J’avoue que j’aurais bien voulu avoir un meilleur avis global sur ce slasher, car les qualités de l’ensemble sont vraiment dignes d’éloges. Ce que je veux dire, c’est quand ce film a une qualité, ça ne fait pas les choses à moitié. Elles auraient mérité de figurer dans quelque chose de bien supérieur.


Bon, assez tergiversé, quelles sont les qualités de X de Ti West ?


Ben, tout d’abord, la mise en scène. Celle-ci reproduit l’esthétisme des films d’horreur des années 1970 avec un sens du détail impressionnant. La référence visuelle qui saute tout de suite aux yeux, c’est évidemment The Texas Chain Saw Massacre, dans les couleurs, dans les décors, dans les costumes (par extension, le scénario !). Et puis, il y a aussi le grain amateur des films pornos de l’époque, le “jeu des acteurs” (oui, le sujet, c’est un groupe de personnes qui va tourner un film porno dans une ferme bien située dans le trou du cul du Texas et qui a pour propriétaire un vieux couple de tordus psychopathes !). Le rendu parait magistralement authentique. Pour ce dernier point, on est même au niveau de Boogie Nights de Paul Thomas Anderson (et ce n’est pas un mince compliment, croyez-moi !). En prime, l’un des comédiens est le sosie de Richard Pryor, grande star du stand-up de l’époque, symbolisant les excès assumés (sexe, drogue… !) d’une décennie sans limites déclinante (l’intrigue se déroule en 1979 !), qui allait laisser la place à une autre marquant un retour à l’ordre.


La deuxième grande qualité, c’est la distribution. Les comédiens et comédiennes ont beau incarner pour la plupart des personnages bien (trop !) archétypaux du genre (je vais revenir sur ceci plus loin !), ils sont excellents avec ce qui leur est donné. Dans une bonne majorité des cas, dans le registre du slasher, on choisit plus des interprètes débutants (ou quasi !) pour leur physique que pour leur talent (ce qui fait que la plupart d’entre eux ne font pas par la suite une carrière incroyable, Jamie Lee Curtis et Johnny Depp ne sont que des exceptions confirmant la règle !). Pas là. Ici, on a les deux, le physique et le talent. Mention spéciale à Mia Goth qui endosse un double rôle avec une telle maîtrise que j’ai souvent oublié que c’est une seule et même personne qui prête ses traits à la jeune protagoniste et à la vieille psychopathe. J’ajoute aussi que Mia Goth jeune est d’une sensualité à faire bander un cadavre d’homme décapité (d’ailleurs, j’étends aussi ce compliment à ses partenaires féminines, Jenna Ortega et Brittany Show !).


Que dire de plus pour le positif ?


Ah oui, la première scène de meurtre crée un filtre de couleur original avec le sang qui gicle sur le phare du van. J’ai bien aimé aussi le fait qu’au lieu de les faire apparaître uniquement que quand ils pourchassent et massacrent les membres du groupe, bref que dans leur fonction d’antagonistes sanguinaires, le récit prend quelquefois un temps de pause pour approfondir les relations tendres entre les deux tueurs unis par les liens sacrés du mariage (on aurait même de la compassion pour eux… s’ils ne trucidaient pas des gens !), notamment par le biais de la thématique de la frustration sexuelle (exacerbée par le tournage du porno !).


Lié à cette dernière optique, il y a aussi le ressort scénaristique du double puisque la vieille psychopathe voit la jeune protagoniste comme un reflet enviable d’elle-même, non seulement pour la jeunesse, mais aussi parce que l’héroïne a la possibilité ainsi que la volonté de réussir là où la psychopathe a échoué (d’ailleurs, c’est le sujet du préquel Pearl, tourné dans la foulée dans les mêmes décors, avec la même actrice, par le même réalisateur, mais je ne vais pas m’étendre dessus dans la critique de ce premier volet !). Il y a des références à des classiques du film d’horreur (The Texas Chain Saw Massacre bien sûr, mais aussi Psychose, Shining, Le Crocodile de la mort et d’autres oeuvres que les bien meilleurs connaisseurs du genre que moi seront capables tout de suite d’identifier !) qui sont très bien intégrées à l’histoire. Et le twist-ending, avec une révélation sur la protagoniste, ne manque pas de surprendre.


Le gros problème, c’est que le tout est désespérément prévisible dans le côté slasher. Et Ti West a beau essayer d’assumer cela par l’intermédiaire de plusieurs fusils de Tchekhov, ça ne change rien au fait que c’est ultra-prévisible (même quand on a vu une quantité rachitique de films d’horreur comme moi !), que ça ne prend aucun risque à ce niveau-là. X emprunte un peu trop les mêmes ficelles que ses prédécesseurs. Dès le début, j’ai su tout de suite qui allait être zigouillé, qui allait ne pas l’être et même dans quel ordre par l’archétype que tel caractère ou tel autre représente. Et, bordel de merde, c’est dommage parce que j’ai énormément kiffé tout ce que j’ai cité comme qualités. Qualités qui m’encouragent à voir les autres films de la franchise prévue (déjà existant pour le préquel Pearl, à venir pour le reste !) en espérant être plus surpris.

Plume231
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2022

Créée

le 14 nov. 2022

Critique lue 574 fois

21 j'aime

9 commentaires

Plume231

Écrit par

Critique lue 574 fois

21
9

D'autres avis sur X

X
dagrey
7

"Diable au corps" et meurtres en série dans le Texas des années 80....

Nous sommes en 1979, dans une zone isolée du Texas. Une équipe de tournage sans le sou débarque pour tourner un film porno cheap chez un couple d'octogénaires dans une dépendance de la propriété. Peu...

le 16 avr. 2022

39 j'aime

18

X
freddyK
8

Texas SexShow Massacre

Je ne sais pas de quelle faille spatio-temporelle est sorti le réalisateur Ti West mais je suis bien content qu'il soit tombé dedans. Hormis ces participations très oubliables aux anthologies V/H/S...

le 16 avr. 2022

32 j'aime

7

X
Plume231
6

The Texas Porn Show Massacre!

J’avoue que j’aurais bien voulu avoir un meilleur avis global sur ce slasher, car les qualités de l’ensemble sont vraiment dignes d’éloges. Ce que je veux dire, c’est quand ce film a une qualité, ça...

le 14 nov. 2022

21 j'aime

9

Du même critique

Babylon
Plume231
8

Chantons sous la pisse !

L'histoire du septième art est ponctuée de faits étranges, à l'instar de la production de ce film. Comment un studio, des producteurs ont pu se dire qu'aujourd'hui une telle œuvre ambitieuse avait la...

le 18 janv. 2023

285 j'aime

19

Oppenheimer
Plume231
3

Un melon de la taille d'un champignon !

Christopher Nolan est un putain d'excellent technicien (sachant admirablement s'entourer à ce niveau-là !). Il arrive à faire des images à tomber à la renverse, aussi bien par leur réalisme que par...

le 19 juil. 2023

208 j'aime

28

The Batman
Plume231
4

Détective Batman !

[AVERTISSEMENT : cette critique a été rédigée par un vieux con difficile de 35 piges qui n'a pas dû visionner un film de super-héros depuis le Paléolithique.]Le meilleur moyen de faire du neuf, c'est...

le 18 juil. 2022

137 j'aime

31