New-York. Sa matinée ensoleillée, ses rues bondées, ses taxis jaunes, Summer in the City à fond les ballons... Puis soudainement, le chaos. En quelques secondes, John McTiernan annonce la couleur, atomise le cinéma d'action comme il l'avait déjà fait avec le premier opus. Le Boss est de retour et c'est peu dire qu'il nous avait manqué.


Après un second volet honorable et fun mais loin d'arriver à l'orteil du film originel, la 20th Century Fox (ici en collaboration avec l'éphémère Cinergi) avait clairement besoin de McT pour relancer la franchise. Et McT, de son côté, avait urgemment besoin d'un succès sûr, son pourtant grandiose Last Action Hero ayant eu l'idée saugrenue de sortir en même temps que le mastodonte Jurassic Park. Die Hard: With a Vengeance est donc l'histoire d'une réunion (manque quand même à l'appel Joel Silver à la production ou Jan de Bont à la photo), pour ce qui reste à mes yeux la plus grande réussite de la série.


Aux teintes très stylisées du premier Die Hard (et par extension, du deuxième), à son cadre limité, John McTiernan va répondre par une approche diamétralement opposée, choisissant d'ancrer son film dans un quotidien tout ce qu'il y a de plus réaliste. Le décor est démultiplié, la photographie moins colorée, la caméra sans cesse en mouvement afin de capter l'action au plus près. Même chose en ce qui concerne son John McClane de héros, autrefois si cool malgré les emmerdes. Poussées dans ses derniers retranchements, la représentation de l'héroïsme à l'américaine en prend un coup, ayant cette fois les allures d'une sérieuse gueule de bois, d'une barbe de trois jours et d'une chemise cradingue.


Parfait de bout en bout, l'air constamment claqué et au bout du rouleau mais toujours crédible dans l'action, conservant malgré tout son humour pince-sans-rire, Bruce Willis hisse son personnage au rang de loser magnifique comme on en fait malheureusement plus. Son duo avec un Samuel L. Jackson fraîchement starifié par Pulp Fiction est tout simplement jouissif, la complémentarité des deux larrons étant clairement une des grandes forces du film. Imposant, classe et d'une froideur absolument délectable, Jeremy Irons compose de son côté un bad guy d'anthologie, vecteur d'une menace qui n'aura que rarement été aussi palpable.


Repoussant les limites de son cinéma, John McTiernan pose ses couilles sur la table et offre au genre ses plus belles heures, déployant une mise en scène incroyablement percutante et immersive, donnant lieu à des séquences d'anthologie tout en utilisant la ville de New-York comme un personnage à part entière. L'air de rien, le cinéaste annonce clairement le cinéma d'action de la décennie à venir, celui d'une Amérique moins sûr d'elle, plus fragile, traumatisée au lendemain du 11 septembre.


Chant du signe de l'actionner hollywoodien avant qu'il ne soit repris par des Michael Bay sans coeur ni talent, Die Hard: With a Vengeance est un cocktail explosif et tendu du slibard, aussi spectaculaire qu'exaltant, dont on ne pourra que reprocher un final rapidement expédié, bien moins pertinent que la confrontation plus perverse imaginée à la base.

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le 3 août 2016

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Gand-Alf

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