"Predestination" bénéficie d'un excellent scénario, et je parie que la nouvelle dont le film est adapté ("All you zombies" de Robert A Heinlein) doit être formidable.
Hélas, le traitement cinématographique d'une telle histoire pose d'autres problèmes que l'écrit, et force est de constater que le troisième long-métrage des frères Spierig (après deux récits horrifiques) ne se révèle pas aussi captivant qu'il aurait pu l'être.
Déjà, les deux réalisateurs australiens choisissent un ton intimiste pour toute la première moitié du film, au cours de laquelle on découvre le destin incroyable de Jane, qui se confie à un barman incarné par Ethan Hawke. Et là, à moins d'être passionné par la problématique de Jane (que je ne révèlerais pas, histoire de ne pas spoiler), ou bien d'être amoureux de l'australienne Sarah Snook, on commence presque à trouver le temps long.
Dans un deuxième temps, le film aborde les voyages spatio-temporels, et les frères Spierig déroulent (enfin) leur récit à proprement parler, même si la première partie s'intègre évidemment dans le scénario. Scénario brillant donc, mais que l'on pressent hélas un peu trop, en raison du faible nombre de protagonistes, et à cause d'effets de mise en scène parfois flagrants, qui mettront sur la voie la plupart des cinéphiles exercés.
"Predestination" repose beaucoup sur le charisme de Sarah Snook, qui tient son double rôle avec talent et conviction. Le seul souci, c'est que John s'apparente visuellement à un croisement entre une Jodie Foster sous cortisone et un Leonardo DiCaprio en attente de pénectomie...
A ses côtés, on retrouve donc Ethan Hawke, toujours solide, tandis que Noah Taylor apporte sa présence élégante dans un rôle secondaire.
Formellement, le film tient la route en dépit d'un budget restreint, à l'image des bonds dans le temps, visuellement minimalistes mais efficaces.
Les frères Spierig signent donc au final un petit thriller SF loin d'être déplaisant, abordant des problématiques bien dans l'air du temps, mais qui n'a pas vocation à rivaliser avec les classiques du genre, en raison de faiblesses rédhibitoires.
