Ayant particulièrement savouré Birdman, je m'acheminais vers ma salle sombre non sans enthousiasme ou emballement, et bien qu'il faille se défier des dithyrambes médiatiques en général, j'espérais bien trouver un certain contentement en ce nouveau long-métrage d'Iñárritu. De ce point de vue, je ne pourrais dire avoir été déçu mais je puis cependant émettre quant à cette œuvre quelques réserves, rendant ma perception bien moins inconditionnelle que celle de mon entourage. Il est certain que ce film nous donne à voir – et bien davantage, à contempler – une photographie pour le moins généreuse en images sublimes et apothéotiques, pléthoriquement poétiques, parsemant les deux heures et trente-six minutes de pellicule. S'il est certain que je ne saurais nier leur inconditionnelle beauté, je me suis trouvé au bout d'un moment las de celles-ci, m'étant habitué, et c'est assez triste de le dire, à leur exceptionnelle majesté. À titre de comparaison, je n'avais pas vu passer les quasi trois heures que Les 8 salopards avaient occupé de ma vie alors que ce film, légèrement plus concis, n'a pas manqué de susciter en moi quelques bâillements. Entrecouper le récit d'images naturalistes permettait au début d'oxygéner et d'aérer l'histoire mais une fois le véritable périple débuté il me semble qu'il aurait fallu sarcler la pellicule de ces manifestations contemplatives au milieu de ce drame d'action, créant une espèce d'entre-deux un brun alangui. Je n'hésite ici pas à m'appesantir sur mes réserves quant à ce film mais il ne serait pas véridique pour autant de prétendre que je ne l'aie pas apprécié. L'odyssée développée y est absolument fascinante de décadence et de beauté, nous conviant à suivre la renaissance d'un être qui, habité par la vengeance, progresse inlassablement dans une nature emplie de dualité, à la fois délicate et féroce, merveilleuse et inflexible, tout autant qu'admirable et cruelle. Épuré de tout lyrisme, excepté celui issu de sa volonté naturaliste, The Revenant nous donne à voir souffrance, violence et agitation, créant ainsi une exceptionnelle intensité se retrouvant dans le jeu du très investi Leonardo DiCaprio, une fois de plus emmené à incarner un homme tourmenté par l'ombre de sa défunte femme, rivalisant de supplices avec ce cher Bear Grylls, tourments habilement mis en valeur par ces nombreux plans-séquence marquant ostensiblement les volontés de réalisation, à savoir s'approcher du plus pur réalisme, quitte à bousculer et malmener le spectateur, littéralement scotché à son fauteuil rouge, lorsqu'on ne lui demande pas indûment de se mettre à rêver...


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le 26 févr. 2016

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MonsieurBain

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