
Passé sous les Fourches Caudines des festivaliers Cannois bien décidés à ne pardonner aucun faux pas, il convient de reconnaître que la distribution hexagonale de PERSONAL SHOPPER tient presque du miracle. Et les oracles si bien éclairés qui prédisent aujourd'hui une douce agonie du cinéma français se trouvent en réalité, eux-même, piégés sous perfusion, assommés par une cuvée 2016 globalement très audacieuse.
Olivier Assayas ponctue donc une année française marquée par la prise de risques, semble-t'elle éxecutée au mépris des coups de couteaux cinéphiles de plus en plus aiguisés. Mais reconnaissons le, PERSONAL SHOPPER est très hétérogène, inégal, flirtant parfois avec une naïveté irritante. S'arrêter sur ce simple constat serait, en revanche, une preuve aiguë de mauvaise foi alors que le réalisateur s'aventure bien volontiers hors des sentiers battus. Olivier Assayas s'acharne dans une volonté exacerbée d'établir une proposition cinématographique, traversant le drame intimiste, le thriller, le fantastique et l'horrifique.
De fait, c'est en refusant de faire son deuil que Maureen s’enfonce avec effroi dans une stupeur dérangeante, et le cauchemar grandit avec une inquiétante fatalité. La sublime muse d'Olivier Assayas erre au milieu des limbes d'un monde hybride, mort-vivant, qui s'assombrit devant la fulgurante progression des ténèbres. Film chimérique, spectral, labyrinthique, il est difficile d'en saisir l'entière substance et cette aura mystique propulse PERSONAL SHOPPER au statut d'énigme animée fascinante.
Ceux qui se gargariseront à la machine à café tout en s’esclaffant sur "le côté Lynchéen" de PERSONAL SHOPPER auront probablement manqué un zeste de la réflexion proposée par ce curieux assemblage. Impossible de rester insensible devant un tel objet.