Johnny Cash, homme en noir et dieu de la country music vénéré aux Etats-Unis, alors qu’il reste (et restera) un illustre inconnu dans l’hexagone. Cette vie, cette carrière entamées à la naissance du rock‘n’roll méritaient le meilleur des biopics, art difficile qui consiste à retracer fidèlement une vie en la romançant pour capter l’attention de ceux qui ne sont pas fans. Des fans de Cash, il y en a peu chez nous, il n’y en a sûrement pas beaucoup plus depuis le film. Force est de la reconnaître, un biopic sur Dan Ar Braz n’aurait probablement pas beaucoup de succès non plus chez nos amis les cowboys.

Johnny Cash était ce chanteur à la fois si fort de tempérament et si sensible de coeur, capable de mettre le feu au public de détenus de la prison de San Quentin avec une chanson assassine, tout en s’effondrant dans la drogue par la dictature d’un père méprisant qui lui reprocha en silence la mort de son frère tellement « meilleur » que lui , d’un ménage qui s’effondre et d’une June qui l’aime trop pour l’aimer. Le film part de cette enfance rurale dans les champs de coton pour s’achever autour d’une table, lors d’une presque réconciliation avec le paternel, du moins ce qui s’en rapproche le plus entre deux mâles persuadés que c’est à l’autre de baisser les yeux le premier.

J’aime ce film, je l’aime très fort, presque aussi fort que j’aime Johnny Cash que j’ai découvert collégien dans une ancienne compilation intitulée : Les Plus Grands Moments Country. On ne pouvait rêver plus bel hommage à un des pionniers de Sun Records, figurant sur la légendaire photo aux côtés d’Elvis, de Jerry Lee Lewis et Carl Perkins, le fameux Million Dollar Quartet. Pourtant, avec James Mangold à la manœuvre, le pari n’était pas gagné tant ce réalisateur alterne le pire et le meilleur. Coup de chance, il était dans sa phase « le meilleur ». Il a su trouver le ton juste pour illustrer la vie compliquée et pleine de dérives d’un chanteur qui parvint à la rédemption auprès de celle qu’il a aimée dès son enfance, lorsqu’il écoutait la Carter Family à la radio.

Chaque film est précédé d’un casting, pourtant on se demande à quoi il a pu servir ici, tant la distribution semble idéale et tant elle semble se résumer à Joaquin Phoenix et Reese Witherspoon qui dévorent la pellicule à grands coups de complicité rêvée, de chansons maitrisées et de sentiments exacerbés. Si Resse Witherspoon, à l’opposé de La Revanche d’Une Blonde, surprend par sa justesse et sa retenue, Joaquin Phoenix est totalement imprégné de la musique, de l’esprit et des expressions du grand Johnny. Non pas qu’il imite, qu’il mime ou qu’il singe bêtement, il est possédé, littéralement habité par l’homme, par le personnage et par l’artiste. Il transpire parfaitement les contradictions d’un homme habité par Dieu mais aussi par une dépendance à la morphine prise à l’hôpital.

C’est un film superbe, c’est un biopic superbe, porté par l’excellence de ses acteurs, de sa bande-son où Joaquin démontre ses qualités vocales tout en rendant hommage à la country. On comprend l’homme, on apprend l’artiste et, cerise sur le gâteau, on a envie d’aller plus loin, de découvrir et comprendre cette vie d’errances et de succès, d’amours et de ruptures et qui au bout du compte, trouva l’âme apaisée dans les bras de celle qui le sauva par amour. Un film merveilleux sur un homme, un monument qui, mordant la poussière, se retrouvant souvent brisé et à terre, su toujours rester droit au fond de lui-même.

P.S. : Si mieux connaître l’homme en noir vous tente, je vous conseille ceci :
http://www.senscritique.com/livre/Johnny_Cash_l_Autobiographie/362817
Jambalaya
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le 13 janv. 2014

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