Ah Denis,


J’ai voulu y croire, jusqu’au bout.
Croire que ton film allait devenir une pierre angulaire de la SF à gros budget.
Croire qu’une nouvelle œuvre SF allait enfin remodeler tout le respect dont ce genre manque cruellement.
Tout, dans l’intention du film et dans le propos, était déjà bien plus intelligent que beaucoup d’autres grosses productions récentes du même genre. Ton film est bien mieux et moins pédant qu’un « Interstellar » ou qu’un « The Martian », en ayant moitié-moins de prétention et de budget.


Tu sais le filmer ton film, ça se voit. Quel plaisir de voir dans une grosse production des cadres et des scènes enfin posées, une caméra fixe qui ne gigote pas de partout, des plans presque contemplatifs, surtout lors de l’introduction. Quel respect lorsque tu filmes les vaisseaux aliens. L’impact visuel est là et tes plans resteront dans les esprits. Ta photographie est par ailleurs sublime, comme dans chacun de tes films précendents.


Tu connais tes influences, mon gars. Sans jamais t’en vanter pendant les campagnes publicitaires, tu t’inspires des noms connus de SF pour en imprégner ton film. Impossible de ne pas penser au monolithe de « 2001, l’Odyssée de l’Espace » en voyant les vaisseaux aliens et l’intérêt de leur présence dans le film, ou bien à « Interstellar » pour la sous-intrigue familiale.


Même après de nombreux films à gros budget, dont « Prisoners » ou « Sicario », on sent toujours ta patte, Villeneuve, et ça vraiment bien. Un réel auteur derrière tes œuvres, tu arrives à faire des films comme tu le souhaites.


Tu as quand même réussi à attirer le grand public pendant 2 heures dans les salles de cinéma pour juste voir deux scientifiques qui tentent de communiquer avec une entité inconnue. Et tu le tiens pendant au moins les deux-tiers du film, ton propos. Le contexte militaire est bien présent (forcément dans des moments pareils) mais ne parasite pas du tout le déroulement du récit et surtout, paraît plutôt cohérent. De même que le partage d’informations entre les différentes nations, tout en gardant un minimum de secret pour l’intérêt national. Le language qui commence à se développer entre les deux civilisations est réfléchi, intelligent et plutôt bien retranscrit à l’image.


Par contre tes choix de casting, je ne suis pas fan. Le rôle principal tenu par Amy Adams est touchant et percutant, bien que banal. Mais prendre Jeremy Renner… Merde, j’ai quand même beaucoup de mal avec cet acteur incapable de jouer la moindre nuance. Ce n’est pas pour rien qu’il finit en second rôle chez Marvel dans un rôle inintéressant. Bon point cependant, c’est bien une des rares fois où j’étais content de voir Forest Whitaker à l’écran. Peut-être parce que son personnage n’apparaît pas tant que ça à l’écran en fait.


Et puis, t’aurais pu te calmer dans les CGI, aussi. Dès le début, on voit presque clairement le design des aliens, ce qui met tout de suite dans le bain. Leur design tentaculaire est une des bonnes idées du film. Ça ne ressemble à rien de vu précédemment, tout en gardant une cohérence dans l’imaginaire humain pour ne pas décontenancer le public. Et il évite l’écueil du ridicule. Mais plus les scènes passent, et plus leur présence paraît banale, ce qui en réduit d’autant plus leur impact. Et lorsque vient le moment de voir leur corps en entier et leur proportions jusqu’alors assez approximative, ça reste tout impressionnant mais ça réduit encore plus l’impact de leur présence. Leur omniprésence réduit leur impact mystique et visuel. Et puis les cheveux de Amy Adams en CGI lors de cette scène, ce n’était pas obligé, hein. Pas du tout.


Seulement voilà. Pour moi, tu flingues toute ton intrigue dans les 20 dernières minutes. La compréhension du message alien par les humains et son intérêt est bien vu et intéressant dans le propos.


Mais…


Le lier à ton intrigue familiale et verser dans le pathos le plus complet, tout d’abord avec la scène avec le colonel japonais, et ensuite par le final liant présent et futur, c’était un peu facile. Tout comme l’était la fin naze de Interstellar.
Pourquoi relier toutes les intrigues des films de SF récents à l’histoire du personnage principal ?
Les plus grands films de SF laissaient leur personnage divaguer, s’abandonner et se perdre dans les méandres de l’espace. C’est la meilleure forme de respect, et la plus réaliste, qui est concevable dans un film de science-fiction qui se veut réaliste. Je ne peux pas m’empêcher de voir un message ultra-américain dans cette façon de dire « L’amour de la patrie et de la famille nous sauvent de la toute-puissance de l’espace et de l’inconnu. »


Ce n’est pas un reproche, car cette fin reste beaucoup moins incohérente que celle d’Interstellar. Mais espérons que ces fins moralisatrices ne deviennent pas courantes dans les films de SF américain et que tu nous fasses quelque chose d’autrement plus profond dans ta suite de Blade Runner.

SylvainL1
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le 1 févr. 2017

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SylvainL1

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