Présenté notamment au festival de Cannes en 2008 (où il connut une standing ovation d'une dizaine de minutes) et à Deauville en 2009, The Chaser fit l'effet d'une véritable petite bombe pour ceux et celles l'ayant découvert à l'époque, d'autant plus qu'il s'agit là du premier long-métrage de Na Hong-Jin après deux courts-métrages.


Inspiré par l'affaire Yoo Young-Chul, un tueur en série responsable d'une vingtaine de victimes féminines et un des rares criminels à avoir été condamné à mort en Corée du Sud depuis 1997, The Chaser ne cherche absolument pas à brosser le spectateur dans le sens du poil, s'éloignant drastiquement de ses attentes conditionnées par des décennies de cinéma occidental.


Qu'il s'agisse de son environnement, de son ton ou de ses personnages, The Chaser, tout en s'inscrivant dans la plus pure tradition du film noir, surprend sans cesse, jouant admirablement avec les codes du genre et maniant les ruptures de ton avec une habileté proprement diabolique. Tour à tour prenant, déroutant, tendu, drôle et ultra-violent, le premier essai de Na Hong-Jin réussit tout ce qu'il entreprend, de l'intrigue en elle-même à la construction de ses protagonistes, en passant par sa vision extrêmement critique de la société sud-coréenne et ses institutions.


Mettant en évidence l'incompétence des autorités et surtout l'absurdité d'un système judiciaire dépassé par les événements, The Chaser est surtout une traque implacable qui ne vous lâchera plus, ralentissant quelques instants pour mieux vous emmener où elle veut et vous fracasser l'estomac. Loin de tout manichéisme, le film nous plonge dans une atmosphère putride et déliquescente, exposant à nos yeux toute la misère cachée sous les jolis néons d'une ville se voulant exemplaire et à la pointe du progrès.


Au coeur de cette poursuite impitoyable, un affrontement qui ne pourra trouver qu'une issue tragique, celui d'une saloperie de la pire espèce, tueur de prostituées totalement imprévisible et sanguinaire derrière ses allures de gentil garçon, et d'un ex-flic reconverti en proxénète, uniquement soucieux de son pognon, et qui devra passer par le pire de l'humanité pour se sentir enfin concerné émotionnellement.


Malgré quelques baisses de rythme ici et là, The Chaser est un diamant noir brut de décoffrage, une virée désenchantée dans les bas-fonds de l'âme humaine, parfaitement construite et mise en scène, d'une rare violence émotionnelle et psychologique, prodigieusement interprétée par ses deux têtes d'affiche. Impossible d'en sortir totalement indemne.

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le 13 févr. 2016

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Gand-Alf

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