Moonraker

2 ans... C'est le temps qu'il m'aura fallu pour finir Pokémon Lune. Je ne cache pas qu'il y a une grande part de flemme dans ce délai déraisonnable, cependant c'est bien la première fois que j'aurai eu autant de mal à rentrer dans un jeu Pokémon.

Pourtant, cette septième génération fait pas mal de bon choix qui semblent illustrer une volonté pour la saga d'aller de l'avant, alors justement qu'on lui reproche souvent son immobilisme et le manque d'innovations majeures depuis les premières versions. Ici, GameFreak n'a pas hésité à bouleverser quelque peu la structure telle qu'on la connait : finies les 8 arènes avec 8 champions à battre et 8 badges à collecter. C'est mine de rien l'un des piliers de la franchise que GF n'hésite pas à abattre. Dans le même ordre d'idées, les CS disparaissent, remplacées par des "Pokémontures", Pokémon inutilisables en combat et dédiés à une tâche spécifique.

Malheureusement, je n'aime pas faire mon réac, mais ces nouveautés ne m'ont pas convaincu. Le système d'épreuves, avant de passer une Grande Epreuve pour chaque île, pourquoi pas. Mais disons que j'étais assez attaché à ce principe des 8 arènes qui segmentent la progression, un truc simple mais qui permettait de bien mesurer où on en était et le chemin qu'il nous restait à accomplir. Sans compter ce petit frisson en affrontant un champion d'arène, découvrir son équipe, le Pokémon gardé sous le coude qui te one-shot parce que t'es pas bien préparé... J'ai eu du mal à ressentir le même souffle devant les Pokémon dominants, j'avais juste l'impression d'affronter un Pokémon sauvage plus coriace que la moyenne. Je ne dis pas qu'un autre système n'est pas possible, mais celui-ci ne m'a guère convaincu.

De même que je trouve bizarre l'idée de se balader avec une dizaine de Pokémon dédiés aux CS, ça contredit un peu le principe de base qui est de former son équipe, d'emmener ses Pokémon avec soi tout au long de l'aventure et de s'y attacher. Ici ça me faisait bizarre de n'utiliser des Pokémon que quand j'avais besoin de déplacer un rocher ou de surfer, sans pouvoir rien faire d'autre avec...

Sans compter que c'est probablement le jeu de la série avec la progression la plus linéaire. C'est une tendance de plus en plus prégnante dans les Pokémon, déjà bien envahissante dans XY, mais ici on atteint encore un stade supérieur, on est tenu par la main en permanence, il y a des cinématiques toutes les dix minutes pour bien nous expliquer où on va... Du coup le sentiment de vivre sa propre aventure, de partir à la découverte du monde, n'est plus vraiment là. La structure d'Alola n'aide pas sur ce point, le fait de découper le monde en îles donne vraiment l'impression d'être cloisonné, de suivre un couloir d'épreuves en épreuve. Alors que la 3D permet de nouvelles choses, comme avoir des chemins qui ne sont plus une succession d'angles mais ressemblent à de vrais chemins, on se sent plus restreint que jamais. Mais il aurait fallu en profiter pour rendre le monde plus ouvert, moins restreint.

Le jeu reste cependant plaisant à jouer, comme tout Pokémon. Ça reste agréable de former son équipe, de s'attacher à chacune de ses petites bêtes (d'autant plus qu'on peut manuellement les soigner après les combats désormais, une belle idée !), de se battre en essayant d'anticiper le type de l'adversaire pour décider de la meilleure stratégie. De même que j'ai apprécié l'idée de donner de nouvelles formes à des Pokémon déjà connus, une belle alternative à l'obligation de pondre des dizaines de nouvelles créatures à chaque nouvelle version.

On appréciera les quelques efforts faits en terme d'écriture, de mise en scène, même s'il en faudra encore beaucoup pour vraiment se sentir impliqué émotionnellement. Je loue cependant la présence du personnage de Lillie, qui parvient à être attachante et relativement adorable, tout en ayant une vraie évolution palpable tout au long de l'aventure. C'est elle, quelque part, le vrai personnage principal, là où celui incarné par le joueur reste toujours volontairement inexistant pour favoriser la projection dans sa peau.

Et, visuellement, c'est le plus beau et le plus riche des Pokémon en 3D, j'apprécie toutes les animations qui rendent les combats souvent plus spectaculaires, même si cela se fait souvent au détriment de la fluidité.

Malgré ça, j'ai eu beaucoup de mal à m'impliquer dans ma progression, j'ai fini le jeu en mode rush au bout de 30h (alors que j'avais dépassé les 60h sur Omega Rubis) et je ne toucherai pas au post-game, je préfère laisser Pokémon de côté pour mieux appréhender les futures versions Switch. Je pense vraiment que cet épisode pose les bonnes questions mais n'apporte pas forcément les bonnes réponses. J'ose espérer que GameFreak restera dans cette optique de renouvellement mais sans s'appuyer directement sur la construction de cet épisode (je rêve d'un Pokémon en monde ouvert à la Breath of the Wild, mais là je crois que je peux me brosser).