Sémiologie de l’image : une affiche et une jaquette du film Taxi Driver analysées

La sémiologie se conçoit comme l’étude des signes. Dans une image, on appelle « signifiant » la définition grammaticale d’un objet, son rôle physique et matériel, et « signifié » sa face immatérielle, conceptuelle, qu’on peut appréhender selon différents contextes. Voici l’analyse de deux images publicitaires du film Taxi Driver, qui rend compte de deux époques et deux contextes marketings différents. La première était présente pour promouvoir le film à sa sortie en salles, alors que la seconde fut réalisée à l’occasion de sa sortie en DVD.

L’AFFICHE CINÉMA : UN URBANISME ÉTRANGE

https://i.ibb.co/8gPjZHc/1552412.jpg

La première image s’articule tout autour de plusieurs champs sémantiques liés logiquement de manière émotionnelle. Si la perception de ces messages varie selon les sensibilités de chacun, on peut remarquer cependant 4 thèmes majeurs : l’urbanisme, la réflexion, la solitude et la sexualité. La perception de ces thèmes n’est pas forcément consciente, mais guide l’interprétation de l’affiche.

Le thème de l’urbanisme

Au premier abord, l’iconographie générale expose de manière frappante l’environnement urbain, à tel point que toute l’affiche est recouverte de béton ou d’éléments typiques du milieu : une petite foule, une ruelle étroite, un sex shop, un trottoir, une chaussée, un passage piéton et un homme au centre.

Ces éléments graphiques font appel à la compétence dite encyclopédique du spectateur afin que celui-ci puisse connoter une tension stéréotypée : la foule est le symbole d’un rythme de vie effréné, la ruelle cache une vie clandestine parfois illégale (délinquances oppressantes, prostitution perverse, trafics de stupéfiants, etc.) et le fait que la ville soit finalement figurée en noir et blanc démontre cette volonté d’exposer un réalisme urbain obscur, malfamé et moralement douteux.

À travers la connaissance culturelle de la vie en milieu urbain, deux fonctions morales de deux types de société sont signifiées et se confrontent de manière tacite pour le spectateur.

1) Le quotidien familial et professionnel. Cette ligne de vie a un rôle majeur dans l’éducation, l’affectif et l’ordre. Sa fonction morale appartient à ce qu’on appellera la société courante.

2) Les extrêmes de la liberté sociale. Cette ligne de vie entretient un individualisme, un narcissisme et une ambiguïté des règles imposées. Sa fonction morale appartient à ce qu’on appellera la société des extrêmes.

Ces deux sociétés (l’une est évidente, mais simplement supposée à travers la compétence culturelle du spectateur, l’autre plus signifiée déjà sur l’affiche à travers la ruelle ou le sex shop) cohabitent, se confrontent, s’opposent. Elles sont unies malgré elles, et leur dichotomie fait naître une tension morale qui persiste dans la ville.

Manifestement, cette tension morale est portée par le personnage principal, ce qui nous emmène émotionnellement au thème majeur numéro deux.

Le thème de la réflexion

Le personnage central est le lien entre ces deux thèmes. Il connaît ce milieu de tension et transporte en conséquence un mal-être social presque évident, ce qui le fait réfléchir. Plusieurs signes iconiques le montrent à travers une mise en scène caractéristique : il est replié sur lui-même, regarde le sol, a les mains dans les poches. Deux autres symboles prouvent cet état de fait :

1) Le titre du film, Taxi Driver. Ce signe linguistique possède une fonction de relais : il suppose très fortement et directement quelle est l’activité professionnelle du personnage puisque ce dernier est mis en avant sur l’affiche au premier plan, comme désigné par le titre. Par conséquent, le fait qu’il soit chauffeur de taxi témoigne du fait qu’il vit à l’intérieur cette tension urbaine, qu’il la vit quotidiennement et professionnellement, et qu’il doit probablement recevoir la société dite de l’extrême dans le siège de sa voiture. Cette profession, dans ce cas, pourrait dès lors être perçue comme le point de rencontre involontaire entre les deux sociétés sus-citées. Le chauffeur de taxi, en tant qu’homme de métier, représenterait alors la société courante, tandis qu’une prostituée ou un trafiquant symboliseraient celle dite de l’extrême.

Le rôle du titre est fondamental pour connoter cette rencontre, car il permet de justifier et de comprendre la manifestation de son mal-être social.

2) Le noir et blanc. Le fait que toute l’affiche soit figurée en noir et blanc amène à penser qu’il fait partie intégrante de cette ville : lui aussi est en noir et blanc. Son attitude démontre encore une fois que ce fait le dérange.

(...)

Pour lire la suite : https://www.lemagducine.fr/cinema/analyses/semiologie-deux-images-publicitaires-du-film-taxi-driver-analysees-10068284/

Je suis désolé de ne pas pouvoir tout vous partager sur SC.

OkaLiptus
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste De la difficulté d'être un homme : déconstruire le mythe du privilège masculin

Créée

le 10 avr. 2023

Modifiée

il y a 4 jours

Critique lue 1.4K fois

57 j'aime

49 commentaires

Oka Liptus

Écrit par

Critique lue 1.4K fois

57
49

D'autres avis sur Taxi Driver

Taxi Driver
Kobayashhi
9

La prostituée et le Chauffeur de Taxi. La Scorsese

"All the animals come out at night - whores, skunk pussies, buggers, queens, fairies, dopers, junkies, sick, venal. Someday a real rain will come and wash all this scum off the streets. " C'est par...

le 15 oct. 2014

155 j'aime

3

Taxi Driver
DjeeVanCleef
10

Un Prophète.

On pourrait disserter des semaines sur les qualités de ce film, un pur chef-d’œuvre, peut être même le seul vrai joyau de Scorsese. Celui qui, sous mes yeux, dans mon cœur brillera pour des millions...

le 29 sept. 2013

135 j'aime

25

Taxi Driver
JimBo_Lebowski
10

Le Solitaire

Mon expérience avec Taxi Driver a commencée dans une salle de cinéma de quartier il y a 15 ans, tout jeune lycéen ouvert à l'œuvre des Kubrick, Tarantino, von Trier et autres P.T. Anderson, j’étais...

le 27 oct. 2015

131 j'aime

9

Du même critique

Edward aux mains d'argent
OkaLiptus
10

Once upon a time in Hollywood...

"Bien sûr qu'il avait un nom, il s'appelait, Edward..."Autrement dit, Tim Burton. Œuvre magistrale, naïve, irrésistible, foudroyante, féerique, mais qui sait jouer du réel tout en intégrant les codes...

le 6 déc. 2023

105 j'aime

75

Léon
OkaLiptus
10

And she's buying a stairway to heaven

Par la présence presque organique de la musique lancinante, parfois explosive d’Eric Serra, Léon est un concert sons et lumières, où les bas-fonds sont exposés dans un cortège funèbre aux autorités...

le 7 avr. 2023

91 j'aime

50