Un film catastrophe pas si catastrophique que ça
Deuxième Blockbuster pour le brillant Alex Proyas, et deuxième semi-déception après I, Robot, véhicule pour Will Smith et le placement de produit ( Converse, voiture, etc.).
Si I, Robot se voyait gangrené par un traitement idiot (gamin side-kick crétin, punchlines navrantes destinées à remplir artificiellement la bande-annonce), il restait des ambitions SF fortes, laissant une certaine place à la maestria de la mise en scène de Proyas.
Là, pour Prédictions, c'est un peu pareil, derrière la semi-déception, il y a de beaux restes, avec de vrais morceaux de cinéma dedans.
La bonne surprise de Prédictions, plus iconoclaste et radical qu'il n'y paraît, c'est la main-mise franche et épanoui de Proyas, peut-être dû au caractère indépendant du film (pas de major), le réalisateur étant également producteur exécutif.
Les parti-pris de Proyas, qui n'hésite aucunement à faire basculer le genre de son film, virant du thriller parano à la SF la plus hardcore, sont incontestablement couillus.
Pari risqué et à moitié probant, demandant une adhésion sans faille au spectateur, qui se doit d'accepter des concepts radicaux et une imagerie new age passablement laide.
Le film est porté par une relation père-fils qui réussit à ne pas être totalement mièvre, et une réflexion (vite fait hein, genre hop-là au passage ni vu ni connu) sur le sens de l'existence, l'hésitation de l'homme entre déterminisme et contingence, parti-pris de Nic Cage (« Shit just happens ») depuis la mort traumatique de sa femme.
Comme Cuaron pour Les Fils de L'hommes et Spielberg avec La Guerre des Mondes, Proyas fait passer son discours SF catastrophe par sa mise en scène, utilisant à bon escient les possibilités narratives du numérique (mais de manière moins brillante et aboutie que ses collègues).
Quatre séquences sont particulièrement spectaculaires:
1), le plan séquence de l'avion qui se crashe sous les yeux stupéfaits d'un Nic Cage, traversant halluciné le champ de dévastation en tentant en vain de secourir les brulés.
2) Le crash du métro, qui joue lui sur un découpage intense des plans, n'épargnant aucun des utilisateurs malheureux du métro, happés, écrasés sans pitié.
3) La visite nocturne d'un « whispering people », un des extra-terrestres mutiques habillés en noir et coiffés comme Billy Idol, dans la chambre du fils de Nic Cage, lui offrant une vision du sort apocalyptique réservé à la planète Terre.
4) La conclusion du film (SPOILER hein), qui a les couilles de sacrifier certains persos principaux, genre tous, et d'assumer jusqu'au bout son concept de fin du monde. Et quand un mec montre carrément l'explosion de la Terre, ça fait un peu penser à du Tex Avery, mais ça force quand même le respect.
Le film vaut donc mieux que les films catastrophes tout pourris qui pullulent et que les bouses récentes de Nic Cage, qui joue mal, mais pas aussi mal qu'en moyenne, sa coiffure n'étant d'ailleurs qu'à moitié ridicule.
Tout ça grâce à un vrai metteur en scène, doué mais incontestablement maladroit dans son propos, son basculement narratif et son esthétique.
On attend toujours que Proyas réitère le tour de force de Dark City, qui lui; casse incontestablement la bouche du début à la fin.
Prédictions en somme, c'est un poil ridicule, un poil navrant, mais aussi un poil sympa et trippant.
Un film au poil quoi.