Return of the Obra Dinn
8.3
Return of the Obra Dinn

Jeu de Lucas Pope et 3909 (2018Mac)

Le mystérieux navire Obra Dinn refait surface en 1807, quatre années après sa disparition sur le chemin du Cap. C’est à vous, détective pour une compagnie d’assurance, de comprendre ce qu’il s’est passé et de retracer la fin, souvent violente, des quelques 60 membres de son équipage.


Return of the Obra Dinn est le dernier jeu du développeur indépendant Lucas Pope, connu pour le très intéressant Papers, Please (2013). Mais les deux jeux n’ont rien à voir : on a un changement radical d’ambiance et de gameplay. Le jeu se présente comme une sorte d’enquête policière géante à résoudre, un Cluedo XXXL : qui a tué qui, et de quelle manière. La carte est jouée à fond, et le nombre de possibilités est gigantesque.



Un gameplay intéressant mais un peu limité



Pour arriver à vos fins, vos seuls outils seront une montre permettant de visualiser les derniers instants d’une personne, ainsi qu’un grand livre vous permettant de tout consigner. C’est à vous de trouver dans les scènes en 3D les indices pour arriver à identifier les marins et les causes de leurs décès. Évidemment, si certains sont évidents, d’autres sont plus difficiles à trouver : il faut parfois aller chercher dans plusieurs scènes, voire procéder par élimination. La difficulté est réelle, mais loin d’être insurmontable, et rend très gratifiante la progression dans le jeu, quand tout se met en place comme les pièces d’un puzzle. Certes, le jeu n’échappe pas à un certain degré de « résolution combinatoire » , c’est à dire quand on teste des réponses un peu au hasard jusqu’à ce qu’elles soient validées. Mais cela reste très limité.


Là où je suis un poil déçu, c’est que c’est l’unique interaction possible avec le navire. J’aurais aimé faire également un peu de travail de fouille dans des effets personnels, des journaux de bords ou que sais-je, trouver moi-même des clés pour déverrouiller d’autres aires du bateau plutôt que tout cela arrive automatiquement.


Autre défaut : on est régulièrement forcé dans des séquences très linéaires où on saute de cadavre en cadavre et de scène en scène, sans pouvoir prendre le temps de se poser. C'est un parti pris vraiment étrange et que je ne m'explique pas.



Une ambiance envoûtante mais pas sans défauts



Les graphismes du jeu sont d’un style rétro très particulier, émulant les toutes premières 3D en noir et blanc des vieux ordinateurs —on pourra même choisir lequel dans les options—. Ce sera peut-être une madeleine de Proust pour certains, toujours est-il que le jeu de démarque clairement de la vague pixel-art. Mais si ça donne au jeu une ambiance irréelle indéniablement réussie, c’est également un peu gratuit. À l’inverse de l’austérité des graphismes de Papers, Please qui évoquait les dernières années de l’URSS —et ses privations—. Toujours est-il que je suis impressionné de la qualité des scènes avec l’équipage : les poses sont naturelles et dynamiques, ça pourrait presque passer pour de la motion capture. Idem au niveau des voix, tout à fait convaincantes.


L’histoire verse, quant à elle, clairement dans le fantastique. Ce n’est pas un soucis en soi, mais même une fois tous les destins devinés, elle reste assez vague et répétitive —on a droit à trois attaques de monstres et à peu près autant de mutineries—. C’est, bien sûr, à dessein, mais un peu plus de diversité aurait été la bienvenue, ainsi qu’une trame narrative un peu plus solide où l’on en apprendrait plus sur la vie de l’équipage. C’est justement dommage car on sent qu’un gros boulot a été fait pour que tout soit historiquement crédible —à défaut d’être réaliste, mais je ne suis pas un expert—. On nous fournit même un glossaire pour expliquer les différents corps de métiers de l’équipage.


Bref, Return of the Obra Dinn est un jeu d’enquête unique et exigeant qui a su parler à ma fibre de Sherlock Holmes du dimanche. Le gameplay aurait mérité d’être un peu plus varié et l’histoire un peu plus étoffée, cela dit.


J’ai personnellement mis 7h33 pour le terminer à 100%.

Bastral
7
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Créée

le 7 nov. 2018

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Bastral

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