Après un Lara Croft & The Temple of Osiris particulièrement insipide, c’est peu de dire que je me suis jeté empli d’un enthousiasme débordant dans ce nouvel épisode canonique. Avec un peu de fébrilité aussi, toutefois !


Car son prédécesseur, le reboot de la saga sorti en 2013, ne m’avait pas particulièrement marqué. Une Lara transformée en punching-ball qui passait son temps à en prendre plein la gueule / se faire transpercer la couenne / hurler de douleur, une orientation action très/trop marquée qui enlevait tout le plaisir de l’exploration, mais aussi une facilité déconcertante m’avaient laissé un goût assez amer de ce retour de l’exploratrice anglaise sur le devant de la scène.


Toutefois, la direction artistique avait retenu mon attention. Plus adulte et sérieux, cet épisode avait surtout introduit une Lara Croft beaucoup plus humaine, avec ses faiblesses et des mensurations enfin acceptables. Terminés les boobs aux dimensions d’obus, adios les lèvres tellement botoxées qu’elles prenaient la moitié de son visage. Il faut croire que, jusqu’au reboot, l’idéal féminin des développeurs était Lolo Ferrari...


Après avoir suivi une formation de survie en territoire très hostile dans l’épisode précédent, qu’attendait donc la jeune exploratrice dans Rise of The Tomb Raider (RotTR) ?


Après un bref passage en Syrie, Lara se lance dans une longue escapade en Sibérie sur les traces de son père et en prolonger les recherches. Et autant dire que le scénario concocté par Crystal Dynamics ne brille pas par son originalité.
À dire vrai, les moments scénarisés sont les moins intéressants du jeu. Alors que les clichés s’enchaînent, les rebondissements n’en finissent plus de ne pas surprendre. Le doublage français est assez déplorable puisque les voix peinent à convaincre. Si ce doublage a le mérite d’exister, difficile de s’en contenter quand les doubleurs semblent tellement peu au courant de ce qu’ils doublent qu’on ne croit pas en leur jeu. Bref, l’histoire et son déroulé ne vous laisseront pas un souvenir impérissable.


Pour couronner le tout, les développeurs s’évertuent à essayer d’offrir des séquences de type « roller coaster » dignes d’un Uncharted. Si dans la plupart des cas le joueur se laisse prendre au jeu, impossible de ne pas déplorer ce choix qui consiste à copier et proposer en moins bien ce qu’un autre excelle à faire.


C’est d’autant plus dommage que cette suite, au même titre que le reboot de 2013, possède des points forts remarquables qui le distinguent de la saga de Naughty Dog.


Tout d’abord, le jeu reprend le principe d’évolution progressive par acquisition d’expérience dans un monde semi-ouvert, avec ses objets à récupérer partout, ses arbres de talent et ses moments de « survie » où l’on chasse et fouine partout pour découvrir des secrets. Le jeu a un parfum de liberté dont sont totalement exempts les jeux de Naughty Dog.


Les zones restent assez cloisonnées mais l’illusion fonctionne. On peut au final zapper un nombre important de chemins, temples et zones annexes si l’on se contente de suivre l’objectif principal.


Par contre, l’aspect survie disparaît assez vite du fait de la puissance que va rapidement développer Lara. Comme dans le premier volet, l’héroïne va rapidement devenir une machine de guerre.


J’ai lancé le jeu en mode survivant (qui correspondrait, au vu des modes proposés, à du très difficile). Dans ce mode, Lara meurt plus vite et les ennemis doivent prendre plus de balles dans le buffet avant de crever.
Toutefois, à l’exception de deux moments problématiques, du fait d’un nombre important d’ennemis balèzes, il n’y a pas grand-chose à craindre. Le jeu ne m’a pas semblé particulièrement ardu. Certaines aptitudes disponibles dès le début de l’aventure, comme les flèches empoisonnées, sont tellement efficaces que vous ferez une razzia dans les rangs ennemis.


Comme dans le premier volet, j’ai peu goûté de ces moments furieux où une jeune femme tient tête à une armée, seule. En outre, les gunfights ne présentent pas d’intérêt.
En revanche, les moments d’exploration et la découverte des tombeaux incarnent tout ce que l’on est en droit d’attendre d’un jeu Tomb Raider. Certaines zones sont vraiment impressionnantes et feraient presque oublier le manque de variété dans les décors. Au contraire d’un Uncharted, vous ne voyagerez pas beaucoup. Mais vous en prendrez pour une trentaine d’heures, voire bien plus si vous voulez tout trouver, ce qui est plus qu’honorable.


Ce nouvel épisode souffle donc le chaud et le froid. Il est d’ailleurs impossible d’en ressortir totalement satisfait, tant le jeu semble déjà toucher les limites de la formule choisie par Crystal Dynamics depuis le reboot. A peine deux épisodes sortis qu’il est déjà temps de révolutionner le modèle. En effet, le prochain volet ne pourra se contenter de nous balancer à nouveau dans une zone vaste en nous demandant de remplir à nouveau ce même arbre de talents.


