Je n'ai jamais pris le temps d'écrire une critique sur l'un des films des Frères Coen, c'est la constatation que j'ai faite une fois le générique de fin lancé. C'est pourtant le 14ème que je vois et je suis un vrai client de leur style unique. Je pourrai vous réciter les répliques cultes du mythique The Dude, je considère Fargo, Miller's Crossing ou Barton Fink comme de véritables petites perles. Il m'arrive de siffloter les thèmes d'O"Brother, j'ai l'impression que John Goodman, John Turturo, Steve Buscemi et Frances McDormand sont de vieux oncles et tantes et je leur pardonne même des récits bien plus faibles comme Intolérable Cruauté ou Burn After Reading.

Alors lorsque je termine The Barber, je questionne et je me dis que c'est peut être le bon moment, d'autant que celui ci m'a une nouvelle fois transporté. Pas de la même façon qu'un Wes Anderson qui me plonge dans un doux rêve mélancolique, ça ressemblerait plus ici à un cauchemar mais paradoxalement jamais dérangeant. Peut être est-ce dû à la narration singulière, forcément lorsqu'on est guidé par la voix grave d'un Billy Bob Thornton grandiose, d'une nonchalance et d'une distance inopinée mais d'une efficacité redoutable face à l'affreux récit conté. Peut être que la photographie sublime et ce parti pris de noir et blanc qui pourrait nous faire croire qu'Henry Fonda ou Fred MacMurray vont surgir à tout instant a su me conquérir. Il est possible que ses seconds couteaux, James Gandolfini en patron infidèle, Tony Shalhoub en brillant avocat, ou encore Jon Polito en escroc dégarni et dégoulinant de sueur tentant de séduire un Thorton impassible aient pu jouer un rôle.

Rythme lancinant, cette hymne au polar des années 40 multiplie les hommages et clin d'oeil à Hawks, Wilder, Huston ou encore Hitchcock se complaît dans son marasme et met en avant l'imperfection de ses protagonistes, laids et stupides commettant des erreurs énormes, prenant de mauvaises décisions à cause d'un mauvais fond. Cette absence de manichéisme ne donne qu'un cachet plus imposant à cette atmosphère imbibé d'avidité et d’égoïsme et c'est dans cette apparente banalité que tout se joue. La dénonciation du système judiciaire version Coen prend ainsi tout son sens et n'a aucun mal à prendre une direction différente d'un Lumet. En résulte un film envoutant qui offre un conclusion que je ne suis pas prêt d'oublier.

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