J'ai une immense estime pour Martin Scorsese, tant l'homme que son cinéma et la façon dont il m'a marqué est inestimable, ayant pleinement participé à faire du cinéma une de mes passions, ayant assez jeune découvert son art (Taxi Driver en tête, puis Les Affranchis, Raging Bull, Le Temps de l'Innocence, Les Infiltrés, Casino, New York New York etc).


L'homme est un passionné de Cinéma, et ce qu'il soit américain, italien, suédois ou autres, tout simplement le Cinéma. Dès qu'il eut l'occasion de faire un documentaire sur le cinéma américain (dans le cadre de la célébration du centenaire du cinéma par le British Film Institute), il ne s'en est pas privé. Il ne compte retracer l'histoire du cinéma au pays de l'Oncle Sam, mais d'y donner sa vision, d'y jeter un regard personnel et de mettre en lumière ce qui l'a marqué. Dès les premières secondes, il rappelle que le cinéma, c'est de l'émotion et que celle-ci repose sur la volonté d'expression de son réalisateur, il divise donc ce périple en trois chapitres. Le premier évoque le réalisateur conteur, le second ses moyens d'expression et le rôle d'illusionniste et enfin la façon de raconter à la première personne.


Finalement, tout est dans le titre. Scorsese nous invite à voyager dans le cinéma américain de ses débuts jusqu'aux années 1960, il n'évoque donc pas sa génération mais ceux qui ont marqué et influencé celle-ci. Lorsque, comme moi, on est passionné par le cinéma et que l'on considère cet art comme magique et intemporel, c'est un vrai bonheur et on écoute, et regarde, Scorsese évoquant le cinéma, son évolution, le rapport entre les réalisateurs et le public, mais aussi les producteurs, les films et genres marquants etc. Il est sincère et passionné et ça se ressent du début à la fin alors qu'il évoque ceux qui l'ont influencé, de King Vidor à Minnelli en passant bien évidemment par Griffith, le vrai maitre d'Hollywood, celui qui fut inspiré du XIXème siècle (Dickens, Tolstoï) pour créer celui du XXème. Une fascination pour l'homme, son travail et son cinéma que je partage totalement alors qu'il évoque ses courts-métrages d'avant la Première Guerre mondiale, définissant déjà les bases de nombreux genres puis des films comme Le Lys Brisé, introduisant les effets de réel dans le spectacle.


Bien évidemment, et ce malgré la longueur (plus de 3h30), ça paraît toujours un peu trop rapide, il y a tant à évoquer dans le cinéma qu'il ne peut pas tout faire et c'est même parfois un peu survolé, notamment avec les extraits mais qu'importe, Scorsese transmet toute sa passion avec brio. Toutes les parties sont évoquées avec pertinence, que ce soit sur son propre vécu (sa découverte du cinéma mais aussi ses influences où les classiques côtoient les films moins ou pas connus), le travail de cinéaste, la censure, la façon de la contourner ou encore les rapports avec les studios. L'industrie hollywoodienne est au coeur du documentaire, que ce soit ses failles, sa vision du cinéma ou les liens avec ceux qui y participent. Un système où finalement tout film ayant une place, construisant des mythes et des modes, durant parfois de longues décennies et évoluant face aux changements de la société, notamment après la Seconde Guerre mondiale. L'intérêt vient aussi des participants, où Gregory Peck, Clint Eastwood, Capra ou encore Billy Wilder viennent évoquer des anecdotes ou des visions d'ensembles.


La force de ce voyage, c'est aussi que Scorsese nous rappelle à chaque instant que le cinéma c'est de l'émotion, que ce soit l'émerveillement, la beauté ou encore la tristesse. Il y a un vrai soupçon de mélancolie qui plane dans l'univers du metteur en scène de Taxi Driver et sa manière de raconter cela. Et puis, il y a tous les films qu'il donne envie de découvrir, de Duel au Soleil à Meurtre sous Contrat en passant par Les Ensorcelés, et tant d'autres encore. Il transmet toute sa passion pour le 7ème art avec l'impression d'un disciple devenu maitre et qui véhicule son savoir. Scorsese évoque ce documentaire comme un témoignage qui se doit d'être transmis, et de mon point de vue, il me confirme aussi que l'âge d'or du cinéma, tant dans les films que les metteurs en scène et les humains tout simplement, est passé, et ce depuis longtemps.


Ce long voyage est destiné à tout passionné de cinéma, qu'il soit adepte ou non de Scorsese mais qui croit en la magie et l'intemporalité du cinéma, à l'émotion et la fascination qu'elle peut procurer ainsi qu'à l'importance de véhiculer son histoire.

Docteur_Jivago
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le 13 nov. 2015

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