Lorsque l’on repense à « Gang de requins » et au récent « Chair de Poule », il est difficile de prendre au sérieux Rob Letterman qui surfe sur une vague de succès, extérieur à l’exploitation cinématographique, d’une franchise qui a marqué les esprits. Mais la beauté du concept, c’est que le public se renouvelle et les générations commencent peu à peu à s’entremêler. Il s’agit donc d’un rassemblement intergénérationnel qui poussent les producteurs à s’impliquer dans ce qui se fait de mieux depuis l’invasion des créatures japonaises sur les écrans du monde. Mais Hollywood, c’est aussi un partenariat de choc avec le service marketing de produits dérivés et c’est ce que l’on retiendra à l’aube d’un visionnage indécis ou douteux. Pourtant, est-il envisageable de s’aventurer dans l’arène des Pokémon, bien que l’on soit totalement étranger à cette culture ? La réponse est à double tranchant.
Ryme City prospère, car la cohabitation entre humains et Pokémon rend tout possible. Mais au cœur de la mêlée, il existe toujours une corporation scientifique gourmande, qui cherche à nuire le monde. Jusque-là, rien ne change vis-à-vis des morales que l’on cherche à défendre, bien qu’elles se cachent sous la forme d’un cliché sans appel. Entre film noir et buddy-movie burlesque, le film ne réussit pas à faire la part des choses et survolent les bases qu’il pose au fur et à mesure. Bien évidemment, l’enjeu est de toucher les initiés et les curieux, c’est pourquoi certaines cases sont à cocher d’office, mais dont on admettra l’efficacité du fan-service. À l’image du célèbre générique qui a bercé la première génération, ce sera souvent sur un ton moqueur ou sous le charme de Ryan Reynolds que la majeure partie de l’œuvre divertira. Dans la peau de la plus iconique des créatures, à savoir Pikachu, il captivera l’attention grâce à son élocution légendaire.
Sans son soutien, il y aurait peu à définir quant à la relation père-fils qui semble dominer l’évolution du jeune Tim Goodman (Justice Smith). Pour le registre exigé, on se contente de fournir les éléments qu’il faut au bon moment, car avec la perspicacité d’un adepte des films grands public, il n’y aura nulle surprise, nul plaisir. La matrice nostalgique jouera donc en la faveur des spectateurs ayant déjà plus ou moins tutoyés l’univers et ses subtilités. Bien entendu, nous trouverons peu de complicité, car tout est mesuré sur le ton familial. S’il l’on échoue sur des aspects techniques, comme l’absence de transitions, ou de mise en scène, il ne reste donc que ces points à alimenter en bonnes volontés. Et dans cet élan, on perd en dramaturgie et en cohérence. Alors que l’improbable peut servir le registre comique, certaines scènes se trouvent rapidement désamorcées afin de constituer un tremplin scénaristique mineur.
« Pokemon : Détective Pikachu » ou un mauvais « Qui veut la peau de Roger Rabbit ? », le défi semblait trop grand pour marquer les points là où il fallait. Le sens du timing comique ou bien le vaste bestiaire à exploiter semble entraver la lecture d’une maigre intrigue, qui ne saurait cacher son plus grand secret à l’enfant suffisamment attentif, au milieu de ses plus grandes stars numériques. On gagnera tout de même un sourire, un regard non pas indifférent, mais plutôt encourageant en observant ce que l’on peut encore proposer. Dans cette longue campagne marketing, on y verra toutefois de bonnes choses à la sortie, mais rien qui ne vaille le coup d’être mémorisé ou de finir dans le panthéon, loin de là.