Yorgos Lanthimos crée des mondes parallèles gouvernés par le mensonge, l'absurdité et la mort. Comme pour Canine et Alps, le point de départ de The lobster s'impose avec autorité. Les célibataires n'ont pas le droit de l'être. Le couple est la règle.
Le scénario déroule son récit de survie dans le cadre du concept énoncé et décrit trois états du monde : la société des couples, le centre de rééducation, les célibataires regroupés en organisation secrète. Mais la meilleure idée n'est pas là. Tout le film tourne autour de l'évidence absurde, mais partagée, que les couples doivent être assortis. Il faut que ceux qui les composent boîtent à deux, ou bien saignent du nez, soient aveugles.
Comme à son habitude, Lanthimos s'en tient à son sujet, son plaisir étant d'en étudier les variations, en fouiller les recoins, faire l'inventaire de tous les possibles. Mais alors qu'il tenait jusque-là le rythme, il peine ici à rendre son film palpitant.
Ce n'est pas la mise en scène ni l'interprétation très fine de Colin Farrel, Rachel Weisz, Ben Wishaw et les autres (même Léa Seydoux est supportable), mais plutôt une absence d'enjeu. Si le sens de certaines scènes nous échappe (principalement chez les parents de la rebelle en chef), c'est l'histoire elle-même qui semble plombée par le poids du sujet.
Pourtant, si la première partie est meilleure que la deuxième, la disparité n'est pas si grande et le fil narratif se tient. Pas raté donc, solidement écrit, The lobster s'avère pourtant assez morose. Il lui manque quelque-chose, un souffle qui nous emporte, un désespoir dévastateur, une noirceur plus noire...