Malgré la présence de Pierre Deladonchamps dans le rôle principal, l’adaptation de l’écrit et de la vie d’Antoine Leiris est d’une platitude d’autant plus navrante que le cinéma français a su évoquer les attentats de novembre 2015 et les filmer. Une vraie déception.


Comment surmonter une tragédie sans sombrer dans la haine et le désespoir ? L’histoire vraie d’Antoine Leiris, qui a perdu Hélène, sa femme, pendant les attentats du Bataclan à Paris, nous montre une voie possible : à la haine des terroristes, Antoine oppose l’amour qu’il porte à son jeune fils et à sa femme disparue.


Il a fallu sept ans au cinéma français pour aborder avec justesse et distance les attentats de novembre 2015. Récemment nous avons pu voir ‘Revoir Paris’ d’Alice Winocour et ‘Novembre’ de Cédric Jimenez. En 2018, il y avait eu ‘Amanda’ de Mikhaël Hers. Pour filmer les attentats, il faut avoir un angle, un point de vue. Dans ‘Angles d'attaque’ narrant une tentative d’attentat visant le président (la hantise du cinéma d’action américain), Pete Travis avait pris le principe au pied de la lettre. Le film n’était pas un chef-d’œuvre mais était d’une certaine efficacité en racontant cet tentative d’attentat en prenant le point de vue de plusieurs témoin. Dans ‘Revoir Paris’, Alice Winocour prenait le point de vue de la victime et filmait le pendant et l’après l’attentat. Dans ‘Novembre’, Cédric Jiménez filmait le travail des services de polices pour rattraper les terroristes et montrait plutôt l’à côté. Mikhaël Hers lui avait imaginé un attentat fictif. En adaptant ‘Vous n’aurez pas ma haine’ et plus globalement la vie d’Antoine Leiris, Kilian Riedhof s’impose de fait un réalisme qui ne luis laisse aucune liberté romanesque. Le fait que le personnage existe encore et ait une certaine notoriété combiné au fait que les attentats sont un sujet grave et ayant marqué les français ne laisse aucune marge de manœuvre au réalisateur allemand ainsi qu’à ses comédiens.


Ce qui frappe au visionnage du film est la grande maladresse du film. Tout est extraordinairement appuyé et pourtant le film manque vraiment d’unité. Kilian Riedhof tente par moment de faire un thriller d’appartement à la Polanski mais il n’en a pas la virtuosité. On n’est ni dans ‘Répulsion’ ni dans ‘Rosemary’s Baby’. Le réalisateur se contente d’assombrir la luminosité de sa photographie, de flouter l’arrière-plan et de surcharger de musique anxiogène. Parfois, le film tombe dans le mélodramatique insupportable, le torrent de larme et la musique violoneuse.


Les scènes se succèdent sans relief mais avec répétitions. Combien de scènes à la crèche, combien de scènes dans la chambre où le héros semble hagard, combien de scènes ou le père donne à manger à son fils. Filmer un enfant n’est pas chose facile au cinéma surtout quand l’enfant est très jeune. ‘Vous n’aurez pas ma haine’ regorge de mignonneries, c’est-à-dire de plans totalement gratuits sur l’enfant pour susciter facilement l’émotion. Combien y-a-t-il de plans sur l’enfant en larmes ? Combien de scènes durant laquelle l’enfant cherche sa mère décédée ?


N’exagérons rien, il y a quelques scènes assez réussies. Tout n’est pas raté, notamment dans les scènes de confrontation pendant lesquelles le film prend enfin un peu de hauteur. Confrontation avec l’ami qui était au bataclan avec la femme du héros et qui a survécu. Confrontation aussi avec la famille et la belle-famille qui ne comprennent pas comment Leiris-Deladonchamps peut consacrer autant de temps à la médiatisation de son texte. Le film aurait peut-être du se focaliser sur ça. Dans ce film globalement hyper lisse, ces séquences apportent enfin un peu d’âpreté.


Dans ce quasi-naufrage, Pierre Deladonchamps surnage autant qu’il peu. C’est l’un des meilleurs acteurs de sa génération. Déjà, il a une gueule qu’on n’oublie pas. Mais surtout, il est d’une vraie sensibilité et l’expressivité de son visage est assez remarquable. Mais franchement, je plains Camélia Jordana. Ses dernières interprétations, notamment dans le film de Mouret ‘Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait’, étaient convaincantes. Mais là, elle n’a rien à faire, rien à jouer puisque son personnage disparaît dans le premier quart-d ’heure et qu’elle ne réapparaitra que lors de brefs et répétitifs flashbacks.


Le film n’est pas non-plus scandaleux. Il est juste maladroit et assez raté car tout est vraiment mal dit.


Noel_Astoc
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Noel_Astoc

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