Séance de quinze heures. J'ai pris soin de venir avec beaucoup d'avance, histoire de pouvoir me garer près de mon cinéma et, surtout, d'anticiper les files d'attente que je supporte de moins en moins. Car il s'agit d'un Star Wars, phénomène planétaire ultra attendu. Et parce qu'il s'agit, surtout, de Rogue One, dont la production a été plus qu'agitée en coulisses, au point de nécessiter des reshoots, de changer tardivement de compositeur et, officieusement, de réalisateur. Même si, de ce point de vue, Gareth Edwards est encore crédité aux manettes de l'entreprise. Je pensais donc, aussi, être noyé au milieu des vautours venus admirer l'ampleur de la catastrophe industrielle et se repaître d'un cadavre encore chaud.


Mais surprise. Accès quasi immédiat à la caisse, peu de gens dans la salle, Rogue One : A Star Wars Story se savourera donc, pour moi, dans les meilleures conditions possibles de confort et de tranquillité. Bien calé dans mon fauteuil rouge fétiche, un tube de Mentos à la menthe en main, surprise : mais où est donc passé le texte habituel qui ouvre tous les Star Wars ? J'oubliais ici que que Rogue One, ne s'inscrivait pas directement dans l'univers des films originaux, mais s'envisageait plus comme un à-côté, un coin du voile que l'on lève sur des événements annexes, envisagés comme une mine de scénarios et de personnages qui seront à même d'enrichir la licence et de garantir, pour Disney, un rapide et juteux retour sur investissement.


Mais Rogue One ne s'aventure pas en terre inconnue pour autant, loin de là : les clins d'oeil sont légion, les principales figures stylistiques sont reprises à l'identique. On y retrouve les mêmes scènes de dogfight, ou encore ces séquences de varappe sur de très hautes tours métalliques au coeur d'une des bases de l'Empire. Plus surprenant, cependant, il est peu fait recours à la force, sauf par l'intermédiaire du personnage de Donnie Yen. Et surtout, le sabre laser, l'arme mythique de la saga, est quasi absente.


La part belle de l'oeuvre est donc donnée aux rebelles, et plus particulièrement à un personnage féminin, Jyn Erso, s'inscrivant dans la classique dramaturgie familiale chère à Star Wars et basée sur l'absence du père. cette relation est la pierre angulaire du film, incarnée par un Madds Mikkelsen comme toujours très bon. Cette thématique investit toute la première partie du film. Si elle est intéressante, elle pourra parfois donner l'impression de ralentir l'action, même si elle est aussi l'occasion de présenter la résistance sous un jour moins naïf. En questionnant par exemple sur les sacrifices nécessaires que réclame la cause. Elle est aussi le prétexte à visiter de nouvelles planètes et d'offrir aux fans une escarmouche en pleine rue dont les prémices prennent la forme d'un attentat terroriste, ainsi qu'une jolie attaque nocturne, menée sous la pluie, d'une base de l'Empire.


Mais tout ceci n'est qu'une répétition générale en vue d'un climax étalé sur environ trois quart d'heures braconnant sur les terres du film de guerre dont il reprend de manière assez magique l'imagerie pour l'adapter à l'univers de Star Wars et faisant débouler, dans un décor d'île tropicale inédit au sein de la saga, tous les vaisseaux mythiques ainsi que les massifs AT-AT Walker de L'Empire Contre Attaque. Trépidant, mené sur plusieurs échelles allant de l'intime à l'espace, ce final épique constitue LE sommet de l'oeuvre, reprenant par ailleurs à son compte d'incroyables scènes aériennes tandis que Gareth Edwards filme caméra à l'épaule ses protagonistes plongés dans la tension des combats menés au sol. Jusqu'à un épilogue finalement assez amer mais irrigué de jolies images de la fin d'un monde.


Rogue One est donc un sacré spectacle, généreux, solide et dont l'action se glisse très bien entre les lignes de la mythologie initiée par George Lucas. La seul chose qu'on pourrait peut être lui reprocher, c'est de ne pas bénéficier, comme Le Réveil de la Force, d'un antagoniste inédit et charismatique, qui pourra sembler comme un véritable manque aux yeux des fans. Mais une fois passé cet écueil, cette Star Wars Story emmènera encore une fois son spectateur, avec facilité, dans une galaxie lointaine, très lointaine...


Behind_the_Mask, qui cherche désespérément son sabre laser.

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le 14 déc. 2016

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