The Dark Detective.

Batman. C'est mon super-héros préféré, toutes boîtes confondues. (Cinématographiquement parlant surtout, car j'ai lu quelques BD, mais malheureusement pas assez.)
C'est pourquoi j'accueille toujours avec joie une nouvelle version du héros.
J'entends beaucoup dans mon entourage : "oh ben non, ils recommencent encore du début ?".
Je leur répond : "Qu'importe ! Au contraire, une nouvelle vision, un recommencement, ça peut être très intéressant."
Et après tout, James Bond lui-même a eu droit à son recommencement...
Donc, une version ultra-réaliste de Batman, dans un Gotham City sombre et pluvieux, avec une enquête policière retorse, pleine d'énigmes, de fausses pistes, de mystères, de révélations, impliquant plusieurs personnages de l'univers Batman, employés avec un très bon équilibre, ça donne une œuvre singulière, particulièrement excitante et réussie.
Un film de super héros qui penche plus du côté polar moite et glauque, c'est pas commun. Et c'est ce qui fait une des forces du film : son aspect enquête. Car Batman est un fameux détective. Épaulé par un Jim Gordon pas encore commissaire, il se lance dans le labyrinthe tissé par Riddler, avec quelques autres vilains au détour des méandres de ses recherches.
Riddler est bien exploité je trouve ici. Avec sa voix déformée, ses énigmes, ses cryptogrammes, son jeu de piste géant, conduisant notre héros dans les profondeurs et la noirceur de l'âme humaine et de Gotham.
J'avais quelques réserves au début sur le scénario, mais finalement, en y réfléchissant longuement, tout s'avère bien ficelé.
Paul Dano est un choix judicieux pour le rôle du principal antagoniste de cette histoire. Il mêle folie et intelligence avec brio. Vêtu de son masque et ses lunettes, il parvient à exprimer la folie et faire transparaître sa psychopathie rien qu'avec son regard. Ça c'est fort.
Le duo Gordon/Batman fonctionne bien. Tous deux face à l'adversité (que ce soit dans les rangs officiels ou dans les rangs ennemis), ils se démènent comme ils peuvent avec les indications les énigmes, au milieu d'une hostilité palpable.
Jeffrey Wright est un autre choix judicieux pour le rôle de Gordon.
Robert Pattinson se défend brillamment en Batman, et en Bruce Wayne aussi. Ce Bruce Wayne est dépressif, rongé par la culpabilité, la haine, la colère et la tristesse. C'est le côté obscur de Wayne/Batman qui transpire le plus, pour ainsi donner une autre version du mythe, et de ce fait se démarquer de ses prédécesseur.
J'aime beaucoup ce Batman qui s'avance vers ses ennemis, lentement (et pas au ralenti, nuance), implacable, inéluctable. Ses coups lors de ses combats paraissent particulièrement brutaux, sans retenue, pour faire mal.
Par ailleurs, j'aime beaucoup les petits détails comme les traces sur son masque du fait d'affrontements répétés.
Robert Pattinson est excellent dans son rôle. Personnage torturé, en proie à la souffrance et au doute. Par contre, la voix off m'a parfois fait tiquer. Trop envahissante, peut-être sortiront-ils une version alternative sans voix off, comme un illustre prédécesseur narrant également une enquête dans une ville (futuriste) sombre et pluvieuse...
John Turturro est très bon aussi, se dressant face à lui tel un cobra, menaçant par sa prestance, prêt à frapper à tout moment,directement ou insidieusement.
Zoë Kravitz s'en sort avec les honneurs aussi. Même si son fouet est sous-employé. Elle est mystérieuse, sensuelle, insaisissable. Une Catwoman convaincante. Même si son flirt avec Batman paraît factice et superflu, étant donné qu'ils laissent entendre qu'elle est lesbienne. Malgré le fait qu'elle puisse être bi, cette amourette fait tache.
Question réalisation, Matt Reeves propose des plans superbes, des jeux d'ombres saisissants, certaines scènes sont géniales. Le combat dans la pénombre éclairé simplement par les coups de feu, c'est désormais une référence en la matière je trouve. Il y a bien d'autres exemples qui valent le détour.
La musique est également une réussite. Ce thème accompagne parfaitement ce Batman.
Cette proposition de Batman est une réussite. Même si on ne voit pas sa création, on assiste à la transformation d'un Vengeur en justicier. Il passe de Vengeance à Justice.
Ce Batman ne sauvera peut être pas le monde, mais il pourra nous sauver nous spectateurs.
J'en reprendrai volontiers une tranche. Et d'après l'une des dernières séquences, je devrais être servi.