Un paire de moufles en guise de conscience

En voila un film surprenant, dans la mesure où il est réalisé par un homme que l'on n’attend pas vraiment dans ce genre d’exercice. Sam Raimi signe avec Un plan simple un polar noir d'une grande subtilité, magnifié par ses personnages, des messieurs tout le monde confrontés à des choix qui chambouleraient le plus hardi des mortels. C'est toute la force du film, ce côté très réaliste des situations que se permet d’enchaîner un script jamais remis en question, quelques soient les ramifications qu’il provoque. Pour mettre en mouvement son histoire, Raimi opte pour une réalisation dépouillée, préférant des cadres magnifiques à la prouesse technique. Les plans marquants s’enchaînent, tous sublimés par une photographie qui parvient à exploiter la moindre parcelle du blanc polaire de ces paysages mélancoliques qu’elle s’approprie.

Un plan simple dépeint une jolie galerie de personnalités, toutes aussi communes les unes que les autres, mais écrites avec suffisamment de finesse pour ne pas tomber dans les caricatures habituelles du genre. On se laisse par exemple volontiers convaincre par ce frangin pas si simplet, mal aimé et peu gâté par la vie, joué avec beaucoup de justesse par un Billy Bob Thorton impérial. Le reste du casting n'est pas en reste et permet au film de trouver rapidement un rythme de croisière palpitant, maintenu sans effort jusqu'au dénouement. Mention spéciale à Bill Paxton, rarement exploité en premier rôle, qui parvient à retranscrire de façon convaincante l’ambigüité de son personnage, père de famille tiraillé entre ses états d'âme et son naturel, plus proche du criminel endurci que de l'homme modèle.

Mais outre ses acteurs, si Un plan simple séduit c'est surtout par son script, solide comme le roc et constant sur la durée. Même si le pitch de départ n'est pas spécialement original, son développement, d’un noir teinté de superstition, rythmé par cette présence magnétique des corbeaux, est tout simplement remarquable d’intelligence. Ces volatiles couleur charbon ponctuent avec beaucoup de vivacité des séquences qui prennent leur temps mais savent aussi faire parler la poudre quand le script l'exige (le duel chez le pote de Jacob est bien sec) pour aboutir à un final d'une grande force, se faisant un écho direct aux premiers plans du métrage.

Habituellement, les films du genre ne trouve pas fin à leur hauteur mais une fois n’est pas coutume, Raimi offre à Un plan simple un final si marquant qu’il imprime son souvenir au fer rouge dans une mémoire trop souvent capricieuse. Une jolie surprise pour ma part, un bon polar noir comme je les aime. A rattraper d'urgence si vous aimez le genre et avez des aprioris sur le papa de l'unidimensionnel homme araignée.

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oso
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le 29 nov. 2014

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