Robinet d'eau tiède

Je vais encore passer pour un pisse-vinaigre, un bonnet de nuit. Tant pis. Pourtant, Qu'est ce qu'on a Fait au Bon Dieu n'est pas inintéressant, comparé à l'état végétatif et comateux de la comédie française actuelle. Vous me direz que ce n'est pas difficile. Certes. Mais pour une fois, Christian Clavier n'est ni grimaçant, ni hystérique. Chantal Lauby tient à peu près la baraque, sans exceller. Le scénario est ultra attendu et prévisible. Malgré tout, cela se laisse suivre sans grosse difficulté.

Non, ce que je reproche au film, c'est d'être un véritable robinet d'eau tiède. Là où on arrache un sourire, un éclat de rire franc et massif aurait dû se faire entendre. Il est révolu le temps des Rabbi Jacob et autres comédies lointaines, autrement plus corrosives dans leur représentation d'une communauté, n'importe laquelle. Car elles ne pourraient tout simplement plus se monter aujourd'hui, à force de frilosité, d'autocensure et de volonté de ne froisser personne. Cette comédie qui ne va jamais au bout de son argumentaire aurait dû être bien plus rentre-dedans et faire grincer les dents de tout un chacun. Mais non, très consciente d'évoluer sur un terrain miné par les associations autoproclamées représentatives des communautés dépeintes ici, l'oeuvre fait rire sur la pointe des pieds tout en recyclant des poncifs moisis et des blagues à barbe de 40 ans, usées jusqu'à la corde et rabachées. Ces clichés auraient pu être certes repris, mais pour être déconstruits ou, au moins, pour en montrer tout le ridicule. Mais non, au contraire, ils sont perpétués et utilisés comme terreau d'un rire mou et inoffensif, digne d'un spectacle dominical somnolent de maison de retraite, histoire bien sûr de ne se mettre personne à dos. Il serait en effet très bête de cracher sur quelques billets en plus.

Bien sûr, inutile de dire que cela se termine en chansons et en sourires. Que tout le monde est content et que le vivre ensemble par delà les différences, c'est génial. S'il est nécessaire, surtout en ces temps-ci, de répéter la dernière partie de ma phrase, j'aurais simplement voulu que ce film le fasse d'une toute autre façon. Tiens, par exemple, avec des éclats de rire nerveux et/ou francs.

N'est-ce pas le but de toute comédie ?