus pantouflard sur les scènes en dehors du ring, Michael B. Jordan s'offre un début prometteur en tant que réalisateur.
Sans révolutionner la franchise ni chambouler la formule du film de boxe, Creed 3 s'impose quand même comme un divertissement efficace. Rythmé, évitant les digressions narratives, on est face à un film qui va droit au but avec le plus d'énergie possible. On passe donc un agréable moment devant un film qui n'a certes pas la force de frappe du premier opus mais qui est définitivement plus appréciable que le décevant deuxième épisode.

Magic Mike - Dernière danse
5.1

Magic Mike - Dernière danse (2023)

Magic Mike's Last Dance

1 h 52 min. Sortie : 14 juin 2023 (France). Comédie dramatique

Film de Steven Soderbergh

Flaw 70 a mis 6/10.

Annotation :

Magic Mike avait été une parenthèse efficace mais mineur dans la filmographie de Soderbergh qui avait pourtant su livrer un film plus sensible qu'escompté. Ayant laissé les rênes d'un deuxième opus peu inspiré, il revient pour clôturer la trilogie et offrir une sortie honorable à son protagoniste.
Sans bousculer les codes de la franchise, le cinéaste parvient néanmoins à la faire bifurquer dans une direction plutôt rafraîchissante. Aidé par un script très attendu mais plutôt bien tenu, le film profite d'une écriture incisive grâce à des dialogues bien senties et une exploration mature et tendre de ses personnages. On regrettera peut-être un humour qui ne fait pas toujours mouche, ou une narration en voix-off redondante mais l'ensemble possède suffisamment de cœur et de sincérité pour nous embarquer malgré un manque d'enjeux émotionnels assez évident. Mais toujours tenu par un casting exemplaire dont un toujours charismatique et sensible Channing Tatum mais aussi une Salma Hayek qui n'avait pas été si inspiré depuis bien longtemps. C'est surtout avec son approche très stylisée que Steven Soderbergh réinjecte de l'intérêt dans son film grâce à une mise en scène sophistiquée et torride qui donne à l'ensemble un cachet évident. Favorisant les plans longs et fixes pour permettre à ses acteurs ou leur chorégraphies d'imprégner une séquence, il signe une direction à contre-temps de son sujet qui démontre encore le savoir-faire et l'intelligence de son approche.
Magic Mike's Last Dance s'impose donc comme un divertissement habilement filmé et très bien joué tout en profitant d'une histoire simple mais efficace. Tout aussi mineur que le premier et second film, il reste une nette amélioration par rapport à son prédécesseur grâce au regard consciencieux de son cinéaste. Clairement pas un grand cru dans la carrière de Soderbergh mais un agréable moment.

The Son
6.2

The Son (2022)

2 h 03 min. Sortie : 1 mars 2023 (France). Drame

Film de Florian Zeller

Flaw 70 a mis 7/10.

Annotation :

Après un sidérant The Father, Florian Zeller continue à ré-explorer sa trilogie théâtrale par le prisme du cinéma et s'attaque à sa pièce, Le Fils, dans une adaptation solide mais plus encline à sombrer dans les défauts de son matériau d'origine.
Avec The Father, grâce à un savant jeu de montage, le jeune cinéaste était parvenu à transcender le concept de sa pièce pour la matérialiser en audacieuse œuvre de cinéma. Bien plus classique dans son approche, cette seconde adaptation ne possédera jamais la même intelligence de regard et de structure la laissant en drame plus étalé et parfois plus redondant. Même si le regard sur le fossé qui se crée entre un parent et son enfant s'avère souvent pertinent et exposé avec beaucoup de savoir-faire et de sincérité, le film se fera moins grâcieux quand il aborde la question de la dépression. Assez lourd, et très friand d'un pathos forcé et envahissant, le film cède souvent à des séquences moins inspirées qui tranchent avec ses plus belles envolées. Le cheminement n'en sera que plus attendu et impressionnera beaucoup moins. Même si la mise en scène de Florian Zeller garde son regard acéré, notamment dans sa façon de s'approprier l'espace familial et de jouer sur les distanciations grâce à quelques idées de plans particulièrement inspirées.
Mais l'ensemble se fait plus linéaire et académique en reposant surtout sur l'excellence de son casting avec en tête une Laura Dern habitée et un Hugh Jackman à son meilleur. The Son s'impose donc comme un mélodrame solide mais un peu trop agressif sur le tire-larmes pour son propre bien. Sans ternir l'intelligence du regard de Florian Zeller, ce dernier est loin du coup de génie de son précédent film et signe une œuvre plus attendue et bien moins marquante.

