La crise économique de 2008 fit beaucoup de mal, c'est certain, marquant l'histoire à l'or blanc. De l'évènement découlent, depuis peu, les oeuvres de circonstance, traitants le sujet sur plusieurs axes et dans plusieurs médias : livres, films, théâtre ...
C'était sans compter sur Bethesda, toujours sur la brèche, mettant une fois de plus main à la pâte pour délivrer une vision personnelle des choses sur nos PC et consoles favorites. Après avoir traité le problème de la prise de substances subreptices dans Morrowind, de l'émouvant biopic du cheval-tracteur dans Oblivion et de la vie de Nicolae Ceaușescu dans Fallout 3, Bethesda s'attellera à son plus vaste projet, synthétiser la crise du siècle en jeu vidéo. Un pari risqué, mais relevé avec brio par l'équipe de Todd Howard, comme nous allons le découvrir ensemble.

La scène d'ouverture démarre avec une présentation sommaire de son avatar, un jeune banquier, poings et pieds liés, traîné sur la place publique en charrette pour y être exécuté. Lorsque arrive le funeste couperet, tranchant vers le bas, le jeune cadre et ses fidèles acolytes se voient sauvés par un dragon tout en splendeur, crachant son terrible râle enflammé sur la légion impériale. Impossible de ne pas voir en filigrane le plan de sauvetage des banques européennes balayer d'un revers de manche les grandes institutions et autorités financières mondiales.
Au nez et à la barbe des badauds, notre héros réussira à s'en sortir grâce à l'aide de ses camarades, se couvrant les uns les autres.

La dette s'étant accumulée, le monde subira petit à petit des changements. Une guerre, judicieux ersatz de la récession, sème pauvreté et désolation dans un monde déjà victime d'un froid bourru. Pour notre argentier, pas une seconde à perdre : si l'on veut survivre, il faut prendre l'argent où il se trouve, chez les contribuables. Commencera alors la quête de toute les richesses. Le chaland s'agitera de donjons en donjons (vous l'aurez compris, le logis du citoyen) pour piller richesses, économies, et ainsi vivre dans l'opulence, en vue de rembourser son tribut au roi dragon.

Il est intéressant de noter une des features du jeu que l'on découvre bien tôt dans la partie : les cris de dragon. Cette aptitude, que l'on apprend chez de vieux banquiers infâmes vivants perché au sommet d'une montagne, permet de crier des obscénités à toute personne nous faisant obstacle. Il est ainsi possible de littéralement "gueuler" sur les pauvres bougres défendant farouchement leurs dîmes, les miséreux ayant à peine de quoi payer leurs deuxième tier provisionnel.
Cette faculté est bien entendu une critique sociale virulente à l'encontre des puissances institutionnelles : les hommes, aussi haut placés soit-ils — si l'on prend en compte une quelconque hiérarchisation professionnelle —, possède-t-ils le droit d'élever la voix sur son prochain pour arriver à ses fins, les hommes demeurant identiques ?
Autre fait intéressant, le délicieux pastiche des elfes noirs Thalmors du Domaine Aldmeri, personnification même du gouvernement Chinois tentant de mettre la main sur une partie de la dette mondiale. Les Thalmors qui, dans un trait d'humour, sont également bridés.

Bethesda est donc parvenu à un tour de force, celui-ci de raconter la crise, simplement, sous forme d'une légende historique, usant des codes de l'univers fantastique de l'imaginaire collectif. Une réinterprétation osée, voir même culottée, que s'est approprié le studio avec maestria et qui, on l'espère, ne sera pas la dernière.
Eter
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le 29 nov. 2011

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