Les films de Richard Curtis (en tant que scénariste ou réalisateur) ont parfois été critiqués pour sa vision trop conservatrice de la société britannique. Quatre mariages et un enterrement semble se dérouler dans une Angleterre d’un été éternel, une terre qui se compose presque entièrement de campagnes verdoyantes (et très agréables) et de quartiers plus exclusifs de Londres peuplés uniquement par la classe moyenne supérieure. Le film traverse la frontière, dans une Écosse tout aussi idéalisée, de brumes, de tartans et d’aventures à la Highlander. Il y a un fond de vérité dans cette critique (une vision trop conservatrice de la société britannique), mais c'est largement hors de propos lorsqu’il s’agit d’évaluer les mérites du film, parce qu’elle ignore le fait que la plupart des comédies romantiques se situent dans un contexte relativement restreint en terme de classe sociale, justement pour en dénoncer les dérives. Jane Austen par exemple, situait toutes ses œuvres parmi la riche noblesse terrienne ou la bourgeoisie prospère de l’époque (l’Angleterre du XIXe siècle).

L’action du film se déroule principalement pendant, juste avant et juste après l’un des quatre mariages mentionnés dans le titre. Charles (Hugh Grant) est un jeune homme aisé, probablement éduqué à l’école publique et clairement un membre de la classe moyenne supérieure, bien qu'au final ne ne sachions pas grand chose de lui (on ne le voit jamais au travail ou en famille). Le film commence par un mariage où Charles rencontre Carrie (Andie MacDowell), une jolie jeune femme américaine. Le film retrace ensuite les hauts et les bas de la relation entre Charles et Carrie ...

Hugh Grant est sensationnel dans le rôle de Charles, un homme séduisant, drôle et d'une maladresse très touchante. C'est un acteur qui a une gamme de jeu relativement restreinte, mais il est exceptionnel dans ce genre de rôle. Il y a certaines différences subtiles entre Charles (dans Quatre mariages et un enterrement) et William (dans Notting Hill), une autre comédie romantique écrite par Richard Curtis avec Hugh Grant. William est un jeune homme timide, qui utilise l’ironie et l'autodérision pour cacher son manque de confiance en soi. Il est très amoureux d’Anna, l’héroïne de Notting Hill, mais a peur de déclarer son amour parce qu’il ne peut pas croire qu’une aussi belle star de cinéma s’intéresse au propriétaire d’une petite librairie. Charles, en revanche, est moins timide que William et connaît plus de succès auprès des femmes. Son humour est également ironique, mais pour une raison différente. Il a peur de ses émotions et utilise l’ironie comme moyen de mettre une distance et d’éviter d’avoir à s’engager dans le couple.

Hugh Grant arrive à donner de l'empathie à son personnage et à le rendre fort sympathique, malgré ses nombreux défauts. Il est maladroit, sujet aux accidents (il arrive à perdre la bague des fiançailles au mariage d’Angus), très enclin au langage profane et sans tact, d'une manière particulièrement épouvantable, en particulier lorsqu'il se retrouve à la table de ses anciennes petites amies.

Le film peut être vu comme le voyage intérieur de Charles pour gagner en maturité et pour assumer sa part émotionnelle. Il a eu un certain nombre de liaisons, toutes brèves et qui se sont toutes terminées brutalement, précisément parce qu’il a peur de s'engager. Sa relation avec Carrie commence mal, puisqu'elle est sur le point d'épouser un homme plus riche et plus âgé. Le changement de caractère de Charles est en partie dû au fait que son monde de célibataire insouciant prend fin, tandis que la plupart de ses amis se marient l'un après l'autre. Mais l’événement qui semble avoir le plus d’effet sur lui, ce sont les funérailles de Gareth (Simon Callow), au cours desquelles un éloge émouvant est lu par Matthew, le partenaire gay de Gareth, joué de manière très touchante par John Hannah. Charles prend conscience du pouvoir de l’amour et en vient à apprécier qu’une telle relation puisse exister.

Le film est, cependant, bien plus qu’une simple étude des relations amoureuses. C'est aussi très drôle, grâce à des situations toujours plus loufoques et des dialogues jubilatoires, ainsi qu'une pléiade d'acteurs de seconds rôles très talentueux. Ainsi, Rowan Atkinson a un petit rôle en tant que prêtre stagiaire maladroit et nerveux, qui ne cesse de trébucher sur chaque mot qu'il prononce. David Bower joue le rôle de David, le frère sourd de Charles, drôle et attendrissant. On retrouve aussi la regrettée Charlotte Coleman dans le rôle de Scarlett, la jeune sœur impudente de Charles. Et puis Anna Chancellor interprète son ex-petite amie Henrietta (également connue sous le nom de Duckface), dont l’incontinence émotionnelle devient très vite embarrassante, ce qui explique peut-être pourquoi Charles tient tant à se mettre à distance d'elle. Il y a des funérailles poignantes, plus tard dans le film, avec John Hannah prononçant un éloge funèbre passionné et qui vaut vraiment la peine d’être vu/écouté. Par contre, je suis moins enthousiaste concernant Simon Callow, qui en fait des tonnes dans le rôle de Gareth, un personnage extraverti et excessivement bruyant (comme la plupart des personnages interprété par l'acteur).

Quatre mariages et un enterrement est une comédie romantique drôle et émouvante, avec une bonne dose de bons sentiments. Réalisé d'une main de maitre par Mike Newell, le film profite d'un Hugh Grant en pleine forme jouant l'Anglais séducteur et légèrement maladroit, un rôle qu’il a breveté au fil des ans. L’ensemble de la distribution s’intègre bien avec un bel humour so british. Andie MacDowell est le seul membre du casting qui ne semble pas à sa place, dans le rôle de Carrie. Carrie est un personnage qui n’a rien pour elle. Elle n’est pas attrayante du tout et on ne sait rien sur elle, si ce n'est qu'elle est infidèle et qu'apparemment elle n'est pas très intéressée par Charles. Alors pourquoi voudrions-nous qu’ils finissent ensemble ? Alors certes, Andie MacDowell est sublime, mais il y a quelque chose chez elle qui ne colle pas avec son personnage. Carrie est belle, mais d'une beauté irritante, voire même exaspérante !

Pour résumer, Quatre mariages et un enterrement c'est la crème de la crème des comédies romantiques anglaises. C'est la preuve que le cinéma britannique peut produire des comédies romantiques aussi bonnes qu’Hollywood, si ce n'est encore meilleures.

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le 13 mars 2023

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