The Whale
6.8

The Whale (2022)

1 h 57 min. Sortie : 8 mars 2023 (France). Drame

Film de Darren Aronofsky

Flaw 70 a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Darren Aronofsky aura pris son temps après son déroutant mother! pour revenir avec un nouveau film. Il réalise d'ailleurs cette fois-ci un long-métrage qu'il n'aura pas directement écrit mais qui possède tout de même toutes ses obsessions.
Si on devait rapprocher ce The Whale à une autre œuvre de sa filmographie, on penserait directement à The Wrestler tant on y retrouve le cœur d'une relation père-fille déchiré par les événements, des personnages pris au piège d'un corps meurtri dont leurs morts est déjà annoncées ainsi qu'une réflexion métaphysique autour de la figure du martyr et de la crise de foi. Et sur bien des aspects, ce The Whale souffrira un peu de ses comparaisons tant on est sur une œuvre parfois plus grossière et agressive qui peine à atteindre le même niveau d'état de grâce. On retrouve aussi cette volonté de remettre sur le devant de la scène un acteur déchu pour puiser le propos dans ce parcours métaphorique. Ici traitant du manque et du traumatisme par le besoin de combler le vide par l'abondance, le film flirte avec une vision de l'obésité presque surréaliste tirant l'ensemble vers une fable à l'imagerie étonnamment satisfaisante. Mais si certains s'offusqueront d'une représentation pouvant être jugé problématique, c'est autre chose que le cinéaste aborde à travers cette vision extravagante du corps. C'est la théologie qui ici se mue en atrocité obsessionnelle à en devenir une baleine théorique sur laquelle son protagoniste se heurte et cherche les réponses à son malheur.
Profondément humain lorsqu'il est au contact de ses personnages, le scénario se montre touchant et humble malgré les tics parfois lourdingues d'Aronofsky. Sa mise en scène pleine d'emphase ne se marie pas toujours très bien à son sujet ici malgré des idées formelles parfois intelligemment amenées. Savamment construit et formidablement bien joué, on retrouve l'attachant Brendan Fraser dans son meilleur rôle avec une performance aussi candide qu'intense, ce The Whale souffrira surtout d'une approche qui manque de subtilité pour pleinement parvenir à s'extirper de ses errances. Reste un film particulièrement solide mais légèrement plus mineur au sein de l'œuvre d'Aronofsky.

Scream VI
5.1

Scream VI (2023)

2 h 03 min. Sortie : 8 mars 2023 (France). Épouvante-Horreur, Thriller

Film de Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett

Flaw 70 a mis 3/10.

Annotation :

Suite à un 5e opus qui avait quelque peu revitaliser la franchise, il n'aura pas fallu attendre longtemps pour voir un nouveau film Scream sur nos écrans. Composé de la même équipe devant et derrière la caméra que le précédent film, ce 6e épisode cherche à bouleversé les codes de la saga en se séparant de son iconique héroïne et déplaçant son action à New York.
Il faut reconnaître que le postulat s'avère plutôt intéressant, renforcer par une très bonne séquence d'introduction qui tire habilement profit de ce ludisme à vouloir déstabiliser le spectateur par son approche inattendu. Mais passer le premier quart d'heure, le récit va très vite retrouver les rails confortables de sa formule et se laisser guider en pilotage automatique jusqu'à sa conclusion. Retrouvant le même ratio de personnages crétins juste bons à être de la chair à canon, le film se montre même prévisible voire carrément timides quand à qui va ou non mourir. Moins couillu que le précédent mais aussi bien plus programmatique dans son exécution, on se retrouve face à une suite qui perd l'aspect régressif de ses critiques méta d'un paysage cinématographique très contrasté dans la sphère horrifique. Très premier degré dans son approche, cette suite perd beaucoup du fun initiale de la franchise et manque d'un casting suffisamment charismatiques pour tenir la barre. Le jeu des acteurs est très approximatif et la caractérisation stupide des personnages n'aident pas à palier ce défaut. De plus on devine assez vite qui sont les personnes à se cacher derrière le masque de Ghostface.
La réalisation reste correct, avec sa photographie soignée, mais la mise en scène de Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillet ne tire pas assez profit de leur nouveau terrain de jeu. Les mises à mort finissent par toute se ressembler et malgré le côté gore toujours aussi viscérales, le côté déjà vu et répétitifs des scènes d'attaques tendent à manquer cruellement d'imagination. Scream VI s'impose donc comme une mauvaise suite. Qui malgré sa promesse de casser les codes de la franchise finit par si lover de manière plus agressive que jamais au point d'en émuler les faiblesses plus que les qualités. Dépassé, répétitif et mal écrit, on est face à un opus particulièrement antipathique qui démontre que la saga n'a finalement plus rien de bien à offrir.

Women Talking
6.3

Women Talking (2022)

1 h 44 min. Sortie : 8 mars 2023 (France). Drame

Film de Sarah Polley

Flaw 70 a mis 8/10.

