George A. Romero aborde cette suite offerte à Night of the Living Dead comme un produit destiné à satisfaire les amateurs du premier film devenus entre-temps consommateurs ; raison pour laquelle il transforme sa masse de zombies en une foule de clients qu’un instinct de consommation, comprenons un goût pour les corps et les objets, pousse à retourner là où ils effectuaient jadis leurs emplettes. Ces monstres « vivent dans le souvenir de ce qu’ils aimaient », ils peuplent les centres commerciaux, s’amassent devant les galeries et se cognent aux vitres des devantures. Le gore prend des allures de cartoon, dû notamment à la couleur du sang et de la chair, aux chutes multiples et variées, aux accidents grotesques résultant des mouvements mécaniques.


Le long métrage s’empare aussitôt des zombies comme d’une métaphore d’un âge de ténèbres sur Terre issu de la culture de masse et du consumérisme galopant : s’il y a bien une « Apocalypse » qui se joue ici, elle reflète le châtiment d’un homme qui s’est perdu dans les vanités et dilapide son temps dans des occupations vaines et égoïstes. La survie qu’opposent les résistants aux monstres apparaît alors comme un mode de vie alternatif que le cinéaste regarde avec une distance critique, puisque ces personnages s’installent dans un centre commercial pour subvenir plus facilement à leurs besoins, conscients des contradictions qu’ils incarnent et de leur incapacité à s’y soustraire. L’être humain est à la fois aidé et desservi par sa raison, là où les zombies ont l’immense avantage de ne pas penser ; il interroge le monde dans lequel il vit et la naissance qu’il convient ou pas de donner à un bébé, croit en l’honnêteté de parasites qui souhaitent le duper pour prendre possession de ses richesses, doit composer avec des valeurs et des représentations de la virilité et de l’héroïsme peu opérantes dans l’urgence des situations rencontrées.


Derrière sa loufoquerie et la maestria de sa mise en scène, qui compose des séquences d’action époustouflantes, Dawn of the Dead a l’intelligence de montrer les morts-vivants comme une menace d’autant plus grande qu’elle endort l’esprit et nourrit un corps automatisé. Une parabole puissante de nos sociétés consuméristes.

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le 31 oct. 2021

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