Toy Story
7.7
Toy Story

Long-métrage d'animation de John Lasseter (1995)

Le sheriff Woody est le jouet préféré d’Andy, un petit garçon d’une dizaine d’années. Mais, alors qu’Andy doit s’apprêter à déménager avec sa famille, il reçoit pour son anniversaire un nouveau jouet révolutionnaire : l’astronaute Buzz l’éclair. Rapidement, ce dernier remplace Woody dans l’esprit d’Andy. Mais Woody n’est pas prêt à se laisser faire… Dans sa volonté de se débarrasser de son ennemi, il s’égare avec lui loin de leur maison. Ils vont devoir tout mettre en œuvre pour rentrer avant le déménagement de leur propriétaire…


Il y a des réalisateurs qui mettent plusieurs films avant de trouver leur style et d’atteindre leur pleine maturité. John Lasseter n’est pas de ceux-là : dès son premier film, Pixar fait du Pixar. En effet, tout Pixar est d’ores et déjà résumé dans Toy Story.
Si l’aspect visuel du film a certes pris un méchant coup de vieux depuis 1995, ce dernier reste tout-à-fait regardable, tant l’animation se révèle d’excellente facture, d’une fluidité exceptionnelle, malgré des graphismes au réalisme plus que discutable (notamment les humains, franchement laids). C’est donc sous le signe de la révolution technique que se place Pixar dès ce premier long-métrage, un signe que jamais, au cours de leur carrière, les studios à la lampe ne délaisseront. Ce premier film montre une maîtrise technologique hors du commun qui en fait une œuvre pionnière, non seulement dans le domaine de l’art, mais aussi dans celui de la technique et de l’informatique, ce qui est toujours le signe qu’un génie ne se trouve pas loin…


En l’occurrence, de génie, il n’y en a pas ici un, mais plusieurs, et c’est bien dans leur talent conjoint que Toy Story trouve les moyens de se hisser à la hauteur de ses ambitions. Si les animateurs ont fourni un travail d’arrache-pied pour rendre leur film le plus crédible sur le plan visuel, Toy Story n’a pas à rougir sur le plan sonore. Ce qui n’est pas étonnant puisqu’on retrouve le pionnier Gary Rydstrom au design sonore, mais aussi - et surtout - le génial Randy Newman à la musique. Toujours, il parvient à trouver l’étincelle qui enflamme chaque scène pour la rendre vivante. Tour à tour légère, triste, tendue ou épique, la partition de Newman est toujours pleine de vie, tandis que ses chansons arrivent à point nommé pour introduire le soupçon d’émotion qui nous rappelle que l’on assiste bien à du Pixar.


Et de fait, Toy Story contient déjà en germe tout ce qui fera la grandeur de Pixar dans son message : profitant de la double lecture humain/jouet, dont se joue constamment une mise en scène pleine d’inventivité, le film s’adresse à tous, enfants comme adultes, pour leur rappeler que l’acceptation de soi passe d’abord par celle des autres et que l’on ne peut trouver sa place qu’une fois que l’on a découvert, compris et accepté ses propres faiblesses et éventuelles infirmités.
Fidèles à la règle selon laquelle ce sont toujours ceux qui ont accompli une chose exceptionnelle qui en parlent le mieux, les scénaristes ne reflètent là que leur propre parcours dans ce message aussi simple que fort : savoir se dépasser pour mieux trouver sa place, aussi modeste soit-elle. S'adressant aussi bien aux enfants, qui seront appelés dans un avenir plus ou moins proche à trouver leur place dans le monde où ils grandissent, qu'aux adultes, qui s'y appliquent tous les jours, Toy Story apporte un vent de fraîcheur inédit à son public, en reprenant les codes du buddy movie et même du film d’horreur, transposés dans le monde des jouets, et en les appliquant à l’animation.
En plaçant ainsi l’antagonisme classique entre deux personnages dans un monde radicalement différent du nôtre bien qu’y appartenant, les scénaristes nous offrent une double lecture prodigieuse d’intelligence et de subtilité, les personnages principaux étant à la fois des objets renvoyant directement à l’enfance et à son insouciance et des adultes à part entière, avec leurs doutes, leurs choix et leurs dilemmes. Proposant une vision de l’enfance d’une incroyable justesse, Toy Story prend sans cesse de la hauteur par rapport à son sujet pour nous permettre de nous immerger dans le récit aux côtés, voire à la place, des personnages, mais également de nous donner une vue d’ensemble qui nous permette de saisir toutes les implications d’une action, quelle qu’elle soit.


Ainsi, dès leur première œuvre, les studios Pixar dévoilent toute leur force : une animation visuellement un cran au-dessus de tout le reste, un scénario inventif et plein de sens, une double lecture qui apporte en profondeur, des personnages attachants, et un soin du détail poussé à l’extrême (on pourrait faire une dissertation sur les easter eggs de chaque Pixar)…
Révolutionnant l'histoire de l'animation, mais au-delà, également l’histoire du cinéma et tout simplement l’histoire de l’Art, Toy Story marque donc avant tout la naissance du plus grand studio que le cinéma d'animation ait jamais connu. Un studio qui continue et continuera toujours de faire rêver les enfants qui sommeillent en nous pour des générations et des générations à venir…

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le 16 juin 2019

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Tonto

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