Predestination est le cas typique du film construit autour d’un twist final que n’aurait pas renié ce cher Night Shyamalan. Prenant place dans une uchronie matinée de paradoxes temporels, la réalisation des frères Spierig possède une plastique séduisante alliée à une personnalité visuelle clairement identifiable. Si la réussite formelle est indéniable, il ne faut pas gratter longtemps le vernis pour voir apparaître les premiers défauts du métrage.


Savoir que l’on est baladé dès le prologue n’est pas pour me déplaire, j’aime me laisser porter par une narration, me laisser manipuler pour mieux savourer l’inévitable révélation, encore faut-il respecter les points essentiels à la réalisation d’un tel projet. Predestination manque de peu son objectif à cause d’une écriture trop souvent plate et d’une narration au rythme en berne. Si l’histoire de Jane peut sembler parfois convenue en piochant dans les clichés de la pauvre petite orpheline, elle n’en demeure pas moins stimulante avec ses accroches et ses interrogations. La performance de Sarah Snook étant plus qu’honorable, on se laisse prendre au jeu. En parallèle, les scènes se déroulant dans le bar sont empesées et souffrent de dialogues d’intérim. Même le charme de Ethan Hawk n’arrive pas à sublimer une atmosphère qui se veut enivrante mais qui reste enfumée.


Si les paradoxes temporels sont bien amenés, leurs révélations plutôt bien mises en scène, il ressort un sentiment un peu vain de tout l’édifice. L’architecture a beau être solide, le vent s’engouffre dans ces alcôves de vacuité.


Le personnage triple de Jane est intéressant mais sa construction sur les bases du twist est trop grossière et il est difficile d’éprouver de l’empathie pour une de ses trois incarnations. Le personnage du plastiqueur pétillant n’est là que pour produire un paradoxe de plus mais en totale incohérence avec le personnage de Jane. Les frères Spierig auraient dû limiter le nombre d’effets et se concentrer sur un développement plus profond. Accorder plus d’importance à la qualité au détriment de la quantité.


Predestination appartient à cette catégorie de films sympathiques marqués par l’empreinte de leur réalisateur mais qui déçoivent car voulant trop en faire en oublient le principal. On passe malgré tout un agréable moment et on peste quand arrive le générique : et si Spielberg, Cameron ou Scott avait hérité du projet... que le voyage dans le temps aurait du bon !

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le 14 sept. 2015

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Alyson Jensen

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