Ce film m'intriguait depuis un moment déjà ! Son aura de film culte chez une frange non négligeable de mes contemporains comme les hackers de l'Anonymous qui ont fait du masque de Guy Fawkes leur emblème devait être une bonne raison de le visionner et constater par soi-même s'il arrivait à égaler l'excellence de son grand frère Matrix. A l'occasion de ma rétrospective intégrale des Wachowski, je me le suis enchaîné deux fois puisque les frères/sœurs en avaient rédigé le scénario.
La première chose qui frappe c’est la dichotomie entre son hollywoodienne forme et la transgression du fond des messages distillés. Jusque là on suit la jurisprudence Matrix. Mais ce fond qu'est-il ? Apologie de la résistance par le terrorisme ; mise en garde d'un éventuel retour des totalitarismes du XXème siècle ; éloge du réactionnaire qui maudit son époque ; portrait de l'anarchiste qui ne peut s'épanouir que dans la conflictualité avec qui le traque ; apprentissage de la domination ou annihilation de ses peurs sans quoi rien de grand n'est possible ; le nationalisme et la religion d'état mènent forcément à l’extermination de celui désigné comme l'ennemi, le nuisible ? J'avoue que je reste perplexe sur le sens qu'il faut en dégager.
Ajoutez à cela le virus, attentat sous faux-drapeau et le comble du paradoxe qui est de mourir pour un coran quand on n'est pas musulman et de surcroît homosexuel. Il y a tellement de portes d'entrée et d'éléments qu'au final tout s'efface en formant une même boule de magma et ne reste plus que le divertissement.
Contrairement à Matrix, pas de ligne directrice ou de postulat suffisamment fort pour le rendre inoubliable.
Pour conclure, un bon film à l'aspect politique mais qui finalement s'évapore par une étrange incapacité à le prendre au sérieux. Il m'aura au moins permis d'en apprendre un peu plus sur la Conspiration des poudres et ses références au Comte de Monte-Christo et à 1984 qu'il mélange dans son mixeur m'auront réjoui.
Difficile de finir sans évoquer Natalie Portman qui est, de fait, l’héroïne du film puisque son principal partenaire est en permanence masqué, omniprésent tout en étant invisible. Comme si Natalie (Evy) était schizophrène et que V était une projection d'elle-même. L'invocation d'un esprit à la fois protecteur et vengeur sorti tout droit de son cerveau.
Ne pas oublier non plus que l'apparente étrangeté du film prend sa source, réside, dans une dystopie imaginée durant les années quatre-vingt.
Samuel d'Halescourt