Avec Sept ans au Tibet, Annaud veut faire un film de la démesure, avec de grands décors à ciel ouvert et un voyage aussi bien géographique que culturel et spirituel. Son scénario mélange le genre du film d’aventures à l’ancienne, où le héros doit accomplir un certains nombre d’épreuves, et une rencontre plus intimiste avec un personnage presque mythique, le Dalaï-Lama. Je dis bien personnage, car bien que basé sur des faits réels le film est largement romancé.
Je vais passer sur certaines facilités du film qui sont aussi très liées à son époque. Oui, le film n’a pas été tourné au Tibet et ça se voit, et oui, les dialogues en anglais avec des accents pourris frisent le ridicule. Remettons quand même en contexte que tout passer en anglais avec un accent « pour faire comme si » était la norme à l’époque. Et si je suis bien contente que nous arrivons aujourd’hui à avoir des films multilingue, c’est un procès un peu dur que de reprocher ce point à Sept ans au Tibet.
S’il faut retenir quelque chose des 2h de film d’Annaud, c’est plutôt son manichéisme et son recours au pathos. Sept ans au Tibet parle du voyage d’Heinrich Harrer, alpiniste égocentrique balloté entre la guerre et ses envies de gloire personnelle, qui formera une amitié improbable avec le Dalaï-Lama. Sa découverte et son apprentissage de la culture tibétaine lui amèneront une paix intérieure, sciemment contrastée par l’oppression chinoise croissante. Annaud n’y va pas subtilement, et compare même dans sa mise en scène l’Autriche nazie avec l’invasion chinoise. Oui, de terribles choses se sont passées, mais un peu plus de subtilité aurait été de mise, surtout que le réalisateur simplifie également à l’extrême la civilisation tibétaine.
Pareillement, le personnage d’Harrer est très simplifié, et sa personnalité manque de complexité. Sans fond sur lequel s’appuyer, Brad Pitt enchaîne les longs regards et les moues introspectives, mais sans jamais réussir à incarner un réel changement intérieur. Sa relation avec Peter ( David Thewlis), très intéressante au début, s’affadit progressivement et verse dans le caricatural.
Globalement, si le film est beau, il souffre d’un trop grand manichéisme et d’un recours constant aux bons sentiments, ce qui le vide petit à petit de son intérêt. Le retour d’Harrer dans son pays natal, abandonnant ainsi son nouvel ami, ne nous laisse ni chaud ni froid. Annaud confond la paix intérieur et la vacuité.