Avec six films à son actif en vingt-deux ans de carrière, James Gray est un réalisateur qui sait se faire désirer. Dans The Lost City of Z, Gray abandonne la jungle New-Yorkaise qu’il connaît si bien pour l’Amazonie. Une jungle plus verdoyante, mais dont la dangerosité semble sans égale. Inspiré des aventures de l’explorateur Percy Fawcett, le film est une plongée dans une quête folle où la raison et la sécurité sont balayées par une soif inextinguible de gloire.


Le militaire Percy Fawcett est missionné par la Royal Geographical Society pour partir cartographier toute une région inexplorée séparant la Bolivie et le Brésil. En arrivant à la source du fleuve à cartographier, Fawcett découvre des restes d’une activité humaine dans une zone censée n’avoir jamais été foulée. Persuadé d’être sur les traces d’une ancienne cité, qu’il prénomme Z, l’homme n’aura de cesse de monter des expéditions pour tenter de trouver cette civilisation perdue au cœur de l’Amazonie.


Osant rarement laisser libre court à l’émotion dans ses films, Gray parsème ici la quête de son personnage de quelques magnifiques envolées lyriques. La relation père-fils est abordée avec brio et le poids de l’héritage paternel prend ici tout son sens. Fawcett est amené à accepter cette mission afin de laver l’honneur familial mis à mal par un père joueur et porté sur la boisson. Il se retrouve à son tour être un fardeau, catalysant le départ de son fils qui cherche à aider son père dans cette quête qui les a tenus éloignés pendant de si nombreuses années.


Le récit tire un peu en longueur, s’essoufflant à certains moments entre les nombreuses expéditions et une importante digression qui entraîne les protagonistes dans l’horreur des tranchées. Outre ce détail, la mise en scène, très soignée, invite le spectateur à contempler. On se retrouve hypnotisé par une photographie sublime, entraîné vers une fin de plus en plus incertaine. Gray parvient à retranscrire une ambiance moite, où la mort rôde et où la folie semble être un puits sans fond sur lequel notre héros aura réussi à mettre une fine pellicule de vernis. Avec un Robert Pattinson méconnaissable dans un contre-emploi, un Charlie Hunnam obnubilé et une Sienna Miller pleine de charme, la magie du casting est bien présente.


Cette quête obsessionnelle au fin fond de la jungle n’est pas sans rappeler un très bon film de Peter Weir, Mosquito Coast. Dans ces deux films, la figure paternelle se révèle incapable de prendre en considération les aspirations du reste de la famille, présumant du bien-fondé de leur propre ambition. Grand fan de Coppola, Gray exploite à merveille l’hostilité latente de ce fleuve remontée mainte fois par ses aventuriers. Une mise en scène de l’environnement fluvial dont on peut faire le parallèle avec celui du chef d’œuvre du maître, Apocalypse Now.


Un film d’aventure pour la forme, une quête intérieure pour le fond, The Lost City of Z est un pur émerveillement grâce à un récit captivant et une mise en scène raffinée. Une belle évasion cinématographique en somme.

Vincent-Ruozzi
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le 19 mars 2017

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Vincent Ruozzi

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