« Premier Contact » fait partie de ces films qui réunissent les caractéristiques d’un blockbuster (gros budget, effets spéciaux, casting attrayant…) tout en ayant une réelle proposition artistique au-delà de vouloir divertir le public. Avec ce film, Denis Villeneuve incorpore dans sa structure narrative des questionnements d’ordre social plus complexes que ceux proposés habituellement dans le cinéma de science-fiction « grand public ».


En effet, si le film parle à première vue d’une tentative de dialogue entre l’humain et une espèce extra-terrestre, il interroge les facultés d’échanges des hommes entre eux et raconte comment les rapports de force et les états émotionnels influent sur notre capacité à communiquer.


Cela est souligné plusieurs fois dans le scénario, comme dans la scène où Louise Banks (Amy Adams) réussit à convaincre un général de l’armée chinoise de ne pas attaquer les extra-terrestres. Cela est rendu possible grâce à un don surnaturel, pouvoir inconcevable dans notre réalité mais sans lequel l’impossibilité du dialogue entre les nations engendrée par un manque de confiance réciproque, aurait été la raison d’une déclaration de guerre inter-espèces.


Dans ce cas précis, Denis Villeneuve nous signifie que l’incompréhension due à une absence de dialogue peut être source de violence et de destruction, alors même que l’arrivée des aliens sur Terre est dénuée de toute forme d’agressivité.


Un autre élément donne un intérêt supplémentaire au long métrage : le choix d’un montage parallèle avec des séquences de la vie de Louise au moment où se déroule l’action principale, et des séquences appartenant à une autre temporalité. Le choix de ce procédé n’est pas original en soi, mais l’utilisation qui en est faite déstabilise : ce sont des séquences que le spectateur classe spontanément comme fragments du passé du personnage, car l’une d’entre elles est utilisée pour l’ouverture du film. Pourtant il n’en est rien. À un certain point de la narration, on comprend que celles-ci sont parties intégrantes du futur, et donc, que tout ce qui s’y passe n’est pas encore arrivé. Un retournement de situation tragique s’effectue alors, car on comprend que le personnage sait tout de son avenir, qui plus est funeste.


Le processus est très astucieux car il permet d’induire en erreur le spectateur afin que la révélation l’impacte plus violemment que si cette dernière avait été véhiculée de façon ordinaire. Cela donne une dimension mélodramatique supplémentaire au film, appuyée avec justesse par le choix de la bande originale (particulièrement la composition de Max Richter), qui renvoie cette fois-ci à une interrogation morale tortueuse mais intéressante à sonder.


En effet, le choix de Louise de vivre sa vie malgré la connaissance des événements malheureux qui la composeront invite le spectateur, grâce au processus d’identification, à se questionner sur le choix qu’il aurait fait s’il avait été à sa place.

neocinesis
8
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le 9 avr. 2023

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neocinesis

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