Film sur le jazz, Whiplash est avant tout la rencontre entre deux personnalités. Andrew Neiman (joué par Miles Teller), élève au conservatoire Shaffer à New-York, est un batteur persuadé d’avoir un potentiel grand destin devant lui. Désireux de devenir le meilleur batteur de jazz, il intègre le groupe de Terre Fletcher (J.K. Simmons) réputé pour être le meilleur professeur de l’établissement, mais aussi le plus terrible.
Abusant de violence physique et morale, Fletcher est considéré aussi bien comme un maître que comme un monstre. Andrew va-t-il devenir ce dont il a toujours rêvé ou les méthodes de Fletcher vont-elles le briser ?
Le film ne tourne pas autour de la relation entre les deux personnages mais préfère bien plutôt se concentrer sur Andrew en assumant de n’offrir qu’une certaine partie de la vision réelle. Le film ainsi nous laisse parfois dans le doute quant aux personnages. Pour autant, jamais on ne peut réellement mettre en doute le côté dangereux de Fletcher, bien que le personnage ait une complexité bien plus profonde qu’on ne pourrait le croire.
Le film parle bien entendu de musique, mais surtout d’obsession, de prétention, de rêve de succès et finalement beaucoup d’hubris. Très intéressant sur les questions pédagogiques, il nous interroge sur l’éducation que nous voudrions ou que nous mettons en place.
Le film dispose d’une très belle capacité à être subtile et à ne pas tout dire de manière trop imposée. Ainsi la relation entre Andrew et son père (Paul Reiser) est-elle peut développer à proprement parler mais nous permet de bien comprendre la rupture progressive bien qu’involontaire qui se fait entre les deux hommes, la faute à un Andrew rejetant tout ce qui n’est pas grandiose et qui, d’une certaine manière, préfère un homme comme Fletcher, une ordure très macho mais un génie, que son père, gentil à souhait, mais n’osant pas trop s’affirmer et n’ayant rien accompli de grand.
À ce titre, Whiplash n’est pas parfait : trop court sans aucun doute, il aurait gagné à développer les personnages pendant une bonne demi-heure, je pense, et surtout jouer beaucoup plus à creuser quelques petites séquences autour d’Andrew tout en évitant quelques lourdeurs scénaristiques dont on se serait passé.
Effectivement, Whiplash est très bien écrit et ainsi voir le scénario amoureux très mal écrit en fond dans le premier acte ainsi que la scène d’oubli des baguettes (succession de mises en scène parfaitement prévisible d’un bout à l’autre) ne peut que nous étonner. Whiplash est subtil et pourtant s’offre parfois l’audace de quelque chose d’assez attendu.
Bien entendu, la beauté du film est son ode au jazz, à la musique et je dirai même plus à une approche exigeante de l’interprétation (plus que de l’écoute). Magnifiquement filmé, jamais on n’a pris autant son pied à voir des musiciens nous offrir une musique de qualité voir prétentieuse par moment (d’ailleurs je regrette que l’accent ne soit pas davantage mis sur le côté vivant et humble que peut avoir le jazz).
Glorieuse réalisation, glorieuse bande-son, s’offrant quelques plans extérieurs vraiment beau, doté d’acteurs de qualité au service d’un scénario majoritairement très bien écrit et très captivant, Whiplash est indiscutablement un bon film et si je ne lui mets que 7/10 c’est bien plutôt parce que j’ai le sentiment qu’il avait les moyens de devenir encore plus que cela, d’être un des plus grands films des 20 dernières années et qu’il a loupé cela par manque de développement et quelques petites erreurs.