Si une saga comme Uncharted a pu s’étaler sur cinq volets (en comptant l’épisode Vita) sans réellement changer la formule puisque les développeurs n’avaient qu’à concentrer leurs efforts sur la variété des décors et de la mise en scène, le cas Tomb Raider paraît bien plus épineux. Les développeurs devront trouver un artifice pour conserver les perks acquises. Lara ne va pas éternellement réapprendre les mêmes compétences.
Si le réalisme n’est pas de mise, un minimum de cohérence s’impose ; en particulier si les développeurs souhaitent développer une chronologie et un lien scénaristique fort entre chaque épisode.


D’ailleurs, ce pourrait être l’occasion pour Crystal Dynamics de s’interroger sur la pertinence de certains actions conférant de l’expérience, comme décrocher des lapins piégés ou tirer sur des ordinateurs... Si tirer sur des cibles doit effectivement permettre à Lara d’améliorer sa précision, on voit mal ce qu’elle acquiert en brûlant des affiches ou en décrochant des drapeaux.


De même, l’intelligence artificielle, qui fait le yoyo en se montrant tantôt maligne tantôt débile, nécessiterait quelques ajustements. En combat, les adversaires se montrent plutôt futés en délogeant le joueur à la grenade. Impossible de tenir une position très longtemps sans devoir bouger. Mais ils ont aussi une forte tendance à se regrouper, faisant de ces packs des cibles de choix pour vos flèches empoisonnées ou explosives. Certains combats, qui devraient être complexes, se règlent en deux temps trois mouvements, car les ennemis nous facilitent la tâche.
Un point également particulièrement pénible : les commentaires de Lara. S’il est agréable de l’entendre se motiver, se rassurer ou encore essayer de glisser discrètement au joueur un début de solution pour une énigme, impossible de ne pas lui intimer de fermer sa gueule quand elle se met à répéter toutes les cinq secondes (sans exagérer !) la même phrase. Sans pouvoir le garantir, il me semble que les scripts des commentaires se déclenchent lorsqu’on passe à un endroit spécifique. Du coup, lorsque vous piétinez un peu parce que vous avez compris que la solution à l’énigme est à un endroit bien précis sans toutefois réussir la bonne action, Lara peut se mettre à bugger en boucle et à ressortir la même réplique. Je l’ai entendue me répéter au moins 50 fois en cinq minutes « Il faudrait que je trouve un autre contenant ». Ok, j’aurais pu le trouver plus vite ce contenant... Mais rien n’empêchait de limiter la répétition des commentaires...


Côté technique, cette version PS4 Pro ne convainc qu’à moitié. Si l’option « Fluidité » est appréciable, on notera que les 60 images par seconde ne sont pas tenues en permanence et que le framerate est très cahoteux dès que Lara arrive dans une zone ouverte.


Impossible de ne pas glisser un mot sur la fin, plus que décevante. Pour ceux n’ayant pas terminé le jeu, mieux vaut stopper la lecture ici.


J’ai eu du mal à cacher ma frustration quand j’ai eu à affronter le boss de fin. Alors que je sortais d’un combat éprouvant (alternance de combat contre un hélicoptère / contre des gardes), j’ai littéralement pulvérisé l’antagoniste final qui ne m’a même pas touché.
Je m’attendais à ce qu’il soit le pilote de l’hélicoptère, en fait. Ce foutu hélico nous poursuit pendant tout le jeu et intervient durant le combat le plus intense de ces trente heures, mais les développeurs n’ont pas eu l’idée de mettre le grand méchant aux commandes. À croire qu’ils l’avaient oublié. Au final, ils nous lâchent dans une salle sans issue et font intervenir le méchant qui nous pique notre arc... Sans exagérer, ça commence comme ça...
C’était juste le combat le plus nul du jeu. Lara se fait tirer son arc et oublie qu’elle a d’autres armes ? Ok. Lorsque le combat a démarré, j’ai direct enfoncé mon piolet dans la tronche du boss, je l’ai bourriné pendant trente secondes en me demandant pourquoi il ne mourait pas. Lui ne m’a jamais touché. J’ai fini, stupéfait, par comprendre qu’il n’y avait qu’une bonne marche à suivre. Donc, en gros, des coups de piolet ne suffisaient pas. Il fallait une bombe d’abord pour l’étourdir, puis le piolet. Parce que le piolet direct, c’était sans doute pas assez réaliste...


Je ne sais pas ce qui leur est passé par la tête pour se chier dessus à ce point. Parce qu’en plus, une fois ne suffisait pas. Non, c’est toujours trois fois dans les jeux vidéo. Alors il a fallu recommencer trois fois la manœuvre.


Si je détaille à ce point, c’est pour illustrer l’idiotie du combat et mettre en évidence la solution toute désignée qui était celle de faire du grand méchant le pilote de l’hélicoptère. Le joueur se serait souvenu de lui pour de bonnes raisons.


Enfin, la mini cinématique post générique m’a semblé un peu trop révélatrice sur le prochain antagoniste. Mais ce n’est pas vérifiable pour le moment.


Bref, succession de mauvais choix pour un jeu qui n’est pas désagréable non plus, loin s’en faut. Mais l’expérience ne s’avère pas à la hauteur. Au final, on en viendrait à espérer que, pour le prochain volet, Crystal Dynamics vire tout l’aspect gunfight et se concentre sur ce qui fait la force de cette dernière itération : l’exploration.


Dispensable.

Flibustier_Grivois
6

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le 19 déc. 2016

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