Annotation :

Il aura fallu attendre plus de 10 ans pour que Sarah Polley retourne à la réalisation et en s'attaquant au roman de Miriam Toews, elle trouve là l'écrin parfait pour signer un film au sujet actuel et d'offrir son meilleur travail à ce jour.
Jouant habilement la temporalité trompeuse de son récit, la cinéaste accouche d'un scénario très littérale voire même théâtrale dans son sens du verbe et du statisme. Même si la structure tant parfois à accuser une certaine lourdeur vis à vis de l'exécution, elle correspond bien face au propos du film et de l'indécision humaine. Quand il est question de survie et de changement, c'est là où les décisions sont les plus difficiles à prendre. Montrant comment la question du choix, embourbé dans la peur des institutions et des idéologies religieuses, devient une prison qu'on exerce à soi-même. On regrettera peut-être que le film ne s'essaie pas vraiment à bousculer ou contredire ces idées, préférant souvent la fuite à la confrontation, mais il devient vite évident que c'est la question de débat et du collectif qui vient surtout l'intéresser.
En ça, le film se montre d'une finesse imparable pour traiter le drame humain qui s'y joue et donner une dimension fédératrice à son histoire de solidarité et d'émancipation. Habité en plus par un casting irréprochable, où chaque actrices livrent des performances admirables de justesse, le film possède aussi une réalisation sobre mais sophistiqué qui permet à Sarah Polley de construire une mise en scène classique mais dynamique, élevée par une très bonne composition musicale. Women Talking s'impose donc en film très solide et galvanisant par son regard sur la sororité et sur sa façon très juste d'aborder les violences faites aux femmes.

Crazy Bear
4.9

Crazy Bear (2023)

Cocaine Bear

1 h 35 min. Sortie : 15 mars 2023 (France). Comédie, Thriller, Policier

Film de Elizabeth Banks

Flaw 70 a mis 6/10.

Annotation :

Avec son troisième film en tant que réalisatrice, Elizabeth Banks louche dans la direction du ton décalé de la parodie à la Wet Hot American Summer et le slasher camp des années 80 alors qu'elle s'inspire très librement d'un fait divers d'un ours sous cocaïne.
Le postulat s'avère assez loufoque pour qu'on se prête assez volontiers à l'exercice. Et il faut reconnaître que la réalisatrice offre un spectacle suffisamment généreux pour qu'on trouve de quoi s'amuser. Malgré tout, le film se heurte assez vite à la limite de son scénario. A trop vouloir multiplier ses personnages et ses sous-intrigues, l'ensemble se dilue dans un récit parfois décousue qui nous mène de scénettes en scénettes à l'intérêt variable. Malgré un humour souvent bien sentis et qui fait mouche, ainsi que quelques protagonistes un peu plus attachants, le tout peine à vraiment susciter l'attention sur toute la durée et ce notamment dans un climax particulièrement bancal.
Le casting reste plutôt honorable sans être transcendant tandis que la réalisation s'avère techniquement assez solide. Sans être un exemple de CGI, l'ours reste convaincant tandis qu'on peut compter sur quelques effets gore plutôt bienvenus. Elizabeth Banks signe une mise en scène appliquée et parfois ingénieuses dans sa façon de digérer ses influences de slasher. L'emballage est sympathique et permet sans mal à ce Cocaine Bear de s'imposer comme un divertissement inoffensif mais pas déplaisant malgré son écriture peu inspirée.

65 - La Terre d'avant
4.2

65 - La Terre d'avant (2023)

65

1 h 33 min. Sortie : 15 mars 2023 (France). Science-fiction, Thriller

Film de Scott Beck et Bryan Woods

Flaw 70 a mis 3/10.

Annotation :

Voulant voguer sur le succès de A Quiet Place, dont ils avaient participer à l'écriture du scénario, Scott Beck et Bryan Woods cherche à réexplorer le genre de la science-fiction intimiste dans un film à mi-chemin entre le survival et le mélodrame.
Le problème étant que faute à une écriture inconsistante et qui ne parvient jamais vraiment bien à établir ses personnages, on se retrouve face à un récit inintéressant au possible. Les enjeux dramatiques sont d'une maigreur affolantes tandis que le film repose intégralement sur des clichés vieux de 10 ans quand à sa relation progressive entre une figure paternelle en deuil se devant protecteur d'une fille de substitution. Le tout s'avère paresseux et peu inventif dans son postulat et jamais le film ne prendra le temps de vraiment bousculer ses codes. La partie dramatique en sera donc particulièrement amoindrit, pas aidé par un casting sans alchimie et dont Adam Driver semble même regretté sa présence tant il n'apporte ici aucun effort.
Le tout nous agresse aussi avec un score musical débordant de pathos et qui donne à la bande son un aspect particulièrement antipathique. Mais il faut reconnaître que la réalisation technique n'aide jamais le film en raison de son rendu très cheap. Même si les effets spéciaux restent honorables, c'est la photographie pâlotte et le montage indigeste qui achève le tout. La mise en scène de Scott Beck et Bryan Woods manque de coffre et donne un aspect très amateuriste dans son sens du découpage hasardeux et quelques moments d'actions et de spectacle qui témoignent d'un manque flagrant d'imagination et de savoir-faire. 65 s'impose donc en ratage évident tant aucun des éléments qui le constitue ne parviennent à fonctionner. Son casting est aux fraises, sa réalisation très pauvre et son écriture transpire l'opportunisme en essayant juste de composer des éléments populaires et surfer sur des tropes issues d'œuvres bien plus appliquées.

Flaw 70

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